L'affaire a fait couler beaucoup d'encre. Depuis le 22 février dernier, la presse régionale et les politiques jonglent avec les millions de l'ancienne région Poitou-Charentes. Retour sur sept semaines de polémiques.
Tout a commencé par deux interviews publiées dans les colonnes de Sud-Ouest et de La Nouvelle République. Le 22 février dernier, Alain Rousset fait une incroyable révélation. L'ex-Poitou-Charentes a charrié avec elle 132 millions d'euros d'impayés, "62 millions en investissement et 70 millions en fonctionnement".
Jean-François Macaire, vice-président chargé des finances, le reconnaît : voilà plusieurs années que la région qu'il préside tarde à régler ses factures. Sauf qu'en 2015, le budget doit être clôt plus tôt que d'habitude en raison de la fusion des régions Aquitaine, Limousin et Poitou-Charentes. Le paiement des factures s'arrête brutalement. Pour la fédération du bâtiment de la Vienne, c'en est trop. Plusieurs de ses adhérents risquent la banqueroute à cause de ces créances en souffrance : ils alertent Alain Rousset.
Dès les premiers éléments de l'affaire dévoilés, le président de l'ALPC vise la politique menée dans l'ex-région Poitou-Charentes, une collectivité qui "manifestait beaucoup de volontarisme et avait sans doute les yeux plus gros que le ventre par rapport aux capacités de financement".
Pour autant, Alain Rousset l'assure : le règlement des factures est l'affaire de "deux ou trois semaines, sans poser le moindre souci de trésorerie". Mais un mois plus tard, 20 millions d'euros restaient à payer.
Très affecté par la façon dont l'affaire a éclaté, Jean-François Macaire ne résiste pas à ces révélations : l'ex-président de la région Poitou-Charentes rend sa délégation aux finances dès le début du mois de mars, sans pour autant démissionner de son poste de vice-président. Quelques temps plus tard, il renonce même à ses indemnités de vice-président.
Des emprunts supposés toxiques
Autre révélation qui paraît plus gênante encore : l'ex-région aurait contracté plus d'une centaine de millions d'euros d'emprunts toxiques. Ces prêts sont en partie adossés à des produits financiers que les établissements financiers n’ont même plus le droit de vendre aux collectivités françaises depuis 2011.400 millions, 500 millions, 1 millard ? Depuis ces révélations, le montant de cet endettement et la part d'emprunt toxique ont été tout l'enjeu de la bataille politique engagée entre pro et anti-Royal.
"La chambre régionale des comptes a émis un rapport en 2013, qui a été communiqué en mars 2014, dans lequel elle alertait déjà sur des emprunts toxiques, des emprunts à haut niveau de risque pour la région Poitou Charentes. Et là, c'était déjà 250 millions d'euros", estime par exemple Virginie Calmels, le 1er avril.
Le stock de la dette est de 450 M d'euros dont 150 M d'emprunts toxiques, sans compter le crédit-bail de 360 M d'euros"
Olivier Chartier (01/04)
Alain Rousset attaque également et parle de l'"omerta" qui, selon lui, régnait dans les services du budget de l'ancienne région Poitou-Charentes. Le président de l'ALPC justifie ainsi le fait d'avoir remplacé la direction générale des services de l'ancienne collectivité : il lui aurait fallu envoyer des hommes de confiance pour obtenir un accès aux dossiers financiers du Poitou-Charentes.
Le président de la nouvelle région et Ségolène Royal ne s'apprécient pas vraiment, ce n'est un secret pour personne. Plus étonnant cependant, des ex-soutiens de la ministre de l'Ecologie la prennent pour cible.
Cyril Cibert, par exemple, est allé jusqu'à menacer de porter plainte pour "abus de confiance". Pour le conseillier régional PS, "les documents qui nous étaient présentés n'étaient pas sincères".
La riposte de Ségolène Royal
Depuis le début, l'ancienne présidente de la région ne décolère pas. Elle avait fait du Poitou-Charentes la vitrine de sa carrière politique. Il n'a donc pas fallu longtemps avant que Ségolène Royal ne réagisse.C’est lamentable, c’est un règlement de compte… C’est porter atteinte à la réputation de Poitou- Charentes et de ses entreprises !"
Ségolène Royal (22/02)
Toute la question est de savoir comment va réagir Ségolène Royal à la présentation de l'audit réalisé par Ernst&Young. Le cabinet juge alarmante la situation financière de la région Poitou-Charentes au regard de ses comptes entre 2013 et 2015. Ségolène Royal est donc en partie concernée par les révélations du cabinet d'audit.