"C'est quelque chose de nouveau pour moi." De Paris aux Pyrénées à vélo, le défi fou de soixante réfugiés pour "s'intégrer"

Depuis le 25 juillet, 60 réfugiés, accompagnés par des bénévoles, pédalent et sillonnent l'hexagone vers le sud dans l'objectif d'améliorer leur intégration en France. Il s'agit de la quatrième édition organisée par l'association Reborn. Ce premier week-end d'août, ils découvrent le Poitou-Charentes.

Des dizaines de vélos et autant de t-shirts bleus, des sourires sur tous les visages et de la musique à chaque virage : voici le Reborn Trip, une épopée de 1 000 kilomètres à vélo de la région parisienne jusqu'aux Pyrénées durant laquelle la nationalité, la langue et les différences s'effacent dans l'effort.

"Quand on a eu l'idée du Reborn Trip tout le monde pensait que ce ne serait pas possible, que ce serait irréalisable", indique fièrement Patrick Brissonneau, le fondateur. Et il y a de quoi ironiser, puisqu'il s'agit déjà de la 4ᵉ édition de ce périple qui permet à des réfugiés de parcourir la France pour s'intégrer.

Cette année, l'épopée, débuté le 25 juillet, durera trois semaines. Parmi les participants, on retrouve 60 réfugiés de dix nationalités différentes, dont un tiers d'Afghans, et des bénévoles pour les encadrer. 

"C'est quelque chose de nouveau pour moi"

De passage dans la Vienne, les coureurs ont déjà plus de 350 km dans les jambes. "Au début, c'était 50 km, ensuite 60, mais ça va, tout le monde est très content !", s'exclame Nasir Khan Nasiri, heureux d'apprendre à connaître son nouveau pays à vélo. "J'aime bien le sport, j'ai tout de suite accepté, et mon vélo est super beau, il marche bien". À 26 ans, cet Afghan participe pour la deuxième fois. Avec son sourire lumineux, sa bonne humeur et son regard perçant, il est devenu la star du peloton.

Arrivé en France, il y a seulement un an et cinq mois, il attend que sa situation soit régularisée et se concentre sur les cours de français. Grâce à son niveau déjà élevé, il s'est improvisé porte-voix de ceux qui n'ont pas encore cette chance de bien parler français. D'une voix qui se veut donc représentative, il l'assure :"tout le monde est trop content d'être là". 

Ce voyage, c'est l'occasion pour les réfugiés de découvrir le pays où ils vivent désormais. "C'est quelque chose de nouveau pour moi, connaître d'autres personnes, je découvre des villages de France", raconte Stéphane Dion, un Ivoirien qui a quitté son pays il y a un an. "C'est une belle expérience, je suis très heureux", répète-t-il tout sourire. 

Cet homme assez discret espère "servir la France" dès qu'il le pourra. Pour l'instant, sa situation non plus n'est pas régularisée. "Je fais aussi ça pour pouvoir m'intégrer", ajoute-t-il.

Et c'est bien là, l'objectif principal de ces trois semaines. Le Reborn Trip, traduit de l'anglais, "voyage de renaissance", se veut être un nouveau départ pour ces personnes qui ont dû repartir à zéro en arrivant en France. "Cela leur redonne une dignité, car quand ils arrivent en France, ils n'existent pas, on ne les reconnaît pas", insiste Patrick Brissonneau. "Ils ont l'impression de faire quelque chose de grand et ça les sort de l'isolement, parce que ces jeunes souffrent énormément de la solitude."

J'espère qu'un jour des milliers de Français et Françaises découvriront sur les routes, qu'avec tous ces réfugiés on peut vivre des choses extraordinaires et qu'il faut juste changer de lunettes, qu'il faut aller contre les préjugés.

Patrick Brissonneau

Fondateur du Reborn Trip

"Une grande fête"

Chaque matin, l'ensemble de l'équipe se lève à 6 h pour remonter en selle et parcourir entre 50 et 70 km jusqu'à l'hébergement du soir. Au fil des paysages, ils découvrent le patrimoine français et ses monuments.

Si les étapes sont sportives et demandent un vrai effort physique aux participants, ici, c'est l'aventure humaine qui est mise en avant. "Accueillir les réfugiés devrait être une grande fête, c'est merveilleux", lance Patrick Brissonneau. Langues, partage de culture, danse ou encore musique, sans jugement, chacun partage un bout de son pays natal.

C'est la découverte de la fraternité, du vivre ensemble donc on est portés. On est heureux de se découvrir au-delà de toutes nos différences. C'est magique !

Patrick Brissonneau

Fondateur du Reborn Trip

Pour Patrick Brisonneau, cette épopée est avant tout un "message" envoyé aux Français pour dire : "On peut faire des choses qui paraîssent impossibles si on roule en peloton", lance-t-il usant de la métaphore cycliste pour évoquer une "fraternité".

Financé par des dons

Pour financer le voyage, l'association a pu bénéficier de dons. Installée à Malakoff, en région parisienne, l'association accompagne les réfugiés dans leur insertion, notamment via la formation et travaille étroitement avec l'association Habitat & humanisme urgence.

Loin de leur quotidien, ces grands voyageurs devraient arriver ce dimanche 4 août, en fin de journée, en Charente-Maritime avant de poursuivre vers le sud. Leur épopée se terminera le 15 août. "On est tous pareils dans l'effort avec un objectif commun que nous pourrions avoir en France aussi, celui de réussir l'intégration", conclut Patrick Brissonneau.

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