Inondations, crues... Avec le réchauffement climatique, les épisodes de pluies extrêmes sont plus fréquents et plus intenses. Nous sommes allés poser la question à un pêcheur et à un agriculteur haut-viennois.
À Bessines-sur-Gartempe, sur sa parcelle de douze hectares d'orge d'hiver, Antony Feissat est inquiet pour sa récolte qui devrait intervenir fin juin.
Cet éleveur céréalier est à peu près sûr que le rendement ne sera pas au rendez-vous à cause des pluies abondantes de ces derniers mois : "on est sur une zone où il y a un excès d'eau, donc la culture est morte. On a semé de nouveau des cultures de printemps il y a près d'un mois pour combler ce manque. Mais aujourd'hui, malgré cette deuxième semence, c'est encore en train de mourir. Avec cet excès d'eau, c'est 10% de la surface de céréales qui est touchée".
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Les crues de ces derniers mois sont inhabituelles et la situation n'est pas prête de s'améliorer selon Thierry Gonin, météorologue à Limoges : "Logiquement, l'anticyclone des Açores va doucement se décaler vers nous et nous protéger des perturbations, comme cela a tendance à se produire chaque année. Mais maintenant la météo est bien capricieuse : nous ne sommes pas à l'abri qu'une dépression vienne bousculer tout ça et qu'on ait de grosses intempéries".
À cette période de l'année, les vaches devraient être dehors, mais le sol est trop humide.
Quand la nature s'adapte
Rendez-vous dans une frayère à brochets située sur les bords de Vienne, une zone qui fonctionne justement avec les crues. Des alevins sont présents en nombre grâce à la force des crues de ces derniers mois.
Cela ne se voit pas à l'œil nu, mais Pierre Pommeret, directeur de la fédération de pêche et de la protection des milieux aquatiques, vient régulièrement dans cette pouponnière vérifier le bon déroulement de la reproduction des brochets, une espèce qui profite de ces épisodes climatiques : "Ils se plaquent sur les berges ou sortent complètement du lit du cours d'eau pour se mettre à l'abri des courants trop forts. Le brochet se reproduit en début d'année, au mois de février ou de mars, donc il a besoin que la rivière monte en volume de façon à pouvoir rentrer sur ce genre de zone, et y trouver une végétation immergée pour y poser ses œufs".
Ce dernier précise que les crues peuvent avoir des conséquences positives sur le milieu aquatique, comme ici pour la reproduction du brochet. Pour d'autres espèces, le bilan est moins positif : "des espèces vont potentiellement en pâtir, c'est le cas de la truite fario qui voyait ses alevins en stade d'émergence. Quand on a subi des montées d'eau très rapides (fin mars, NDLR), on peut imaginer une mortalité conséquente sur ces jeunes stades."
Le spécialiste précise toutefois que si ces crues peuvent être impressionnantes pour l'homme (presque 300 mètres cubes par seconde dans la traversée de Limoges en mars), les espèces sont adaptées à ces épisodes rapides, et se mettent à l'abri des courants trop forts.
Abondance de bien ne nuit pas, dit-on, mais ici, les épisodes de pluies qui se succèdent génèrent, quoi qu'il arrive, des réactions en cascade.