Manque de budget, pénurie de bénévoles et inflation : face à ces difficultés, les Restos du Cœur pourraient restreindre le nombre de bénéficiaires. En Haute-Vienne, l'association s'alarme et organise une collecte exceptionnelle.
C'est un crève-cœur pour les Restos. "Aujourd'hui, nous ne sommes pas suffisamment solides pour absorber le flux de personnes qui ont besoin d'aide alimentaire", explique le président de l'association, Patrice Douret. En proie à de graves soucis financiers, celle-ci s'apprête à éconduire plus de 150 000 bénéficiaires à l'échelle nationale. Du manque de fonds à l'inflation, en passant par l'absence de bénévoles, les soucis s'accumulent pour l'ensemble du réseau. La Haute-Vienne s'avère particulièrement concernée.
30% de demandes en plus
Premier problème : la hausse massive des demandes d'aide alimentaire. "On est à 30% d'augmentation de personnes accueillies en un an", détaille Catherine Billoire, secrétaire départementale de l'association. Cette tendance inscrit précisément la Haute-Vienne dans la moyenne nationale. "Nous avons beaucoup de personnes retraitées, plus qu'auparavant, poursuit-elle. Des personnes seules, des familles monoparentales, des mamans avec leurs enfants, et aussi beaucoup de jeunes étudiants."
Pour l'association créée en 1985 par Coluche, l'inflation constitue un cercle vicieux. La hausse des prix génère un plus grand nombre de bénéficiaires, mais elle implique surtout un coût direct pour les Restos du Cœur, qui achètent plus du tiers de ce qu'ils distribuent gratuitement. "Nous avons des difficultés d'approvisionnement avec le tarif des marchandises qui a fortement augmenté, ainsi que celui de l'énergie, pour tout ce qui relève du transport", relate Catherine Billoire.
Des aides exceptionnelles... mais sans doute insuffisantes
Les dirigeants estiment que trente-cinq millions d'euros manquent aujourd'hui à l'association pour terminer l'exercice à l'équilibre. "Si rien n’est fait, on pourrait devoir fermer d'ici à trois ans", alertent-ils. La ministre des Solidarités, Aurore Bergé, a d'ores et déjà promis une aide exceptionnelle s'élevant à quinze millions d'euros, rapporte Yves Mérillon, porte-parole des Restos. Donc la vraie augmentation, c'est cinq millions." Une bonne nouvelle a néanmoins affleuré, ce lundi 4 septembre, avec l'annonce par Bernard Arnault d'un don solidaire de dix millions d'euros : le multimilliardaire, propriétaire du groupe LVMH, a déclaré répondre à l'appel de l'association par une "contribution d'urgence".
Un souci plus structurel demeure : la pénurie de bénévoles. De moins en moins de gens s'engagent, ajoutant une crise à la crise, notamment en Haute-Vienne. "Nous sommes un département avec un manque de bénévoles par rapport aux territoires similaires, déplore Catherine Billoire. Nous sommes quatre cents à peu près, et il manque environ deux cents personnes." Pour affronter l'automne et l'hiver, une collecte exceptionnelle sera organisée le 7 octobre "dans les supermarchés".
Les Restos du Cœur assurent 35% de l'aide alimentaire en France. D'autres organisations rencontrent des difficultés similaires : en un an, l'Armée du Salut a vu ses demandes doubler ; quant à celles du Secours populaire, elles ont augmenté de 40%.