Pour Halloween, plusieurs dizaines d'intrépides ont choisi de passer la soirée dans un ancien orphelinat catholique à Etagnac, en Charente limousine. Costumes cauchemardesques, film d'horreur, concours de rire démoniaque. L'événement était organisé pour la troisième fois par le collectif Saint-Juniaud Champ Libre.
Dans la nuit charentaise, la silhouette d'un clocher gothique se découpe. De son sommet se dégage une lumière rouge, comme pour indiquer aux visiteurs indésirables : "N'entrez pas ici".
Pourtant, ils sont plusieurs dizaines d'intrépides, la plupart déguisés, à oser franchir l'immense porche menant à l'intérieur de cet orphelinat abandonné, comme Axelle et Yann. "C'est excitant ! On a tous les deux vu énormément de films d'horreur donc c'est l'univers qu'on aime bien." Sous l'immense charpente, un loup-garou se promène en liberté. "Le site est magique, c'est carrément insolite", abonde-t-il entre deux grognements.
"On avait envie de se faire peur"
20h30, la soirée commence auprès du feu allumé dans la grande cour intérieure. Les comédiens de Champ Libre évoquent l'esprit d'un enfant qui hanterait toujours les lieux, baptisé... Bernard. Entre rires et hurlements, le ton est donné.
Laetitia est venue avec sa fille de quinze ans et sa maman de soixante-treize ans. Trois générations prêtes à vivre le grand frisson. "D'habitude, je fête Halloween juste avec mes enfants, comme ça, mais ce soir, on avait envie de se faire peur. C'est ma mère qui a proposé", lance Laetitia.
Après un passage par la case pop-corn, le public de 75 personnes est conduit dans l'ancienne chapelle, désacralisée, transformée pour l'occasion en salle de cinéma. Autel, confessionnal, lustre, le lieu jadis sacré a gardé quelques éléments de son mobilier religieux.
"Quelle horreur !"
21 heures, la séance commence. À l'affiche, Evil Dead, un classique du cinéma d'horreur sorti en 1981. L'histoire suit un groupe d'étudiants américains qui décide de passer leurs vacances dans une cabane perdue dans la forêt, et qui réveille malencontreusement des esprits maléfiques. Si les effets spéciaux ont (beaucoup) vieilli, le film reste drôlement effrayant. À l'instar d'un train-fantôme, le public oscille entre rires et cris.
22h30, séance terminée. Sylvie est soulagée. "Quelle horreur..." glisse-t-elle, partagée entre rire et dégoût des scènes outrageusement gores.
Mouah-ah-ah
La soirée se termine avec un concours de rire démoniaque, jugé à l'applaudimètre. Claire, animatrice dans une résidence seniors, avoue s'inspirer du Joker et du Pingouin, les antagonistes de Batman. "Les sorcières de Hocus Pocus, ça marche bien aussi."
Si sa prestation est très convaincante, c'est Isabelle, tout droit échappée d'un asile, qui remporte la compétition. "En étant le plus naturel possible...", lâche-t-elle sans jamais sortir de son personnage.
Du couvent au "lieu de vie"
Construit dans les années 1870 par la famille des comtes de Richemont qui en fit don à l'Église, le lieu fut tour à tour couvent, puis orphelinat, camp de réinsertion de prisonniers, colonie de vacances... avant d'être laissé à l'abandon à la fin des années 1990.
On a commencé à faire des soirées lecture d'horreur avec de la musique jouée à partir d'instruments trouvés sur place.
Charles Meillat,Directeur du collectif Champ Libre
En 2019, le site est racheté pour une bouchée de pain par un particulier de Saint-Junien qui décide d'en faire un "lieu de vie". Le collectif Champ Libre l'investit depuis, pour ses soirées d'Halloween, mais projette d'y organiser d'autres événements.