Le cauchemar vécu par plus de 2000 voyageurs de retour de vacances dimanche 30 août est la conséquence "de la somme des sous-investissements dans le Sud-Ouest" assure Renaud Lagrave, le vice-président de la Région en charge des transports. La fédération des usagers est du même avis.
Le rétablissement total du trafic devrait être effectif mercredi matin 2 septembre selon le directeur général SNCF-Voyageurs Christophe Fanichet. Ce mardi 1er septembre, après les efforts de 200 agents déployés nuit et jour pour réparer les dégâts, les lignes nationales TGV et Intercités ont pu circuler normalement. Seules les liaisons régionales restaient perturbées avec 2 TER sur 3 entre Bordeaux et Hendaye, 1 sur 2 entre Dax et Pau et la mise en place de cars de substitution entre Bayonne et Pau.
"Nous avons fait du mieux que nous pouvions" affirme Christophe Fanichet qui présente ses excuses "aux voyageurs ayant dû faire face à une situation très très éprouvante" comme en témoignent de nombreux passagers dans notre article résumant les faits. Plusieurs centaines sont arrivées à Paris avec 24 heures de retard. Ils déplorent un manque d'information criant.
L'information voyageurs inefficace et contradictoire
On leur a dit tout et n'importe quoi. Il n'y avait pas la même info d'une gare à l'autre, d'un tweet à un mail. C'est insupportable.
Il insiste sur l'urgence qu'il y a à "unifier les cellules de crise". "S'ils savaient que c'était le caténaire, tout le monde sait que c'est un problème qui va durer au moins 48 heures. Pourquoi les passagers n'ont-ils pas été évacués plus tôt ?" s'insurge t-il.
"Les clients ont été très mal traités" dénonce également Christian Broucaret, à la tête de la fédération régionale des usagers des transports, qui a lui aussi pu constater que les infos voyageurs étaient quasi inexistantes. "Il y a vraiment des efforts à faire à ce niveau là, j'espère que cette série d'incidents va déclencher quelque chose".
La direction de la SNCF botte en touche. "Nous ne pouvions pas prévoir cette situation exceptionnelle. Nous avons distribué des milliers de paniers-repas, des bouteilles d'eau. Pas à pas, on a essayé de renseigner nos voyageurs, mais on peut toujours faire mieux j'en suis bien conscient" répond Christophe Fanichet, présent ce mardi à Bordeaux.
Des voies beaucoup trop anciennes, peu adaptées au trafic actuel
Ce cafouillage, à la veille de la rentrée, avec des trains bondés, était-il prévisible ? En tous cas, selon le représentant des usagers de Nouvelle-Aquitaine, "ce qui s'est passé n'est pas très étonnant".Renaud Lagrave non plus n'est pas surpris. "Le sud de Bordeaux est très fragile au niveau technique, dès qu'il y a le moindre problème, les conséquences peuvent être très lourdes. On alerte depuis des années sur le sous investissement dans la région. Il est flagrant" se désole-t-il.
L'élu dénonce une modernisation au ralenti.
"Le dernier plan régional d'investissement n'a été effectué qu'à moins de 50%" assure t-il, martelant que l'entreprise de transport public va devoir afficher ses priorités et concentrer les moyens. " Ça fait des années qu'on réclame un plan de rattrapage en Nouvelle-Aquitaine et que l'on n'est pas entendu".Les budgets sont là mais SNCF Réseaux n'a plus les moyens ni humains ni techniques d'assumer les travaux. Ils nous disent qu'ils ne peuvent pas tenir le rythme. Les enveloppes budgétaires sont votées mais les travaux n'ont pas lieu.
La création d'une deuxième ligne en question
Tracer une voie spéciale pour la LGV vers l'Espagne et vers Toulouse permettrait de placer Paris à moins de trois heures de toutes villes du sud-ouest. Mais le projet, qui a suscité une forte contestation de la part d'élus locaux et de défenseurs de l'environnement, n'est plus à l'ordre du jour.Pour le Conseil Régional, comme pour les représentants des usagers, cette nouvelle voie "est absolument nécessaire". Renaud Lagrave espère qu'elle sera construite dans le cadre du prochain plan de relance du gouvernement. "On ne peut plus faire passer de trains supplémentaires sur la ligne Bordeaux - Hendaye, saturée, alors qu'on veut développer le frêt et réduire la part de l'aérien. Et puis, il y a une forte demande de l'Europe sur cette ligne Nord - Sud qui pourrait relier Londres et Bruxelles à Madrid. On aura 30 à 40% de fonds européens" assure le vice -président aux transports.
Créer une deuxième ligne permettrait aussi d'avoir une sorte d'itinéraire bis en cas d'incident explique pour sa part Christian Broucaret. "Là, il n'y a qu'une voie, quand il y en a deux, cela donne une solution de secours pour que les trains bloqués puissent passer ailleurs".
Autre argument : les passages à niveau. "Plus il y a de trains, plus le trafic voiture est ralenti aux barrières alors que sur une voie nouvelle, il n'y a plus de passages à niveau. Actuellement dans le BAB (Bayonne-Anglet-Biarritz), les barrières se baissent toutes les 30 minutes, si un train passe tous les quarts d'heures, ça va devenir compliqué".
La solution, pour lui, serait de faire "un grand contournement ferroviaire du BAB pour une liaison France -Espagne sans passer par Bayonne".
Il pointe du doigt l'incohérence de faire rouler des TGV sur une ligne "qui date". "Le tronçon Dax - Bayonne est à bout de force et on veut y faire rouler de plus en plus de trains voyageur et de frêt. Ce n'est pas possible". Il fait la comparaison avec les voitures pour lesquelles "on a créé des autoroutes en plus des nationales napoléonniennes. On ne fait pas rouler des Ferrari sur des routes de campagne".
Mais, pour l'heure, l'accent doit être mis sur la maintenance et la prévention soutient le représentant de la FNAUT. "Il faut mettre plus de monde sur les voies pour entretenir les installations électriques notamment" dit-il. Il donne comme exemple le problème semble-t-il récurrent des poulies servant à tendre le caténaires. "Elles peuvent se coincer faute d'avoir été graissées. Et cela peut causer pas mal de retards..."
Le directeur général de SNCF-Voyageurs, Christophe Fanichet, a déclaré que c'est en effet "une série d'incidents sur l'alimentation électrique" qui serait en cause ici. Sans expliquer ce qui les a provoqués. "Nos équipes sont en train d'enquêter. Les premiers résultats seront connus en milieu de semaine" a t-il assuré.