L'ETA, en remettant samedi à la France une liste de caches d'armes six ans après l'abandon de la lutte armée, a mis en scène un "show" pour redorer une "image désastreuse", estime le spécialiste de l'Espagne Jean Chalvidant, qui a consacré plusieurs ouvrages à l'organisation séparatiste basque.

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QUESTION: Pourquoi un désarmement maintenant, six ans après le renoncement d'ETA à la lutte armée?

RÉPONSE: "L'opération a deux buts. Le premier consiste à ripoliner l'image désastreuse d'une organisation terroriste qui a tué 829 personnes, et par là même celle du séparatisme basque, jusqu'alors entachées de sang et de barbarie. Le second vise à faire bouger les lignes, car aucune initiative sur ce sujet ne vient du gouvernement madrilène. ETA se sait vaincue, son but dorénavant consiste à faire regrouper les 350 prisonniers etarras au Pays basque, puisque pour le moment ils sont disséminés sur 45 prisons à travers l'Espagne (et la France, qui dénombre 75 détenus). Ses dirigeants ont également évalué la situation politique espagnole: Mariano Rajoy (le chef du gouvernement espagnol, ndlr) ne dispose pas de la majorité absolue, et la coalition Podemos, les nationalistes et certains socialistes ont demandé ce regroupement que Madrid pourrait accorder, ETA ne constituant plus un danger.

On se demande pourquoi la dissolution ne coïncide pas avec la divulgation de l'emplacement des planques. Car l'organisation ne représente plus rien, moins de vingt militants tout au plus, inactifs depuis six ans. Dans la petite secte des connaisseurs d'ETA, on est assez partagé. Pour les uns, ETA s'éteindra d'elle-même, sans annonce préalable; pour les autres, dont je suis, elle le fera une fois que les prisonniers auront tous été regroupés. Pourquoi pas dans l'année?"

Q: Pourquoi Paris et Madrid se montrent circonspects sur l'initiative de samedi?

R: "Parce que sur la forme, l'opération de Bayonne est un show, une opération de relations publiques, menée sans concertation avec les deux États concernés, la France et l'Espagne. Et sur le fond, posséder autant d'arsenaux ne sert plus à rien. À quoi rime le fait d'avoir plusieurs tonnes d'explosifs si les hommes ne sont pas en quantité suffisante pour les utiliser? Mais tout ce cirque ne signifie pas pour autant qu'ETA soit démilitarisée. Ses rares militants ont bien sûr gardé leur propre arme et du matériel explosif. Et sur un ordre, tout peut repartir demain. Une phrase du communiqué envoyé à la BBC (par ETA pour annoncer son désarmement, ndlr) a retenu mon attention: "Les ennemis de la paix pourraient souffrir d'autres attaques." Inquiétant."

Q: Que valent les armes dans ces caches?

R: "La quantité, tout d'abord: d'après les dernières informations dont je dispose, il serait question de remettre aux autorités 120 armes (sur 130 en possession d'ETA d'après mon décompte personnel) et trois tonnes d'explosifs conservés dans 45 bidons numérotés, dont une bonne partie est devenue inoffensive, car enfouie sous terre depuis parfois des dizaines d'années, ce qui l'a irrémédiablement altérée. Pire, les rares militants de confiance chargés de l'entretien des arsenaux se sont abstenus de le faire, de peur de mener les gendarmes sur les lieux. Mais ETA aurait soustrait de l'inventaire les armes ayant été utilisées lors d'attentats, afin qu'on ne puisse y relever des traces d'ADN ou autres."

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