De 28,5% d’abstention au premier tour en Haute-Vienne en 2007 à 46,6% en 2022… La participation aux élections législatives connaît une érosion forte et continue, avec des conséquences sur les qualifications au second tour et sur la vie démocratique de la région.
À la sortie d’un bureau de vote du quartier de Val de l’Aurence à Limoges, les électeurs se sont déplacés ce dimanche 12 juin avec plus ou moins de conviction. Pour Mohamed : "On vient parce qu’il reste une petite chance de changer les choses." Selon Hélène : "Ça m’est arrivé de ne pas voter, et j’ai toujours regretté." Guillaume conclut : "C’est important de dire ce qu’on pense et de faire avancer nos idées."
Baisse constante
Dans le département, seulement 53,4% des personnes inscrites sur les listes électorales ont suivi cet exemple. Elles étaient 56,1% en Corrèze et 54,4% en Creuse. Si ces chiffres sont bien supérieurs à la moyenne nationale, ils sont en baisse constante. En 2007, la participation était en Haute-Vienne de plus de 71%, plus de 70% en Corrèze, et plus de 65% en Creuse.
En Limousin, la participation la plus élevée est relevée à Meyrignac-l'Eglise, dans la 1ère circonscription de Corrèze : 89.66 % des 58 inscrits se sont rendus aux urnes. A l’inverse, à Bourganeuf, en Creuse, seuls 42.84 % des 1494 inscrits ont voté.
Pas de triangulaire
Cette situation a d’abord des conséquences comptables. En effet, pour se maintenir au second tour, il faut arriver dans les deux premiers, ou réaliser un score au moins égal à 12,5% des inscrits. Avec une forte abstention, ce chiffre est très difficile à atteindre, et il n’y aura pas dans la région de "triangulaire" dimanche prochain.
Dans la deuxième circonscription de Corrèze, le candidat de la majorité présidentielle Nicolas Brousse est 3ème avec un score de plus de 20%, mais il ne représente que 10% des inscrits. Dans la 3ème circonscription de Haute-Vienne, le candidat du Rassemblement National Albin Freychet, lui aussi 3ème, approche les 20% des suffrages exprimés. Mais cela représente moins de 10% des inscrits.
"Ces nouveaux candidats n’intéressent pas les électeurs"
Pour le chercheur en sciences politiques de l’université de Limoges Thomas Marty, cette baisse de la participation est étonnante pour des élections législatives.
Pour l'expliquer, il évoque deux facteurs, et le premier est historique : "On a beaucoup de nouveaux candidats. Ils sont jeunes, ce sont des entrepreneurs, ils viennent de la société civile... Mais malgré ce renouvellement, ces nouveaux candidats n’intéressent pas les électeurs."
Thomas Marty évoque aussi un facteur géographique : "On voit qu’il y a des différences. La Creuse s’enfonce dans une abstention endémique et assez régulière (…). La Corrèze avait tendance à maintenir une certaine forme de civisme et de participation, et là on voit que ça s’effondre, et c’est nouveau."
Un rebond peu probable
Reste à savoir s’il y aura un rebond de participation pour le second tour ce dimanche 19 juin.
Rien n’est moins sûr : en 2017, la participation entre les deux tours avait baissé de plus de 7 points en Haute-Vienne, en Corrèze, et en Creuse. Elle avait aussi baissé lors des législatives de 2012 en Haute-Vienne et en Corrèze. Elle avait alors légèrement augmenté en Creuse…