Projet de ferme de 3100 bovins : "On peut encore trouver des solutions pour que l’agro-industrie ne s’accapare pas de terres agricoles"

Alors que l'enquête publique du projet de ferme de 3100 bovins à Peyrilhac (Haute-Vienne) se termine ce 12 avril 2024, la Confédération paysanne et l'association Terre de Liens organisaient une réunion publique, ce jeudi soir. Riverains, agriculteurs, élus et porteur de projet ont pu s'exprimer calmement.

Une salle comble. Elle suffisait à peine à regrouper l’ensemble du public présent, ce jeudi 11 avril.  À l’invitation de Terre de liens et de la Confédération paysanne, les riverains, mais aussi l'agriculteur propriétaire du site et l'acheteur, le groupe agroalimentaire T’Rhéa, étaient présents.

Trois heures de réunion pour aborder, confronter les points de vue et, pour les riverains, tenter d’obtenir des informations sur ce projet agricole d’envergure entre Peyrilhac, Nieul, Chavaignac. "Je suis arrivé ici, je n’avais pas d’a priori. Quand on pose la question 'combien de camions aujourd'hui', on a un flou artistique. On demande aux gens de se prononcer sur un projet pour lequel on n’a pas les éléments de base. Cela pose un vrai problème démocratique", déplore un riverain. 

L’activité actuelle de l’agriculteur comprend 700 bovins pour de l’import-export. Mais l'éleveur cède son exploitation de 600 hectares à la société française agroalimentaire T’Rhéa, déjà implantée en Limousin comme à Saint-Martial-le-Vieux, en Creuse. Elle sera convertie en centre d’engraissement pour "trois fois plus d’animaux" et "trois fois plus de nuisances", selon les opposants. Ce que conteste le vendeur.

 

Le groupe aura moins d’animaux que j’en ai aujourd’hui. Le flux de camions est aujourd’hui plus important qu’il ne sera. L’activité sera inférieure à celle que j’ai aujourd’hui puisque les animaux chez moi restent entre 21 et 25 jours. Le transit est beaucoup plus important. Les animaux de T’Rhéa eux, vont rester 250 jours à l’engraissement. Pendant ce temps, les animaux ne bougent pas.  

Emmanuel Thomas, agriculteur, vendeur

Un modèle agricole intensif contesté 

  • Les pollutions en question

Mais au-delà du nombre d'animaux, c’est le modèle agricole qui est pointé du doigt. Les riverains s’inquiètent des nuisances olfactives par les épandages de fumier, du trafic avec des rotations de camions de 40 tonnes qui viendraient livrer la paille, l'alimentation (achats à 95%), et le fumier serait envoyé vers un futur méthaniseur qui serait implanté à Saint-Laurent-sur-Gorre. Selon l’association Saint-Junien environnement, sans compter les bétaillères, près d'une vingtaine de véhicules pourraient circuler par semaine, soit des émissions considérables de CO2 et de risque de dégradation du réseau routier à la charge du département, de la commune, donc des citoyens.

Limousin nature environnement présente, elle aussi,, dénonce une absence d’étude environnementale digne de ce nom et une étude d’impact sans état des lieux de départ avec des chiffres qui varient notamment sur l’eau. "Des chiffres de consommation sous-évalués, des données fausses comme un taux d’évaporation identique en avril, mai, juin, ce qui est naturellement loin d’être le cas", interpelle Michel Galliot, président de Limousin nature environnement, climatologue de métier. 

Quant à l’association les amis de la Terre, elle rappelle que le soja qui va être fourni à ces nombreux bovins est à 87% importé d’Argentine, où la déforestation, l’usage de pesticides et d’OGM sont pratiqués et l’impact sur les populations locales catastrophique.

De son côté, le porteur de projet expliquait à France 3, en mars dernier, par la voix de Pascal Nowak, chargé de mission : "Il est hors de question de dégrader un environnement, qui est, quelque part, le porteur de projet."

À lire aussi : Ferme aux 3000 vaches en Haute-Vienne. "il est hors de question de dégrader un environnement", selon le porteur de projet

  • Sans paysan

Pour les agriculteurs en faveur du projet, ils rappellent qu’"il faut des filières locales, au moins françaises, pour lutter contre la concurrence, comme l’agneau néo-zélandais à 9  le kilo, quand nous, on le fait à 23 le kilo". 

D'autres, dénoncent la mainmise de l'industrie pour un projet "sans paysan".

On sait que la transmission, c’est un combat, mais là, le combat n’a pas été mené… Donc, il n’est pas perdu. On peut encore trouver des solutions pour que l’agro-industrie ne s’accapare pas de terres agricoles. En trouvant des candidats, rediviser la ferme, installer des gens, sur des ateliers diversifiés, production bovine, ovine… Des modèles à taille humaine qui fassent vivre de nombreux paysans sur les campagnes pour des campagnes vivantes.

Hugo Bourdain, membre de la confédération paysanne

 

Mais scinder les 600 hectares n’est pas du tout au programme du groupe T’Rhéa explique son chargé de mission développement des territoires, Pascal Nowak : "C’est pas le sens du projet Terres de Chavaignac. Par contre, notre volonté, c'est de transformer le maximum de salariés en associés. Je passe un appel aux jeunes qui veulent vivre cette aventure avec T’Rhéa.

L’enquêteur public a désormais un mois pour dépouiller les 11 187 contributions, contestations et soutien à cette exploitation XXL en Haute-Vienne.

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L'enquête publique désormais close, le 12 avril, la Confédération paysanne et Terre de liens organisaient une réunion publique avec les citoyens sur le projet de ferme de 3100 bovins à Peyrilhac et ses alentours. ©France 3 Limousin

 

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