Didier Guillaume et Jean-Baptiste Lemoyne renoncent tous deux à se présenter aux municipales sous la pression de l’Elysée. Pour le maire sortant et candidat de Biarritz, "On rentre dans l’ordre normal des choses". C'est ce que nous a confié ce jeudi matin Michel Veunac dans une interwiew
Les deux avaient pour Biarritz les yeux de chimène. Deux ministres au sein du même gouvernement mais l'un contre l'autre dans la bataille des municipales. Une situation qui faisait désordre dans une Macronie secouée par plusieurs dissidences.
Finalement, la guerre n'aura pas lieu. Didier Guillaume, en charge de l’agriculture et le secrétaire d’État au Tourisme et au Commerce extérieur Jean-Baptiste Lemoyne, ont tous deux été sommés de retirer leur candidature.
Et ils ont accepté.
L'Elysée à la manoeuvre
Après des semaines de tergiversations, le chef de l'Etat a donc décider de s'engager dans la campagne des municipales et de mettre fin en 48 heures à une situation pour le moins étonnante.
Mardi 28 janvier, Emmanuel Macron a reçu Didier Guillaume pour lui demander de renoncer à se présenter à Biarritz, où il avait lancé une liste concurrente de celle du maire sortant Modem Michel Veunac, sur laquelle se présentait Jean-Baptiste Lemoyne.
Lors de leur rencontre, le chef de l'Etat a demandé à Didier Guillaume "de rester à ses côtés afin d'exercer ses responsabilités de ministre de l'Agriculture, dans une période importante pour le gouvernement", précise l'Elysée.
Dans cette période, "toutes les forces de la majorité doivent être rassemblées et travailler ensemble" alors que les enjeux sont également "importants pour l’agriculture française dans le contexte du Brexit et des discussions autour de la Politique agricole commune (PAC)", a ajouté la présidence.
De son côté Jean-Baptiste Lemoyne a confirmé qu’il renonçait à figurer sur la liste du maire Michel Veunac et qu’il souhaitait ainsi poursuivre sa mission au gouvernement. Le Président a demandé le lendemain mercredi à son secrétaire d’Etat de renoncer à ses ambitions municipales.
La pression s'était accentuée ces dernières semaines sur Didier Guillaume pour qu'il renonce à se présenter en rival du maire (MoDem) Michel Veunac, à qui La République en Marche devait apporter son soutien pour les municipales.
Le Premier ministre Edouard Philippe avait ainsi estimé mi-janvier qu'il n'était "pas envisageable que deux membres du gouvernement puissent être candidats l'un contre l'autre durablement".
"L'ordre normal des choses" pour Michel Veunac, le maire sortant de Biarritz
Joint par téléphone, le maire sortant Modem de Biarritz regrette le départ de Jean-Baptiste Lemoyne de sa liste mais respecte la décision du président.
Je l’ai dit à plusieurs reprises, je trouve que l’intrusion de Didier Guillaume dans cette campagne contre un maire sortant issu de la majorité présidentielle, puisque je suis MoDem, avait quelque chose de pas très convenable. Franchement, c’était une sorte d’OPA hostile, en tout cas inamicale. Je trouve qu’on rentre dans l’ordre normal des choses: c’est-à-dire que le maire sortant appartenant à la majorité présidentielle ne doit pas avoir face à lui un ministre du gouvernement. Je pense que c’est cela aussi que le président a voulu trancher.
Ecoutez la réaction de Michel Veunac joint par téléphone ce jeudi matin ►
De son côté Jean-Baptiste Lemoyne ne cache pas sa déception sur France Bleu Pays Basque, " Le président m’a demandé un effort, celui de ne pas être candidat pour mettre fin à une situation absurde, une situation de désordre causée par mon collègue. Ça me coûte personnellement. Je vis à Biarritz, je ne pars pas. Je reste très engagé pour une très belle équipe."
Et d'ajouter sur France Info en évoquant le chef de L' Etat: "C'est lui le chef, c'est lui le patron, il a fixé une mission : relever la France (…) Il nous a donc incité les uns et les autres à rester concentrés sur notre feuille de route qui est celle de relever le pays (...) C'est dans un esprit de dialogue que les choses se sont faites".
Pour le moment, Didier Guillaume qui avait assuré dès mardi qu'il "respecterait l'arbitrage du président de la République n 'a pas encore réagit."
Vu de Biarritz
A Biarritz, cette décision est déjà très commentée par les autres candidats aux élections municipales."Tout le battage n’a servi finalement à rien, exprime pour sa part Guillaume Barucq, qui mène la liste Biarritz Nouvelle Vague.
Ce que j’aime à Biarritz, c’est que les choses ne se passent jamais comme ailleurs. Et les surprises ne font peut-être que commencer ! #EginDezagun #VoyonsLoinPourBiarritz
— Guillaume BARUCQ (@GuillaumeBarucq) January 29, 2020
Nathalie Motsch, candidate pour la liste Biarritz 2020, avec le soutien de l'UDI préfère le ton de l'ironie.
Quelle soirée !
— Nathalie Motsch (@MOTSCHNATHALIE) January 29, 2020
Quelle campagne !
Les ministres décampent !
Je vais rêver d’une ville ouverte, moderne et durable ..
Avec une Maire et une équipe compétente, crédible et bienveillante ...?#Biarritzenabesoin pic.twitter.com/kIXwcRglil
Un cadeau d'Emmanuel Macron à François Bayrou
En jouant les arbitres et en imposant cette décision, Emmanuel Macron choisit de remettre de l'ordre dans son propre camp, lui qui n'a pas réussi à dissuader le député de l'Essonne Cédric Villani de mettre fin à sa candidature dissidente à Paris face au candidat officiellement investi Benjamin Griveaux. Le président entend aussi ne pas vexer le maire de Pau et président du Modem, François Bayrou dans sa zone d'influence. En imposant ces deux retraits, le chef de l'Etat ne provoque pas un litige supplémentaire avec un maire sortant soutenu par le Modem.