C’est l’histoire d’un geste antigaspi qui transforme un déchet en objet de luxe. Une usine de papier à Saint-Léonard-de-Noblat, en Haute-Vienne, fabrique du papier artisanal. Elle a récemment mis au point un nouveau papier avec des fibres de légumes. Un produit qui plaît beaucoup et qui fait le bonheur de quelques professionnels locaux.
À la cantine des écoles de Saint-Léonard, 80 repas sont servis par jour. Les cuisiniers travaillent avec des légumes frais, et mettent de côté les épluchures. "Le vert de poireau, les épluchures d’échalotes, les carottes, les fanes de radis, le chou vert...", énumère, Bruno Perreau, chef cuisinier dans les cantines de Saint-Léonard-de-Noblat. Après le tri, Camille Berger, salariée du Moulin du Got, vient récupérer cette matière première pour le transformer en un papier très original.
On peut avoir des épluchures fraîches, donc avoir la vraie couleur de la carotte, du poireau, sans que ce soit abimé.
Camille BergerAnimatrice papetière au Moulin du Got
Dans cette entreprise de fabrication de papier, les épluchures sont hachées puis mélangées à la pâte à papier. Une fabrication 100% manuelle. Géré par une association, le Moulin du Got continue à fabriquer le papier avec des méthodes ancestrales. Le "papier légume" fait partie de ce genre de procédé, mais il est revisité. "Pendant le confinement, on a eu beaucoup de temps pour améliorer, travailler avec d’autres légumes, faire des essais, des tests de raffinage, comment celui de travailler les fibres", explique Marie-Claire Cluzel, directrice du lieu.
"La boucle est bouclée"
Du papier épais, irrégulier, c’est ce qui fait son cachet. Cela n’a pas échappé à un restaurateur charentais haut-de-gamme : depuis l’ouverture de son nouveau restaurant, il fait imprimer ses menus à Saint-Léonard-de-Noblat.
Je les ai rencontré au mois de février, au Salon de l’agriculture à Paris. J’étais en pleine préparation de l’ouverture du restaurant, ici. Quand j’ai vu ça, je me suis dit: "Il faut absolument que j’ai ce papier dans mon restaurant pour faire mes cartes.
Pascal PressacRestaurateur à Chasseneuil-sur-Bonnieure
"Ce que j’aimais montrer, c’était la possibilité de travailler le produit dans ma cuisine et ensuite de retravailler les épluchures de légumes sur ces menus. La boucle est bouclée en fait", estime le restaurateur.
Dans son nouveau restaurant, les fidèles de Pascal l’ont suivi. Le menu en papier légumes fait presque partie des attractions, beaucoup de clients aimeraient l’emporter. Alors il a encore une idée de collaboration avec son fournisseur : "J’aimerais que l’on fasse un papier avec des graines : lorsque les amuse-bouches sont terminés, on donne le papier au client, il l’emmène chez lui, il le met dans un pot et en quelques mois il y a une petite fleur qui pousse."
Avec des graines peut-être, avec des légumes aujourd’hui : ces petits objets en papier font toute la différence et ont créé un vrai marché de niche.