Les températures négatives annoncées jusqu'au mardi 5 avril risquent de brûler les bourgeons et premières feuilles apparues dans les cultures. Face à la menace, devenue récurrente depuis 5 ans, des solutions sont mises en oeuvre d'ores et déjà en Dordogne, Lot-et-Garonne.
Après 2017, 2019 et 2021, le printemps 2022 sera t-il une menace pour les raisins, prunes ou kiwis cultivés dans la région ?
La question se pose de nouveau avec l'annonce des premières gelées printanières. Les températures pourraient descendre de plusieurs degrés, par endroit, ces prochaines nuits.
Le cauchemar recommence
Pour les viticulteurs et arboriculteurs, le cauchemar recommence.
"Ce sont des épisodes qui se répètent" confirme Guillaume Barou, viticulteur bergeracois à la tête de la cave coopérative de Monbazillac. "L'an dernier, on a eu une perte de 20% à peu près sur l'appellation. En 2017, la pire année, c'était entre 30 et jusqu'à 60% pour certains d'entre nous".
Le redoux de la semaine dernière a fait sortir les bourgeons. Sur certains pieds, les feuilles sont même déjà apparues.
"Les bourgeons peuvent tenir à - 1 degrés mais si on approche les - 2 et au delà ils risquent de sécher et tomber" explique Guillaume Barou.
Il faut savoir que dans un bourgeon, on a entre une et trois grappes de raisins, donc chaque bourgeon qui grille, c'est des pertes de récolte conséquentes.
Guillaume Barou - viticulteur en Dordognesource : France 3 Aquitaine
Branle-bas de combat
Pas de remèdes miracles face à ces gels printaniers, mais de plus en plus de parades techniques sont mises en oeuvre.
Dans le Monbazillac, dans le sud de la Dordogne, les viticulteurs ont acheté des tours à vent, en commun et financées sur 15 ans avec l'aide de la Région et du département notamment.
A 55 000 euros la tour, ils n'avaient pas le choix d'autant qu'ils en ont installées une vingtaine sur leurs parcelles l'an dernier et espèrent encore en acheter une quarantaine en 2022.
"Elles permettent de protéger 4 à 6 hectares chacune. L'an dernier, elles ont été efficaces avec des températures qui sont descendues jusqu'à moins 5" affirme le président de la cave. "On a pu sauver des parcelles".
Les engins fonctionnent au gaz ou au diesel. "Le principe est d'assécher au maximum le végétal pour éviter la formation d'eau sur les zones fructifères. L'hélice est inclinée pour rabattre l'air chaud sur la végétation en contrebas" explique l'installateur du dispositif Mourad Farhi. "Mais c'est simplement de l'air brassé, il n'y a pas de chauffage".
Un "igloo" sur les kiwis
Un peu plus au sud, à Nérac, en Lot-et-Garonne, Pascal Courtade a lui opté pour l'arrosage. Il produit des kiwis et a remarqué au fil des années que certaines zones sont plus exposées aux risques.
"On se demandait pourquoi ça poussait pas ici. On s'est aperçu que les plants avaient tout le temps froid, c'est une zone gélifère".
C'est donc plus particulièrement à ces endroits que l'arboriculteur doit protéger ses plants. Aujourd'hui, il est sur le qui-vive. "Regardez la petite boule, là, qu'on voit, ça va faire un kiwi, il faut protéger ça. A - 0,5 degré, c'est grillé".
Le problème, c'est que le fruit ne sort qu'une fois. S'il gèle, il ne sort plus. L'arbre ne mourra pas mais il ne donnera plus que des feuilles, plus de fruits.
Pascal Courtade, producteur de kiwissource : France 3 Aquitaine
Le kiwiculteur vient de mettre en place une sonde qui doit l'avertir des chutes de température avec une grande précision. A 0,5 degrés, il enclenchera l'arrosage.
Ce qu'il se passe, c'est que l'eau projetée s'égouttera sur le bourgeon puis se transformera en glace. Ca va créer un igloo autour qui va le protéger à l'intérieur. C'est comme un igloo au pôle nord, on a toujours moins froid dedans que dehors.
Pascal Courtadesource : France 3 Aquitaine
Il redoute des froids à moins 2 et jusqu'à moins 4 degrés sur les zones les plus exposées durant les cinq prochaines nuits. "Le pire, ce sera dimanche et lundi matin. Il faudra lancer l'eau sinon c'est mort. On sera là toutes les nuits jusqu'à mardi".
L'an dernier, le producteur lot-et-garonnais a vu 70% de ses fruits détruits par le gel.
Voici le reportage de P. Niccolaï et A. Thibault en Dordogne >