À Limoges comme partout en France les internes en médecine se mobilisent pour dénoncer leur surcharge de travail. Des heures supplémentaires qui nuisent à leur formation, leur vie sociale et à la bonne prise en charge des patients.
48h. C’est en théorie le nombre d’heures de travail d’un interne en médecine sur une semaine. Dans les faits, la moyenne nationale avoisine les 58 heures selon l’InterSyndicale Nationale des Internes (INSI). Une moyenne qui cache des écarts sidérants. Alors pendant deux jours, soit 48h, les médecins de demain se mobilisent pour dénoncer une situation qui dure depuis trop longtemps.
Mais au CHU de Limoges, ce vendredi 18 juin, très peu de grévistes. Les internes limougeauds sont-ils préservés de cette problématique ? Loin de là. Ici comme dans beaucoup d’hôpitaux, se mettre en grève, c’est mettre en péril des équipes déjà surmenées.
Cyril est en deuxième année d’internat en neurochirurgie. Il a fait le choix de se mettre en grève, mais est quand même venu donner un coup de main à ses collègues ce matin.
Il travaille plus de 70h par semaine et ne s’estime pas être le plus mal loti. « Le week-end dernier, j’étais de garde. Je suis arrivé samedi matin à 9h. J’ai travaillé toute la journée puis j’ai passé la nuit à gérer des appels d’urgence puis une opération vers 5h du matin. J’ai fait nuit blanche. Et au matin, j’ai dû faire la visite du service jusqu’à 9h. »
Mal être et résignation
Une surcharge de travail qui nuit à la bonne santé des étudiants. Le stress du bipeur de garde, la fatigue des nuits de garde sans repos s’accumulent parfois dangereusement. Depuis le mois de janvier, 5 suicides ont été recensés chez les internes en France selon l’ISNI. Certains voudraient s’arrêter, mais comme pour la grève, ne pas venir au travail, c’est pénaliser toute une équipe.
Une collègue me disait « Je ne peux pas m’arrêter, car sinon je vais mettre mes co-internes dans la galère.»
Au CHU de Limoges, ils sont près de 280 internes. Depuis longtemps, ils sont un maillon essentiel dans la chaîne de l’hôpital. La surcharge horaire ne date pas d’hier. La plupart des médecins qui encadrent les internes sont passés par là. Un surmenage ancré dans les mœurs qui explique aussi la faible mobilisation selon Cyril.
Ça a toujours été comme ça. C’est presque ancré dans le fonctionnement de l’internat. Les internes en rêve, mais ils ne croient plus trop au changement.
De l’autre côté, ce sont les patients qui pâtissent de ce manque de repos. Dans certains services, explique Cyril, les internes accumulent du retard sur les démarches administratives. Une part conséquente de leur travail. « Certains ont plus de 70 comptes-rendus d’hospitalisation en retard. Rendez vous compte, c’est l’équivalent d’un service entier. Ils doivent faire ça sur leur temps personnel ».
Un temps personnel déjà très limité sur lequel ces étudiants doivent réviser comme ils le peuvent. D’autant que les périodes de formations à l’hôpital, prévues dans leur cursus, se font très rares, affirme un autre interne en cinquième année.
On ne peut pas faire les larbins de l’hôpital et en échange ne pas être formé correctement. On est censé être en formation. On n’est pas des médecins. Je ne trouve pas ça normal que ce temps ne soit pas respecté.
Avec la mise en place d’un réel décompte horaire, c’est là l’une des principales revendications de la mobilisation qui aura lieu ce samedi 19 juin à Paris. Cyril insiste sur ce point. « Nous ne voulons pas spécialement être payés mieux. Nous voulons surtout avoir de meilleures conditions de travail et de formation.» Ce samedi 19 juin, ils seront un petit groupe à monter sur Paris faire entendre le cri d’alerte des internes limougeauds.