L'entreprise Bernardaud a déposé une plainte pour dénonciation calomnieuse à l'encontre d'un "corbeau" présumé l'accusant de faire venir sa porcelaine blanche d'Asie. La répression des fraudes a ouvert une enquête pour suspicion d'infraction au code de la consommation. Une affaire sensible qui suscite de nombreuses réactions dans le cercle très fermé des porcelainiers.
Tout a commencé le 28 mars 2023 à Oradour-Sur-Glane. De nombreuses voitures de police ont été aperçues aux abords de l'usine Bernardaud.
Les agents de la répression des fraudes (DGCCRF) ont effectué une longue perquisition dans les locaux du porcelainier, nous confirmant : "des investigations sont en cours dans le secteur de la fabrication de porcelaine pour suspicion d’infractions au Code de la consommation."
S’agissant d’investigations de nature pénale, aucun autre élément ne nous a été fourni officiellement.
Le 31 mars 2023, Michel Bernardaud, président du directoire de l'entreprise, nous déclarait : "il pourrait s’agir d’un problème de normes françaises, plus strictes que certaines normes européennes, sur la toxicité des produits utilisés pour les décors."
Mais, des informations concordantes nous permettaient déjà de penser que l'enquête pouvait porter sur l'endroit où était fabriquée la porcelaine.
Plaintes pour dénonciation calomnieuse
Aucun autre élément n'a filtré sur cette affaire pendant plusieurs mois. Puis, le magazine Challenge a publié un article annonçant que Bernardaud et l'IGP "Porcelaine de Limoges" avaient déposé des plaintes pour dénonciation calomnieuse à l'encontre d'un "corbeau" accusé de "semer la zizanie dans le secteur de la porcelaine à Limoges."
Michel Bernardaud ne souhaite plus s'exprimer sur cette affaire. Il estime en effet qu'il n'a que de mauvais coups à prendre dans cette affaire de dénonciation présumée qu'il juge "minable".
Il a donc laissé son avocat nous confirmer les informations du magazine Challenge :
L’ensemble des porcelainiers de Limoges et la maison Bernardaud en particulier ont été victimes d’une dénonciation calomnieuse d’un petit concurrent aigri. La vérité sera établie et le corbeau puni. Bernardaud n’a strictement rien à se reprocher et attend avec hâte et confiance les conclusions de l’enquête de la répression des fraudes.
Maître Alexandre Varaut, avocat de la société BernardaudFrance 3 Limousin
Au nom de l'IGP "Porcelaine de Limoges", Maître Alain Chabaud a, lui aussi, déposé une plainte pour dénonciation calomnieuse, estimant que l'image de l'Indication Géographie Protégée avait été écornée. Parlant du "corbeau présumé", il explique : "ce personnage est allé au-delà d'une simple dénonciation calomnieuse en disant aux services de la DGCCRF que nombre de porcelainiers limougeauds faisaient venir leur porcelaine d'Asie. Il n'y a absolument aucune preuve tangible dans le dossier".
Des échanges houleux et un climat de suspicion
Dans le petit monde de la porcelaine limougeaud, tous les regards se sont, depuis longtemps, tournés vers l'entreprise Jacques Pergay, victime de sabotages et actes de malveillance en série ces derniers mois.
Joint par téléphone, Jacques Pergay nous confirme avoir reçu un appel de Michel Bernardaud : "Il m'a appelé et raccroché au nez en m'insultant et en me traitant de corbeau. J'ai accepté de vous parler pour expliquer que je n'ai rien d'un corbeau. J'ai juste été auditionné comme d'autres par la répression des fraudes."
La DGCCRF s'est bien rendue dans les locaux de son entreprise le 20 septembre 2022 pour une audition.
Jacques Pergay assure avoir déclaré ce qui suit : "Des livraisons de vaisselle en porcelaine en provenance d’Asie avaient lieu sur le site de l’entreprise Bernardaud à Aixe-Sur-Vienne. La société Bernardaud est un fabricant et décorateur. Le site d’Aixe-sur-Vienne lui sert d’entrepôt de stockage et d’exploitation."
Les Porcelaines Pergay ont quitté Aixe-Sur-Vienne en 2018. Selon Jacques Pergay, ces faits se seraient déroulés dans les années précédant son déménagement.
Lors d'un reportage tourné en décembre 2018, nous avons demandé à Michel Bernardaud s'il faisait fabriquer sa porcelaine blanche en Asie. Il nous avait répondu ne plus avoir recours à ce genre de pratiques depuis une dizaine d'années.