Fermeture du théâtre de la Passerelle à Limoges : les théâtres indépendants sont ils trop fragiles ?

Le 31 décembre prochain, le théâtre de la Passerelle fermera définitivement ses portes. Une annonce de son fondateur, Michel Bruzat. 36 ans que les amoureux des beaux textes trouvaient en ce lieu de quoi être s'inspirer pour s’élever. La Passerelle est l’un des rares théâtres indépendants en Haute-Vienne. Comment se portent-ils ?

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« On a beau le savoir, la nouvelle de la disparition de la Passerelle à la fin de cette année, ça secoue. J’y ai joué, sous la direction de Michel Bruzat mais pas seulement, ça va être dur de faire sans. D’autant que le boulet n’est pas passé loin pour nous non plus à Expression 7 cette année. »

Philippe Labonne, directeur artistique d’Expression 7

Quand Philippe Labonne, directeur artistique d’Expression 7, parle de l’annonce de Michel Bruzat, on ressent la fragilité de ces structures qui font partie de notre paysage depuis des décennies, que l’on croit présentes éternellement. Ce théâtre et la Passerelle partagent quasiment le même public, amoureux des beaux textes et des mots.

Un paysage local qui évolue

La compagnie de Max Eyrolle, autre auteur et metteur en scène bien connu de la scène artistique de Limoges, et Expression 7, ont perdu en juin le lieu emblématique de leurs spectacles, rue de la Réforme. La destruction des bâtiments a commencé.

Mais la solution que leur a proposée l’adjoint au maire de Limoges chargé du développement de la politique culturelle de la ville, Philippe Pauliat-Defaye, s’avère aujourd’hui à leurs yeux une bonne option : désormais installée dans les murs du centre culturel Jean Gagnant, l’équipe d’Expression 7 partage avec celle de Jean Gagnant le plaisir de se voir les uns et les autres travailler sur des terrains de jeux différents : pour le centre culturel, la programmation de concerts par la fédération Hiéro, le Hot Club ou le festival Eclat d’Email ainsi que la pratique amateur. Pour Expression 7, ce qu’ils faisaient déjà rue de la réforme, à savoir la programmation de spectacles de compagnies professionnelles.

« On est accueillis et bien accueillis. C’est une agréable surprise, cette première phase d’installation et de travail avec l’équipe de Jean Gagnant, alors que nous sommes arrivés avec nos archives, ce que l’on est, avec notre studio et notre web radio. Tout se passe au mieux, on prend des cafés ensemble, on profite de cette émulation générale, nous sommes ravis par cette première phase d’installation. »

Philippe Labonne

Cette mutualisation des lieux et cette émulation artistique semble profiter à tous : "Ça va peut-être nous permettre une visibilité auprès d’un autre public, celui qui vient aux concerts et qui va être interpellé par notre programmation… Le public des concerts de jazz du Hot Club pourrait s’intéresser à nos spectacles, on ne sait pas encore pour l’instant, on verra…" 

Un modèle économique fragile

En Haute-Vienne, il y a des scènes conventionnées d’intérêt national, comme le Théâtre du Cloitre à Bellac, le Théâtre de l’Union qui est le centre national dramatique du Limousin, et des théâtres indépendants, comme l’est aussi les Champs-Libres à l’étoile bleue de Saint-Junien.

Ces théâtres ne pourraient pas vivre sans les subventions de la ville, du département, de la région, et de l’Etat. Mais à eux aussi de relever de nouveaux défis : intéresser le jeune public, les étudiants qui même inscrits en fac de lettres ne viennent jamais voir les spectacles, créer de nouvelles formes artistiques aussi, comme cette web radio créée par Expression 7 pour la diffusion de pièces radiophoniques, émission "Pas que ça à faire". Celles-ci seront reprises sur le DAB par la radio Beaub'FM le jeudi après-midi.

Tous les théâtres indépendants ne sont pas subventionnés, comme la Comédie de Limoges, petit théâtre ouvert 3 soirs par semaine. Sa programmation est suivie par un public fidèle mais pas seulement. Sa jauge de 49 places et ses faibles charges assurent à son dirigeant, Nicolas Gille, une activité pérenne.

 « Il est vrai que la petite jauge décourage certaines compagnies, surtout si les artistes sont plusieurs sur scène. Pour dix spectacles approchés, trois ou quatre ne donnent pas suite. C’est en effet un risque pris puisqu’ils perçoivent 50% des recettes le soir du spectacle ».

Nicolas Gille, dirigeant de la Comédie de Limoges

Si les artistes viennent à leurs frais, leur hébergement est pris en charge en revanche par le théâtre. Nicolas Gille prend donc plus de temps pour trouver des spectacles de qualité. Il y a la prospection sur les réseaux sociaux, le bouche à oreille et le repérage lorsque les spectacles se produisent. C’est le cas notamment à Avignon où il passe tout son mois de juillet.

Aucune subvention, une recette exclusivement fournie par la billetterie. Nicolas Gille est satisfait, la fréquentation est là. Il reste conscient que l’activité est viable parce qu’il n’a pas de salarié.

Des structures en soutien

L’Association des Théâtres Privés en Régions porte la voix de ces théâtres indépendants, quel que soit leur statut (SARL, SAS, SASU, EI, SA) : enjeux éthiques, financiers, sociaux et sociétaux, avec l’objectif d’une visibilité et d’une reconnaissance vis-à-vis des institutions culturelles, socio-culturelles et politiques. Cette association défend leurs intérêts et mutualise leurs actions vis à vis des pouvoirs publics.

Le Syndicat National des Théâtres Privés rassemble par ailleurs des adhérents de tous les horizons : théâtres/producteurs, producteurs/tourneurs, et exploitants de salles de spectacles qui contribuent à faire vivre les pièces de théâtre. Il a lancé un Observatoire économique et social du Théâtre Privé pour améliorer la connaissance du secteur et défendre la mise en place de dispositifs de soutien adaptés pour ces entreprises.

L'Association pour le Soutien du Théâtre Privé, qui encourage le théâtre privé en plaçant la liberté de programmation et l’autonomie de gestion du directeur de théâtre au cœur de son action. Elle propose un réseau de solidarité professionnelle autour d’une éthique artistique et sociale souvent menacée par une marchandisation croissante de la culture et du spectacle et pas sécurisée par les subventions publiques.

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