Dans le chapitre écoconstruction, après les maisons en bottes de paille apparues il y a vingtaine d'années, une nouvelle technique est en train de voir le jour : la paille hachée. Ce nouveau procédé a été imaginé par une coopérative créée en Haute-Vienne. La paille hachée est pleine de perspectives et vient d’obtenir son homologation technique. (republication)
À Limoges, se trouve ce bâtiment entièrement en bois, mais derrière ses parois se cache un isolant qui pourrait réinventer la construction écologique : la paille hachée.
Le futur de l'artisanat
La CAPEB, confédération qui représente 500 artisans de la Haute-Vienne, fait partie des premiers acteurs de la région à employer cet isolant. L'objectif est de servir d'exemple, et d'être imité dans cette démarche.
"On a voulu également porter un projet qui évolue dans le sens du temps qui permettrait à certaines filières de se développer, et montrer, un peu, le sens du futur de l'artisanat", espère Thomas Sabatier, secrétaire général de CAPEB Haute-Vienne.
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Le matériau est si prometteur qu'à Poitiers, en zone céréalière, une coopérative s’est créée. Cette SCIC indépendante (société coopérative d’intérêt collectif) s’appelle IELO, et c’est un Limougeaud qui la dirige. Elle est dirigée par un Limougeaud.
"Nous avons actuellement 130 sociétaires, qui sont aussi bien des architectes que des bureaux d'études, des maîtres d’œuvre que des entreprises de charpente, de construction ou des promoteurs, détaille Nicolas Rabuel, directeur général de IELO. Nous avons à peu près une centaine de projets à ce jour qui ont démarré ou vont démarrer dans l'année."
La paille hachée, plus puissant que la laine de verre
Dans l'entrepôt, les bottes de pailles sont transformées en miettes. Ces dernières sont ensuite conditionnées en ballots de quinze kilos prêts à être utilisés pour l'isolation. Cette année, la coopérative qui fournit IELO en a produit 5 000 tonnes. D'ici à trois ans, elle en fera trois fois plus.
"15 000 tonnes, ça représentera, à terme, une quinzaine d'agriculteurs rapporteurs, avec une surface d'environ 5 000 hectares", analyse Baptiste Breton, directeur de la coopérative Brin d’or, fournisseur de la coopérative IELO.
Ces fameux ballots sont achetés par une entreprise de construction bois à Aixe-sur-Vienne (Haute-Vienne). La paille hachée est insufflée dans des cloisons, préfabriquées dans l’usine. Ce matériau est quatre fois plus performant que la laine de verre.
"L'intérêt de ce matériau-là, mis à part, le confort thermique, c'est aussi le déphasage et notamment le confort d'été, puisque ce matériau-là, assure un déphasage de treize heures. C'est le temps que va mettre la température extérieure pour avoir un impact sur la température intérieure", détaille Fabien Gaumy, président de la SAS Guillaumie-construction bois.
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Un nouveau souffle dans le marché de l'isolation
Le principe est de fabriquer tous les éléments en usine comme un jeu de construction. Ensuite, il faut tout assembler sur le terrain.
L'assemblage est fait sur place pour la construction d'un futur pôle d'accueil de loisirs pour enfants à Uzurat (Haute-Vienne). Selon l'architecte, la paille hachée est plus facile à mettre en œuvre que les bottes de paille.
"Pour pouvoir utiliser ses performances et ses qualités, dans un modèle industrialisé, la paille hachée a tout son sens. C'est hyper intéressant comme matériau, c'est écologique, c'est local. Ça a des performances géniales", souligne Hugues Giraudy, architecte de l'Atelier 4, à Limoges.
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Depuis fin mars, la paille hachée est officiellement autorisée à figurer parmi les matériaux de construction homologués. IELO a d'ailleurs a reçu une ATEX. "C'est une reconnaissance en technique courante qui donne l'assurabilité automatique des entreprises, dès lors qu'elles sont formées et compétentes pour ce type de pratique. Et donc ça s'utilise, au même titre que les autres solutions déjà courantes et dominantes sur le marché de l'isolation du bâtiment", assure Nicolas Rabuel.
Grâce à cette habilitation, des marchés s’ouvrent : le collège d’Isle près de Limoges sera rénové avec cette technique et celui de Couzeix pourrait lui emboîter le pas. Et bientôt, ce matériau s'invitera dans la maison des particuliers.