Les familles monoparentales sont de plus en plus nombreuses en France, mais leurs difficultés ne sont que très peu reconnues. La fin de l'année est une période particulièrement très compliquée à vivre pour les parents seuls, sur le plan financier comme émotionnel. La présidente de l'association Parents Solos 86 nous raconte.
À l'approche des fêtes de fin d'année, la charge mentale est lourde pour les parents, mais encore plus pour les familles monoparentales : "C'est une charge mentale financière évidemment, mais également émotionnelle, pour nous et pour nos enfants", confie Marilyn Pruvrel, présidente de Parents Solos 86. Cette association, qui existe depuis 2019 à Poitiers, est un soutien pour ces familles souvent isolées.
Ateliers et groupes de parole
Les groupes de parole, organisés à Poitiers et bientôt à Châtellerault, permettent à ces parents de se sentir moins seuls face à leurs difficultés quotidiennes : "Souvent, ce sont des parents très isolés qui font face à une certaine incompréhension de la société, un regard biaisé. Lors de ces groupes de parole, ils sont dans un lieu où ils peuvent se confier, sans être jugés et ils rendent compte que beaucoup ont les mêmes problèmes qu'eux".
Les ateliers créatifs, organisés par l'association, sont également un moyen de créer du lien social : "Ce n'est pas la finalité qui compte dans ces ateliers, le plus important, c'est la discussion, le bien-être, la bienveillance, mais c'est également du répit". Une fois par mois, le samedi, les enfants des adhérents peuvent être pris en charge par une garderie, ce qui soulage certaines familles.
"Il y a un sentiment de culpabilité"
Les dernières semaines de l'année sont souvent les plus difficiles pour les parents seuls : "Les fêtes de fin d’année ou les anniversaires, ce sont les périodes les plus moroses pour les familles monoparentales, ils se sentent très seuls, ils se serrent la ceinture financièrement pour offrir des cadeaux à leurs enfants", explique la présidente de l'association. "Nous sommes dans une société de consommation, donc il y a un sentiment de culpabilité qui s'installe chez les parents qui ne peuvent pas faire plaisir à leurs enfants comme ils aimeraient". L'année dernière, certains parents en difficulté ont témoigné auprès de l'association : "En cette fin d'année, je me sens épuisée, moralement, physiquement, à la limite du burn-out émotionnel. Je me sens vide et j'agis tel un robot puisque je suis le seul parent sur qui mes enfants peuvent compter. Je n'ai pas le droit de tomber", déclare une mère de famille.
C'est pour cette raison que Parents Solo 86 organisent une "gratiferia" de Noël, en décembre, pour les familles adhérentes : "L'idée, c'est d'être ensemble, de manger un bon gâteau, de ramener des cadeaux pour les offrir, mais également d'en recevoir gracieusement". L'association aimerait organiser un arbre de Noël, un loto ou encore un repas l'année prochaine, mais elle manque aujourd'hui de financements pour les réaliser. Les subventions de la ville de Poitiers, du Grand Poitiers et de la Caf de la Vienne sont cependant des aides cruciales pour développer l'association.
"On devient la norme"
Il est complexe pour ces parents de se sentir bien dans une société pensée pour des couples, pour la biparentalité : "On est traité comme si on n’était pas la norme, alors qu'on devient la norme", déplore Marilyn Pruvrel. Dans la Vienne, les parents seuls représentaient 20 % du total des familles habitant le département, en 2006. 14 ans plus tard, en 2020, ils représentent 28 %, selon l'INSEE.
Au-delà des activités proposées, l'association souhaite faire entendre la voix des familles monoparentales au niveau institutionnel et défendre leurs droits : "Il est temps de donner un vrai statut à ces familles et de leur donner des droits, de défiscaliser les pensions alimentaires, d'augmenter l'âge du complément mode de garde jusqu'à 12 ans, de déconjugaliser l'allocation de soutien familial (ASF), il y a beaucoup de choses à faire".