Nous avons posé trois questions à Mathieu Lacroix, président de l’association Action Sauvetage Poitiers qui fait passer des examens dans le secteur aquatique et de la natation tels que le PSC1, PSE1 et PSE2, SB ou encore le BNSSA.
France 3 : Quelles mesures ont été mises en place pour continuer la formation ?Mathieu Lacroix :
Au niveau du secourisme, toutes nos formations ont été suspendues depuis le début du confinement parce qu’on a plus accès aux salles.
Certaines formations peuvent se faire 100% à distance. C’est le cas de la formation continue du PSE1, c’est à dire des secouristes qui, déjà diplômées, sont soumis à un recyclage annuel. On a déjà organisé deux groupes, et on va pouvoir les former 100% à distance. S’ils envisageaient un travail saisonnier cette année, ils ne seront pas bloqués.
D’autres formations peuvent s’effectuer en partie à distance et en partie en présentiel. Pour les formations initiales, comme les premiers secours en équipe, on a réussi à réduire la durée de présentiel en mettant en place des modules de formation à distance. La partie en présentiel se fera à partir du déconfinement.
Le ministère des sports a permis de différer l’obtention du PSC1 pour suivre certaines formations. Les gens pourront le passer plus tard. Et nous, on a réduit de 50% la durée du présentiel. On a pas pu faire plus car, en effet, les gestes de premiers secours sur le mannequin ne peuvent être fait en ligne.
Pour le brevet national de sécurité et de sauvetage aquatique (BNSSA), c’est plus compliqué car il faut avoir accès à une piscine.
Actuellement la formation est stoppée, on ne peut pas accéder à la piscine pour s’entrainer ni faire passer les examens. Sur les 101 stagiaires, une vingtaine ont passé l’examen avant le confinement, et une quinzaine l’ont eu.101 stagiaires sont inscrits à Poitiers en formation BNSSA et ont vocation à travailler l’été dans les piscines ou sur la côte pour surveiller les plages.
France 3 : Avec le déconfinement, comment vont se dérouler la tenue des examens ?
Mathieu Lacroix :
Pour passer les diplômes, les stagiaires auront des masques, des gants… Des mesures d’hygiène seront mises en place : lavage des mains, désinfection du matériel.
De base, il y a dix stagiaires pour un formateur. Ce chiffre pourra être réduit en fonction de l’espace disponible et on rajoutera des règles de distanciation entre les stagiaires.
Ces formations vont pouvoir reprendre à partir de la semaine prochaine normalement. Les stagiaires sont inquiets car ils ne s’entraînent plus et voient leur niveau de performance baisser, inquiets aussi car ils ne savent pas si les piscines vont rouvrir et s’ils vont pouvoir passer l’examen et également s’ils vont pouvoir travailler cet été. La plupart avait des projets d’emplois.Il y a aussi des choses qui ne se feront plus comme le bouche à bouche ou la technique d’insufflation sur le mannequin.
On a demandé au niveau des associations de sécurité civile et par rapport au risque de noyades et de pénurie de personnel (qui existe déjà en temps normal mais risque d’être renforcé cet été), d’être prioritaires pour faire passer les examens si les piscines rouvrent leurs portes.
On travaille aussi sur des mesures de simplification des épreuves. Le ministère de l’intérieur se penche sur des mesures temporaires qui permettraient l'assouplissement de certaines épreuves. On voudrait aussi prendre en compte le contrôle continu pour donner une chance supplémentaire au candidat.
France 3 : Si les plages et les piscines rouvrent cet été, les diplômés seront-ils opérationnels ? Auront-ils le temps de passer leur diplôme avant la réouverture ?
Mathieu Lacroix :
C’est sûr qu’ils seront moins opérationnels que d’habitude, parce que d’habitude, au mois d’avril ils ont des stages "mer ", organisés par le SDIS.
Ce n’est pas sur que les piscines rouvrent… mais si c’est le cas, et que les jeunes ne sont pas diplômés, il va y avoir un gros soucis et encore plus avec les plages. Déjà l’année dernière ça a été catastrophique en terme de noyade.Cela nécessite que le ministère de l’intérieur prenne ces mesures exceptionnelles et dérogatoires et nous donne accès aux piscines. Dans ces conditions, ça va bien se passer, les stagiaires seront diplômés et ils pourront travailler cet été.Chaque année, 1.000 nouveaux maîtres nageurs sauveteurs sont formés en France et chaque année il y a une pénurie de 5.000.
Répartition des noyades accidentelles par lieu de noyade en France sur l'année 2018En revanche, si les piscines ne rouvrent pas avant le mois de juillet et qu’on ne peut pas faire passer les examens, là je crains le pire. Ça se passera mal.
S’il y a une canicule et que les gens vont se baigner dans les plans d’eau et qu’il n’y a pas de surveillance, ça me semble complètement fou. J’espère que les autorités feront le nécessaire pour que les surveillants soit diplômés.Il n’y aura pas assez de personnel pour surveiller les plages, les piscines…