La jeune femme de 20 ans accusée d'avoir tué une salariée d'un centre d'accueil à Poitiers a été mise en examen ce matin pour assassinat et placée en détention. En garde à vue, elle a affirmé avoir décidé de tuer toutes les éducatrices après avoir appris que son enfant pourrait lui être retiré.
Michel Garrandaux, le procureur de la République de Poitiers a tenu cet après-midi à Poitiers une conférence de presse au cours de laquelle il est revenu sur les circonstances du drame et sur les motivations de la suspecte, une jeune Guinéenne de 20 ans, hébergée au centre d'accueil "Cécile et Marie-Anne" avec son enfant, un garçon âgé de 15 mois né en France.
Convoquée le 6 novembre par le juge des enfants
Il a indiqué que le signalement à la justice par l'équipe éducative du centre "Cécile et Marie-Anne" avait été effectué le vendredi 19 octobre dernier. Les éducatrices avaient constaté "une détérioration nette et progressive de l'état de santé de la mère". Elle ne s'occupait plus des repas de son enfant, passait ses journées enfermée dans le noir. L'équipe du centre d'accueil a alors considéré "qu'il y avait un risque important pour la santé psychologique de l'enfant". L'état psychique de la mise en examen s'était dégradé à partir du mois de septembre dernier. "Elle se pensait persécutée et refusait toute aide extérieure" a précisé Michel GarrandauxLe procureur de la République a indiqué qu'après ce signalement, le juge des enfants avait été saisi que la jeune mère était convoqué le 6 novembre devant le juge des enfants pour un éventuel placement de son fils.
Elle voulait "toutes les tuer"
Cette convocation lui a été signifiée par les responsables du foyer en fin de semaine dernière qui luiont annoncé qu'elle pouvait se voir retirer la garde de son enfant à cette occasion. Selon le procureur, cette annonce a été l'élément déclencheur du drame. La suspecte a déclaré en garde à vue que c'est à partir de ce moment là qu'elle avait pris la décision de "toutes les tuer", à commencer par la victime qui selon elle, était celle qui lui en "voulait le plus".##fr3r_https_disabled##
Quatre coups de couteau dont un à la gorge
Le procureur a apporté des précisions sur le déroulement des faits. Selon les déclarations de la mise en examen, elle aurait porté quatre coups de couteau dont un à la gorge. Cet acte a été prémédité longtemps à l'avance, comme elle a expliqué lors de ses auditions. Dès vendredi, elle s'était renseignée sur les tableaux de service des salariée et ayant constaté que la victime était seule de garde le week-end dernier elle a alors décidé de passer à l'acte. Elle détenait un couteau de longue date et en a volé un autre dans le foyer. Elle a guetté l'arrivée de l'éducatrice à 7h et l'a agressée dans son bureau lui portant un premier coup de couteau puis trois autres alors que la victime était à terre. Le procureur a ensuite indiqué qu'elle avait volontairement tardé à appeler les secours "parce qu'elle ne voulait pas qu'on la sauve"."Aucun dysfonctionnement de la justice"
La jeune mère a été mise en examen ce matin pour "homicide volontaire avec préméditation" et placée sous mandat de dépôt. Elle encourt la réclusion criminelle à perpétuité. Son enfant a été confié au service sociaux.Michel Garrandaux a affirmé lors de sa conférence de presse qu'il n'y avait eu aucun dysfonctionnement de la justice dans cette affaire. Une fois le signalement fait pour risques psychologiques sur l'enfant, le 19 octobre, un juge des enfants a été saisi et une convocation établie le 26 octobre pour le 6 novembre. Un délai de procédure qui apparaît comme normal. Le procureur de la République a par ailleurs indiqué qu'il ne souhaitait pas entrer dans la polémique.
Dès samedi, le conseil départemental de la Vienne avait réagi en posant des questions sur le fonctionnement de la justice et en s'étonnant du fait que la jeune femme était restée dans le foyer après le signalement. "Les services de l'aide sociale à l'enfance avaient effectué vendredi un signalement de cette personne pour mise en danger de [son fils, ndlr]. Le juge a maintenu la jeune femme et [son fils] dans le lieu de vie" avait indiqué Rose-Marie Bertaud, Vice-Présidente chargée de l’action sociale, de l’enfance et de la famille, sur notre antenne.
Reportage de Sophie Goux, Laurent Gautier et Philippe Ritaine
Intervenant : Michel Garrandaux, Procureur de la République de Poitiers
Deux jours après le drame, l'émotion est grande au centre d'accueil pour femmes et mères en difficulté "Cécile et Marie-Anne" qui est fermé. Des bouquets de fleurs ont été déposés devant la porte sous les scellés en hommage à la victime. La salariée tuée samedi était âgée de 39 ans et originaire de Charente. Elle n'avait pas d'enfant et vivait maritalement avec son compagnon et ses deux enfants.