Depuis 1977, Freddy Le Saux est, avec un petit groupe d'amis, à l'origine de l'aventure du château de Ligoure en Haute-Vienne. Un projet hors du commun de terres partagées. Qui pourrait tout simplement disparaitre.
1977, à 27 ans, avec un petit groupe d'amis, Freddy Le Saux rencontre Béatrice Thomas-Mouzon, la propriétaire du château de Ligoure sur la Commune du Vigen à deux pas de Limoges en Haute-Vienne.
" On lui a dit, nous on est une bande de jeunes, on n’a pas un rond, mais on a des bras et on sait travailler. On voudrait faire de ce lieu un lieu de rencontres. Elle nous dit « je ne vous dis pas non, mais on ne se connait pas, il faut qu’on apprenne à se connaitre ». Et c’est ce qu’on a fait. "
L'aventure commence, la propriétaire confie à ces jeunes la responsabilité d'un château en piteux état. Réparation des toitures, portes, fenêtres et pour peupler la grande bâtisse, accueil de groupes pour un prix modique.
"Les gens investissent le lieu, et très vite se sentent chez eux. Ils vont gérer l’intendance, ils font la vaisselle, le service, ils font le ménage en partant. C’est la règle. Si les gens nous disent « on va payer une femme de ménage », non, il n’y a pas de tâches secondaires pour nous, on n’a pas divisé le travail. Moi je faisais tout : laver les draps, monter sur le toit, la comptabilité, l’accueil des groupes. On fait tout ici. Comme un paysan dans sa ferme. Et donc les groupes aussi doivent jouer ce jeu, et ils le jouent."
Un lieu à vocation d'ouverture : danse, musique, peinture, cinéma, etc. En 1997, Ligoure accueille Patrice Chéreau pour son long-métrage Ceux qui m'aiment prendront le train. Le début d'une histoire d'amour entre le Limousin et le cinéma.
"Du fait que Chéreau soit venu, la région a créé le pôle cinéma, on a eu des téléfilms, des séries, comme Les Camarades, le Village Français, et puis beaucoup de courts métrages."
Des craintes pour l'avenir
Un château et un domaine : 250 hectares de terres agricoles. Des fermes, cochons, bovins, brebis, fromage, maraîchage et là aussi l'idée que la terre est un bien commun : "On a une agriculture nourricière ici, et aux portes de Limoges avoir une agriculture nourricière avec les temps qui vont arriver, je pense que c’est important de préserver ça. On va comprendre que la vraie richesse c’est ça, la terre, tout ce qu’on mange sort de là, ça ne sort pas des supermarchés, ça sort de là, donc il faut commencer par le produire. Il faut préserver la terre et puis bien l’entretenir."
Il faut revenir à une échelle humaine. Cette agriculture de production, d’exportation elle n’a plus d’avenir, elle est condamnée. Et notre régime alimentaire également, il va falloir le modifier.
Freddy Le Saux
Après le décès de Béatrice Thomas-Mouzon, la commune du Vigen a hérité des biens. Aujourd'hui, Freddy Le Saux craint le morcellement des terres. Il craint que la vocation collective du lieu ne soit plus respectée.
250 hectares de terres agricoles aux portes de Limoges qui font une agriculture nourricière, mais bien sûr que c’est l’avenir, qu’il faut le protéger. Ben non, ça va être disloqué. Béatrice avait retiré tout ça de la spéculation, ça va y retourner. S’il y a des gens qui trouvent que c’est bien, au moins qu’ils aient le courage de le dire.
Freddy Le Saux
A 72 ans, ce militant passionné a passé le relais mais vit toujours à Ligoure.
" La vraie richesse c’est la relation humaine, et de préserver notre foncier agricole, la terre. C’est ça qui est important. Et ici de la relation humaine on en a à la tonne. "
Freddy Le Saux espère bien que pour longtemps encore, perdure à Ligoure, ce bel esprit de solidarité.