Secrétaire général académique du SNES-FSU de Poitiers (Syndicat national des enseignants du second degré - Fédération syndicale unitaire) et CPE dans le collège François Mitterrand de Montbron (Charente), Alain Héraud explique les raisons de ce mouvement de grève chez les enseignants qui appréhendent grandement la rentrée prochaine.
La majorité des syndicats d'enseignants ont appelé à la grève, ce jeudi 1ᵉʳ février. Revalorisation salariale, meilleures conditions de travail et défense de l'école publique après les propos polémiques d'Amélie Oudéa-Castéra, actuelle ministre de l'Éducation nationale, sont au cœur des préoccupations.
Qu’est-ce qui a déclenché ce mouvement de grève ? Est-ce la prise de fonction de la nouvelle ministre ?
Les ministres se succèdent, mais la politique reste la même. Au départ, la raison de cette grève, ce sont aussi les conditions budgétaires de cette rentrée. Certaines décisions qui ont été prises, notamment sur le collège, avec une réforme qui ne dit pas encore tout à fait son nom, mais qui est bien là.
Un titulaire enseignant avec un Bac+5 est largement moins rémunéré lorsqu’il débute que dans n’importe quelle entreprise.
Alain HéraudSecrétaire académique SNES-FSU
La rémunération moyenne des enseignants a augmenté de 11 % entre avril 2022 et janvier 2024. Votre syndicat estime-t-il que cela ne suffit pas ?
Nous avons un retard cumulé depuis des années qui n’a jamais été compensé. Il faut comparer les choses qui sont comparables. Aujourd’hui, un titulaire enseignant avec un Bac +5 est largement moins rémunéré lorsqu’il débute que dans n’importe quelle entreprise.
La condition salariale pour le second degré, cela ne concerne pas uniquement les enseignants. C’est également le personnel de vie scolaire, les assistantes d’éducation et les accompagnants des élèves en situation de handicap.
Comment va s’organiser la création de petits groupes en mathématiques et en français pour les élèves en difficulté pour la rentrée prochaine ?
Déjà, il faudrait que cette proposition soit écrite pour savoir comment fait-on cette rentrée. Les chefs d’établissements sont en préparation dans leurs établissements avec chacun à l’ordre de son imagination pour savoir comment se préparer face à cette annonce qui avait été faite. Aujourd’hui, c’est une décision qui n’est pas financée.
De plus, il ne s’agit pas de petits groupes, mais d’un seul petit groupe destiné aux élèves en difficulté. Tous les autres sont mis dans des groupes que l’on pourra faire ou ne pas faire. Cela pose deux problèmes : premièrement, il faut trouver les enseignants, particulièrement en lettres, qui prennent en charge ses élèves.
Ensuite, il faut des salles de classes supplémentaires dans certains établissements. La grosse difficulté est que, pour financer cette réforme sur la 6ᵉ et la 5ᵉ, certains moyens seront pris sur les lycées. Donc, on ferme 32 classes sur le budget de l’académie et ce sont ces heures-là qui seront mises pour les petits groupes.
Dans le premier degré, 26 postes d’enseignants seront supprimés à la rentrée dans les Deux-Sèvres, 21 dans la Vienne. Cela vous inquiète-t-il ?
Au total, cela concerne 82 postes si l’on additionne les quatre départements de l’académie de Poitiers. Effectivement, la démographie justifie peut-être certaines suppressions de postes, mais cela entraîne des fermetures de classes. Pour nous, l’objectif, c’est de maintenir un service public accessible à tous dans le territoire.