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VIDEO. Le Mémorial de Saint-Pée raconte une autre histoire du peuple basque

En 878 Roland ne fut pas défait à Roncevaux par les Maures mais par les Vascons. Et Guernica ne fut pas brulée par les républicains comme l’affirmait l’Histoire officielle franquiste, mais bombardée par l’aviation allemande à la demande de Franco.

Qui donc écrit l’Histoire ? Longtemps, les chroniqueurs des puissants et les vainqueurs. Mais le travail patient et scientifique des historiens rétablit les choses. Le mémorial de Saint-Pée-sur-Nivelle récemment inauguré relève de cette démarche, retraçant de - 40 000 ans aux années 2000 l’Histoire du Pays basque en 22 thématiques.

Les invités :

Les responsables d’Anai Artea :

Jean Fagoaga, Bixente Garcia, Andoni Iturrioz, Battitta Larzabal, Mixel Mendiburu.

Créer ce centre d’interprétation de l’Histoire du peuple basque était nécessaire à leurs yeux et à ceux de leurs amis du collectif Anai Artea. Comme Andoni Iturrioz le rappelle souvent : « l’Histoire n’est écrite par les vaincus, ou les peuples non reconnus. Ils ont voulu laisser une trace, d’où ce lieu de mémoire et d’Histoire. Pour ce faire, ils proposent 22 thématiques ou événements pour saisir l’histoire d’un des plus vieux peuple d’Europe.

On s’est rendu compte que les gens ne connaissaient pas leur histoire. On ne leur avait pas vraiment enseignée non plus.

Andoni Iturrioz

Le projet fut présenté à Jean-Louis Davant, académicien de la langue basque et historien ainsi qu’au sociologue Eguzki Urteaga. Convaincus de l’intérêt de la démarche, ils ont encouragé et soutenu Ania Artea et proposé spontanément douze thèmes incontournables. Le collectif s’est alors tourné vers 12 universitaires qui ont planché sur le projet de mémorial. Travail scientifique, rigoureux de chercheurs et enseignants à l’Université de Pau et des Pays de l’Adour, de Bordeaux et de l’Université du Pays basque. Ils ont défini entre tous 22 thèmes sur lesquels ils ont travaillé et dont l’historien Peio Etcheverry-Ainchart a fait la synthèse.  

Le mémorial propose un parcours historique qui débuté à - 40 000 ans jusqu’aux Accords de Lizarra - Garazi (Estella- Saint Jean-Pied-de-Port). Plusieurs chapitres sont consacrés à la Navarre : Les princes de Vasconie, Roncevaux, Sanche le Grand, le for (fuero) général de Navarre, cet ensemble de lois et mesures qui garantissait une autonomie certaine à la province, la chute du château d’Amaiur, dernier bastion de résistance du royaume de Navarre face à celui de Castille, le carlisme (même s’il fut puissant aussi en Biscaye, Guipúzcoa et Alava).

La Navarre tient une place très importante au sein du mémorial car elle a marqué l’histoire du Pays basque. Le royaume de Navarre avait autorité sur les sept provinces basques sur un territoire qui allait bien au-delà du Pays basque actuel.

Battitt Larzabal

Autre élément clé pour comprendre le Pays basque d’aujourd’hui : la naissance du nationalisme moderne à la fin du XIXème siècle, avec le Parti nationaliste basque, puis dans les années 70, celle de la gauche indépendantiste. Le bombardement de Gernika pendant la guerre d’Espagne. Les accords de Lizarra Garazi en 1998 - 1999,  lorsque toutes les composantes de la famille nationalistes, la plupart des syndicats et des formations de gauche Abertzale s’unirent pour définir une feuille de route menant à la paix au Pays basque. Depuis l’autodissolution d’ETA en 2018, de nouvelles perspectives sont apparues. Anai Artea pense que les générations futures devront et pourront écrire la suite de cette Histoire. Un peu comme un livre qu’il faut savoir finir. D’autres enrichiront le mémorial en écrivant de nouveaux chapitres 

Ce n’est qu’un début. Ce travail se poursuivra dans le futur. Il faut vivre ce lieu et l’enrichir de nouveaux apports historiques au fil du temps.  

Bixente Garcia

Trois acteurs de la compagnie “Eguzkilore” installée au centre Larraldea ont prêté leurs voix pour donner vie aux textes ainsi enregistrés, à  Jauzarrea en Navarre, siège de la Fondation éponyme du photographe Xabi Otero, qui diffuse la culture basque et préserve son patrimoine. Outre ces 22 vidéos, le public a accès à « L’Histoire des Basques racontée par les enfants de Behorlegi », ainsi qu’aux vidéos de la Fondation Jauzarrea qui a fait appel à des spécialistes internationaux en anthropologie, linguistiques, histoire etc. sur d’autres thèmes.

Ce projet est celui d’Anai Artea avec le soutien d’Udalbiltza, assemblée de mairies des sept provinces. Anai Artea fut fondée dans les années 60, par Telesforo de Monzon, ministre de l’Intérieur du gouvernement basque en exil et le prêtre et ancien résistant Piarres Larzabal. L’association se dédia à l’accueil des réfugiés basques. Jean Fagoaga, ancien maire de Sare et médecin renommé de Saint jean-de-Luz nous explique le rôle de l’association qu’il présida en alternance avec Mixel Mendiburu après le retour de Telesforo de Monzon en Pays basque sud après la mort de Franco et au moment de la transition démocratique. Une démarche et un engagement humanistes souligne-t-il. 

 

Iñaki Iriarte, sculpteur et joueur de txalaparta.

Ce jeune artiste de Sare a voulu rendre hommage à Anai Artea (entre frères) à travers cette œuvre. Pour ce faire il a travaillé la pierre de Sare, qu’il a dressée, afin de représenter deux frères qui se donnent l’accolade. Avant de donner le premier coup de burin dans la pierre, il nous dit avoir tenu à étudier l’histoire de l’association pour mieux s’imprégner de ce qu’elle fut. Il a sculpté le haut de sa pièce tel un phare, car pour Iñaki, Anai Artea fut aux réfugiés ce qu’un phare est aux marins pêcheurs. La sculpture est pensée comme un trésor, selon la scénographie du projet d’Anai Artea.  

Le trésor, c’est notre langue, l’euskara. Le nerf de notre combat.

Iñaki Iriarte   

Christian Courtois, joueur de txalaparta. 

Le jour de l’inauguration, Christian et Iñaki ont interprété une pièce pour txalaparta en trois mouvements : Tobera pour commencer, réplique en métal de la txalaparta dont le son fait écho à celui des cloches d’une église. Puis Kilikoketa, rappelant les sons des bois qui frappent les pommes pour les presser et en extraire le jus (c’est en fait là l’origine sûrement de la txalaparta). Enfin txakun, le son et le rythme traditionnel de la txalaparta. Cadeau des deux jeunes musiciens : ils jouent pour vous cette pièce !

 

Le lieu :

Le Mémorial du peuple basque est situé au quartier Ibarrun de Saint-Pée-sur-Nivelle, impasse Zubiondoa. Juste à  la jonction entre la Vieille route de St Pée et celle qui relie St Jean de Luz- Ascain à la commune labourdine. Il a été inauguré le 27 mai 2023. De nombreuses personnes des deux côtés des Pyrénées  y ont assisté d’horizons politiques très différents, comme les élus présents, dont deux anciens maires et le maire actuel de Saint Pée, le président Renaissance de la Communauté d’Agglomération du Pays basque. Une sorte de reconnaissance du travail d’Anai Artea.

Ce jour-là, Erramun Martikorena et des musiciens interprétèrent entre autres le Gernikako arbola, l’Arbre de Gernika et deux jeunes du groupe Zirikolatz de Saint Pée-sur-Nivelle dansèrent l’Aurresku d’honneur devant la sculpture d’Iñaki Iriarte, accompagné du txistulari du de la formation.

Le lieu a été conçu par un architecte qui a voulu créer comme une forêt d’aulnes qui protègeront et entoureront la sculpture d’Iñaki Iriarte, présentée comme un trésor caché à cet endroit. Un rejeton du chêne de Gernika a également été planté. Cet endroit appelle à la réflexion et au souvenir.

Et pour avoir accès aux 22 thématiques il suffit d’utiliser son portable et de se connecter  en utilisant des QR codes. Simple et pratique. On peut aussi consulter cet immense livre d’histoire depuis chez soi grâce à ce lien :

https://anaiartea-oroitlekua.eus/

Remerciements :

INA l’Institut National de l’Audiovisuel, qui me facilite l’illustration de nombre de Txirrita grâce à ses précieuses archives.

Les vidéothécaires de France 3 Aquitaine, qui me dénichent des archives que je ne pourrai jamais retrouver sans leur concours constant.

Emmanuel Clerc et Sandrine Estrade de France 3 Euskal Herri Pays basque qui le 27 mai 2023 ont couvert pour la rédaction l’inauguration du Mémorial de Saint Pée, et sachant que je préparais ce Txirrita, ont tourné en longueur cette  matinée afin que je dispose d’images, et m’ont permis de réaliser une interview que je garde pour un autre Txirrita (car cette fois, je n’ai pas eu le temps de l’utiliser afin de laisser respirer l’émission comme l’on dit dans notre jargon. Vous savez tout !).

Les thèmes :

1 - Il y a 40.000 ans

2 - Il y a 20 000 ans

3 - L’époque des Romains

4 - Les princes de Vasconie

5 - Les batailles de Roncevaux

6 - Sancho le Grand, roi de tous les Basques

7 - Le «Fuero General» ou la coutume devenant loi

8 - La résistance d’Amaiur (Navarre) en 1521

9 - Elkano, le premier marin à réaliser le tour du monde

10 - Le premier livre basque imprimé en 1545

11 - Les procès en sorcellerie au XVII. Siècle

12 - La Révolution française

13 - Les guerres carlistes

14 - L’époque des mines

15 - La naissance du parti nationaliste basque (PNB)

16 - La « Grande Guerre » de 1914-1918

17 - Le bombardement de Gernika 26-04-1937

18 - La naissance de E.T.A. (Euskadi et Liberté)

19 - 1977 : la transition démocratique dans l’Etat espagnol

20 - La situation de la langue basque hier et aujourd’hui

21 - Les racines de la langue basque

22 - L’Accord Lizarra-Garazi en 1998-1999

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