Un couvre-feu envisagé pour les mineurs de moins de 13 ans cet été à Limoges : pourquoi la démarche est complexe

La délinquance des mineurs est revenue, une nouvelle fois, à la une de l'actualité, à la suite de quelques faits divers. À l'image de Béziers ou Nice, la ville de Limoges travaille à la mise en œuvre d'un arrêté municipal de couvre-feu pour les mineurs de moins de 13 ans, entre le 15 juin et le 15 septembre. Un choix qui suscite déjà des réactions.

Si le principe politique est acté, le projet d’arrêté municipal de couvre-feu pour les mineurs de moins de treize ans est, en ce moment, examiné par les juristes de la mairie de Limoges.

Pourquoi treize ans ?

Ces arrêtés s'appuient sur l'article L11-1 du Code pénal qui établit les principaux principes du droit des mineurs. Le texte stipule que "les mineurs de moins de 13 ans sont présumés ne pas être capables de discernement".  L'arrêté devra ensuite être validé par la préfecture. Mais déjà, l’accueil dans les rues de Limoges est plutôt positif : "Je suis tout à fait pour, ça fera moins de délinquance, moins de bazar, moins d'agressions aussi et plus de sécurité pour les parents. À minuit, les enfants de moins de 15 ans n'ont rien à faire dehors".

"C'est pas mal, répond un autre passant à notre équipe. Il faut prendre des mesures pour que ça ne traîne pas le soir et que ça ne fasse pas n'importe quoi. Ce n’est peut-être pas forcément le cas à Limoges, mais quand même, je suis pour." 

"Y en a toute l'année des mineurs de moins de treize ans dehors. C'est devenu une catastrophe en cinq ou six ans ici. Les gens qui viennent ne respectent plus rien, ni la loi, ni le voisinage. Le soir, je ne sais pas ce qu'ils font, s'ils s'alcoolisent ou quoi, mais ça devient infernal dans le coin". 

"Moi, je travaille de nuit, mais quand je suis absente, c'est leur père qui garde mes enfants. C'est très bien qu'ils ne soient pas dans la rue à leur âge, ils doivent être accompagnés par leurs parents". 

Les Limougeauds croisés aujourd'hui devant le centre commercial Corgnac sont quasi unanimes. La mesure envisagée par le maire de Limoges semble faire consensus. Pour autant, est-elle justifiée ? 

Pourquoi cette mesure à Limoges ?

Il y a quelques semaines, le maire de Limoges a écrit au ministre de l’Intérieur, pour s’inquiéter du manque de policiers dans sa ville lors des Jeux olympiques de Paris.

On se souvient des émeutes de l’été 2023. Après ces dernières, 53 personnes ont été poursuivies à Limoges, dont seulement 16 mineurs.

"Déjà, je l'apprends. C'est bien, quand on est au conseil municipal, d'apprendre les choses comme ça, par hasard, s'indigne Thierry Miguel, conseiller municipal d'opposition (PS) à la mairie de Limoges,  Nous, on veut bien lutter contre la délinquance, mais là, on a l'impression d'une fuite en avant, vers Robert Ménard, vers toute cette extrême droite, et ça, c'est franchement intolérable. On est dans l'affichage. Il faut arrêter, il faut du travail sérieux sur le long terme. Est-ce que localement l'insécurité est assez forte pour promouvoir ce genre de mesure ? Je ne pense pas. Il faut faire de la prévention en ce qui concerne les mineurs, on n'est plus au XIXe siècle". 

Un couvre-feu pour les mineurs porterait atteinte à une liberté fondamentale, celle d’aller et venir. Or, seulement 13% des faits de délinquance sont dus à des mineurs à Limoges. Et ces chiffres sont stables depuis 2022.

"Il y a des circonstances de faits qui doivent montrer qu'il y a des menaces à l'ordre public dues à une délinquance juvénile. Des faits précis puisque l'arrêté doit détailler les motifs sur lesquels il se fonde pour restreindre cette liberté. Et l'arrêté doit être limité dans le temps et dans l'espace, estime Maître Anne Monpion, avocate spécialisée en droit administratif. Comme les chiffres apparaissent assez faibles, l'arrêté pourrait être considéré comme non justifié. Après, il peut concerner un espace géographique restreint, en l'espèce des quartiers à difficultés. Et si des chiffres démontrent que dans tel quartier, il y a une délinquance juvénile un peu plus élevée, et bien là, l'arrêté pourrait être justifié." 

Voilà pourquoi les juristes de la mairie examinent à la loupe ce projet d’arrêté, pour qu’il ne soit pas invalidé par la justice. À Nice, où ce type de couvre-feu a déjà été institué en 2009, les mineurs contrôlés lors du couvre-feu font, dans un premier temps, l'objet d'un raccompagnement chez eux. En cas de récidive, une amende peut être infligée et un signalement pour délaissement d'enfant adressé au procureur de la République. 

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En interview : des habitants de Limoges, Thierry Miguel, conseiller municipal d'opposition PS et Maître Anne Monpion, avocate spécialisée en droit administratif. ©France Télévisions

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