La carte scolaire est-elle un levier de mixité sociale? Alors que les élèves viennent de faire leur rentrée, Dimanche en Politique en Limousin ouvre le débat. A Limoges, il n’y a jamais eu de sectorisation formelle au niveau des écoles primaires. La municipalité étudie actuellement la possibilité d'expérimenter le port de l'uniforme à l'automne 2023.
Plus de 110 000 élèves ont fait leur rentrée scolaire 2023 dans l'Académie de Limoges. Notre émission Dimanche en Politique s’intéresse à un thème qui a longtemps été porté par le précédent Ministre de l’Éducation nationale Pap Ndiaye, celui de la mixité sociale à l’école. Les élèves français ne se mélangent pas, ou trop peu. Ce constat, dressé depuis plusieurs années, a été confirmé il y a quelques mois par des statistiques officielles du Ministère de l'Éducation nationale.
Qu’en est-il en Limousin et plus particulièrement à Limoges où il n'y a jamais eu de sectorisation formelle dans le premier degré ? Faut-il favoriser ce mélange de diverses classes sociales et si oui, comment ? La carte scolaire est-elle un levier de mixité sociale ou les choses sont-elles plus complexes ?
Pour en parler, Annaïck Demars reçoit quatre invités :
- Marie-Mélanie Dumas, co-secrétaire du syndicat enseignant SNUIPP-FSU pour la Haute-Vienne ;
- Vincent Jalby, adjoint au maire de Limoges en charge de l’éducation (Modem) ;
- Alain Dobigny, administrateur de la FCPE (fédération des parents d’élèves) de Haute-Vienne ;
- François Dubet, sociologue, ex-directeur d'études à l'École des hautes études en sciences sociales (en duplex depuis nos studios de Bordeaux)
La mixité sociale à l'école : un défi ambitieux et ultra-sensible
Marie-Mélanie Dumas, enseignante en primaire dans le quartier prioritaire du Val de l'Aurence à Limoges, est favorable à la mixité : "La mixité permet d'avoir une vue plus large de ce qu'est la réalité, d'être dans l'altérité et en plus, les élèves les plus forts pourront expliciter leur pensée en coopérant avec des camarades, ce qui est une sacrée compétence de communication, ça les fait progresser. Quant aux élèves les plus faibles, ils peuvent compter sur des pairs qui peuvent se mettre à leur hauteur et leur expliquer, donc ça ouvre le champ des possibles".
À Toulouse, cinq ans après le lancement du programme mixité sociale dans les collèges de Haute-Garonne, la fondation Jean Jaurès dresse un premier bilan positif. Les élèves autrefois scolarisés dans des établissements en zone prioritaire sont 20% de plus à avoir obtenu leur brevet.
Le précédent ministre de l'Éducation Pap Ndiaye avait annoncé pour mai 2023 un plan ambitieux en faveur de la mixité sociale avant de revoir largement ses ambitions à la baisse et de finalement laisser sa place à Gabriel Attal.
Pap Ndiaye a eu le mérite d'essayer de poser cette question de la mixité sociale, d'essayer d'avoir un nouveau contrat avec l'école privée et il a été lâché.
François Dubet, sociologue spécialiste de l'éducation
"Mon sentiment est que le gouvernement et le Président, qui est devenu une sorte de super Ministre de l'Éducation, sont extrêmement discrets là-dessus, que Pap Ndiaye en a payé la facture et qu'à la place, on nous raconte des histoires étranges sur les uniformes...", analyse François Dubet.
Limoges n'exclut pas d'expérimenter le port de l'uniforme
Le ministre de l'Éducation nationale, Gabriel Attal, indiquera à l'automne 2023 les modalités d'expérimentation de la tenue unique pour tous à l'école. Il appelle les élus désireux que la mesure soit testée dans leurs établissements à se manifester.
Vincent Jalby : "Je me méfie du buzz médiatique sur les nouvelles expérimentations en ce jour de rentrée. Toutefois, le Président a ouvert la porte et je suis complètement favorable à toutes les expérimentations, c'est comme ça qu'on peut progresser, évoluer. C'est un sujet sur lequel la Ville réfléchit, et pas depuis hier, depuis déjà quelque temps. Il y a uniforme et uniforme.
De manière générale, c'est l'idée que les enfants du primaire puissent s'identifier à un établissement scolaire, à l'école de la République et créer non pas une sorte d'uniformité mais une forme d'adhésion à un système : ça peut être une tenue unique, un signe de reconnaissance, c'est quelque chose sur lequel on est en train de réfléchir.
Vincent Jalby, adjoint au maire de Limoges en charge de l'éducation
On va voir les conditions de cette expérimentation : de toute façon, on travaillera sur un périmètre relativement réduit, avec les équipes pédagogiques et les parents, parce que si l'expérimentation n'est pas partagée avec les enfants et les familles, on va dans le mur"
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