Renforcés par la décision du Conseil d'État de suspendre leur dissolution, Les Soulèvements de la Terre portent le convoi de l'eau. Un peloton de plus de 700 militants en route pour Paris qui attire à chaque halte des riverains curieux et intéressés par les combats liés au partage de l'eau.
"Cinq ou six crevaisons, deux chaînes cassées, sur plusieurs centaines de vélos, c'est pas énorme" constate Romain, bénévole à l'atelier de réparation, à la fin de la première journée.
Combien sont-ils exactement à constituer ce Convoi de l'eau, difficile à dire. La préfecture de la Vienne a dénombré 16 tracteurs et 516 cyclistes ce vendredi 18 août. Les organisateurs annoncent 750 inscrits et affichent complet. "Le convoi est complet, mais il est possible de nous rejoindre lors des différentes soirées. Si vous n'êtes pas inscrits, pas possible de dormir ici" indiquent Les Soulèvements de la Terre sur leur fil X.
Le mouvement s'agrandit
Sur les petites routes de la Vienne, il y en a bien sûr qui râlent, empêchés d'emprunter leur trajet habituel, et qui envoient valdinguer les barrières dès que les gendarmes ont le dos tourné : "ils nous emmerdent les écolos". Mais c'est plutôt sous les applaudissements des riverains que le convoi de tracteurs et vélos chemine : "c'est très important de défendre l'eau, c'est un bien commun".
Pour nos gosses, pour nous, venez me voir les Mélusins. On échange, on se fédère, et le mouvement s'agrandit
Une habitante de Jazeneuil
Et le soir, sur le lieu de bivouac, ils sont nombreux à venir en voisins partager le pique-nique, assister aux concerts et aux conférences. Certains même prennent le micro, comme cette habitante de Jazeneuil : "L'eau, c'est éminemment politique. On est en train de monétiser quelque chose de vital. Pour nos gosses. Pour nous. Donc, venez me voir les Mélusins (habitants de Lusignan ndlr). Jazeneuil, Lusignan, Saint-Sauveur, on échange, on se fédère, et le mouvement s'agrandit".
Les Soulèvements de la Terre, co-organisateurs légitimes
Tout récemment libéré par la décision du Conseil d'État, le 11 août dernier, de suspendre la dissolution décrétée par le gouvernement le 21 juin, le collectif Les Soulèvements de la Terre affiche librement et fièrement son rôle de co-organisateur de ce peloton militant : "On aurait été là de toute manière, mais ça fait du bien de pouvoir être présents sereinement, et légitimement surtout" affirme Léa Hobson, porte-parole des Soulèvements de la Terre.
Dissous par le gouvernement en Conseil des ministres le 21 juin, le collectif écologiste a ainsi remporté sa première bataille judiciaire avec cette décision en référé. La décision finale aura lieu à l'automne.
Méga bassines, accaparement des terres, artificialisation des sols, productions destinées à l'export, le convoi de l'eau fédère tous les combats contre une agriculture industrielle. Et le collectif se félicite de l'ampleur et de la diversité de la mobilisation qu'il occasionne : "Qu'on rejoigne des mobilisations comme celle-là en étant à plus de 500 km ou en habitant localement, ça montre pleinement que les luttes qui défendent la terre, qui défendent l'eau concernent absolument tout le monde." estime Léa Hobson. "Et on observe que ces mobilisations rassemblent de plus en plus de monde, avec une composition qui est très frappante de gens de tous horizons, que ce soit individuels ou organisations, syndicats, collectifs, associations. Quand on voit à quel point c'est en train de grandir, on ne peut qu'être optimiste" se réjouit-elle.
Des haltes symboliques
La première halte du convoi a eu lieu dans le centre de Lezay, au pied du panneau indiquant la direction de Sainte-Soline. Les militants, empêchés par les autorités de faire de Sainte-Soline le lieu de départ du convoi, ont dressé là un cairn en mémoire de la manifestation du 25 mars.
"On est très heureux, et on est aussi ému parce qu'on n'oublie pas les blessés d'il y a cinq mois, on n'oublie pas les batailles qui se sont produites ici" déclare Benoît Feuillu, porte-parole des Soulèvements de la Terre, qui a été placé en garde à vue puis relâché lors de la deuxième vague d'arrestations des militants en juin dernier.
D'autres actions symboliques sont prévues le long de ce parcours qui doit mener le convoi jusqu'à Orléans et le siège de l’Agence de l’eau Loire-Bretagne, le 25 août, puis Paris les 26 et 27 août.