La Garonne était montée à 10,20 mètres, créant d'importants dégâts. Un an après, quels travaux ont-ils été effectués ? Et quelles leçons ont été tirées de cette crue atypique ?
" Là ici, il y a un an il n’y avait plus rien" montre du bout du doigt Florent Craipeau. "La digue sur 200 mètres a été entièrement arrachée. On avait un cratère jusqu’à la nappe phréatique et du coup on avait l’eau de la Garonne au fond."
Depuis la digue a été reconstruite. C’est certainement le plus gros chantier réalisé parmi l’ensemble des travaux.
Car la crue survenue il y a un an a entraîné des dégâts considérables.
Et derrière, ce sont plus de cinq millions d’euros qu’il a fallu investir pour reconstruire ce qui avait été démoli. L’année dernière, la Garonne est montée à 10 mètres 20 et a ravagé plus de 4 kilomètres de digues.
Depuis quelles leçons ont été tirées ? Pourquoi la crue s’est faite en deux temps ? Les prévisions météorologiques étaient-elles adaptées ? Les élus et technicien du Gemapi font le point.
« Un chantier colossal »
Après cette crue historique, 50 chantiers ont été identifiés et autant de sites sur lesquels il a fallu intervenir. « Je rappelle que pour nous, les digues c’est 90 kilomètres », rappelle Jacques Bilirit, le président de Val de Garonne Agglomération.
"Et il y a eu à peu près 4,2 km d’intervention (…). Le budget d’investissement derrière, c’est un peu plus de 5,2 millions d’euros pour la reconstruction des digues. Et ici, sur cette digue en particulier, c’est un peu plus d’un million d’euro. C’est un chantier colossal".
Jamais au niveau de l’agglomération on avait eu un chantier aussi important sur les digues.
Jacques Bilirit, pdt agglomération Val de GaronneFrance 3 Aquitaine
Des travaux impossibles à réaliser durant l’hiver et même l’automne où de nouvelles crues sont à craindre. Il a donc fallu trancher. ""Et le pari que nous avons pris, c’était d’intervenir très rapidement ", poursuit Jacques Bilirit.
"Heureusement qu’on a fait ce pari-là. On a fini nos chantiers globalement fin septembre, voire début octobre. Et on voit bien avec la crue de janvier de cette année qu’heureusement qu’on était intervenu".
Un peu plus loin à La Réole dans le Sud Gironde, c’est un autre pari qui a été fait. Résultat il y a deux semaines, le maire de la commune a eu très peur que les digues provisoirement colmatées en attendant des travaux définitifs de consolidation lâchent.
Réparer les digues plutôt que d’en construire de nouvelles
A Senestis, la digue dont nous parle Florent Craipeau a été particulièrement touchée. Elle a rompu sur plusieurs centaines de mètres. "Il a d’abord fallu gérer la reconstitution du sol sous terre", explique chef de service Gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations (GEMAPI).
"La Garonne était à nu. Il a fallu mettre en place des pompages et reconstituer le fond du lit de la Garonne avec des cailloux, et là-dessus on a mis de l’argile compactée avec des techniques règlementées (…) et des normes qui permettent une résistance très importante. Et qui peut résister du coup aux crues jusqu’au niveau de surverse".
"Après, il y a eu des zones où il y a eu des ruptures et où il a fallu tout reconstruire", poursuit le responsable de la GEMAPI. "Et puis il y a eu des secteurs où on a fait des demi-digues. Après on a aussi réensemencé. Il a fallu remettre de l’herbe (…). Et localement on a eu quelques ouvrages en béton, des clapets et des ouvrages hydrauliques à refaire mais cela était plutôt accessoire ».
Pourquoi ne pas avoir construit de nouvelles digues ? « La règlementation a changé et reconstruire de nouvelles digues est très complexe. Donc nous, l’objectif est de pouvoir conserver les digues qu’on a actuellement », conclue Florent Craipeau.
Analyser le phénomène de crue en deux temps
A la mi-janvier, la crue s’est faite classiquement, c’est-à-dire progressivement. Or, celle observée il y a un an ne ressemblait à aucune autre.
La montée des eaux s’est faite en deux temps et c’est ce qui a surpris tout le monde, en premier lieu les élus.
La crue s’est faite en deux temps, avec une deuxième phase assez rapide qui a surpris bon nombre d’habitants. Sur le terrain tout le monde s’est interrogé. " Il aurait fallu comprendre pourquoi cette montée en deux temps de la Garonne", dit aujourd’hui Joël Hocquelet le maire de Marmande.
Les plus anciens nous ont dit qu’ils n’avaient jamais vu cela et qu’ils ne comprenaient pas".
Le maire de Marmande
"J’avais donc écrit au Premier Ministre", poursuit le maire. "Pour avoir une mission d’information et savoir ce qu’il s’était passé à Marmande mais aussi sur l’ensemble du bassin de la Garonne. On n’a pas donné suite. C’est dommage. Parce que je crois qu’il faut comprendre le mécanisme de cette crue ».
Crues : affiner les prévisions
Il y a un an à Marmande, l’eau est montée à 10,20m. « On nous avait donné à l’époque entre 8,50 et 9,20m », raconte le maire.
Les prévisions étaient donc fausses. Mais elles donnaient aussi une fourchette assez large. Trop large aux yeux du maire. "Soixante-dix centimètres, c’est énorme", dit-il.
"Pour les habitants de Coussan jusqu’à 8,50m, ils sont isolés. Au-delà, ils sont inondés et alors il faut évacuer des personnes. Ce n’est donc pas la même stratégie qu’on met en place. Pour nous, qui devons une assistance à la population, cela a une importance capitale. Alors bien sûr, on ne peut pas faire des prévisions à 10 cm près".
Mais la fourchette de 70 cm était trop grande, comme l’ont dit beaucoup de maires à l’Etat. Il faut à tout prix resserrer les prévisions.
Le maire de Marmande
Le mois dernier, le maire de La Réole s’est lui aussi plaint des mauvaises prévisions réalisées par Vigicrues. Il a poussé un véritable coup de gueule allant jusqu’à parler "d’incompétence".