Depuis le lundi 23 mars, un numéro d'appel permet au personnel de santé de la Vienne de se confier à des psychiatres et des psychologues pour parler de leur ressenti face à la pandémie du Covid-19. Le référent de cette cellule dans la Vienne nous en dit plus.
Tous les soirs en France à 20 heures, nous applaudissons les soignants, celles et ceux qui sont en première ligne, confrontés à chaque instant au virus. C'est un geste réconfortant, encourageant mais qui, parfois, ne suffit pas.
Une mission nationale a demandé aux cellules d'urgence médico-psychologique, les CUMP, de mettre en place une ligne téléphonique spécifique pour les écouter.
Dans la Vienne, elle fonctionne depuis le 23 mars, cinq jours sur sept. Au bout du téléphone, un psychiatre, un infirmier spécialisé et une cadre de santé reçoivent les appels. Ils écoutent, conseillent et orientent. "A l'issue de l'entretien, nous leur proposons soit de les rappeler pour garder le contact, soir de les orienter vers la villa santé du CHU de Poitiers pour les aider dans leur quotidien. Nous travaillons aussi avec des psychiatres et des psychologues du privé, volontaires, qui peuvent les prendre pour un suivi en urgence", explique le docteur Jean-Jacques Chavagnat, psychiatre et responsable de la CUMP renforcée de la Vienne.
Les appels sont pour l'instant peu nombreux, de l'ordre d'un ou deux par jour. Une faible participation qui n'étonne pas le docteur Chavagnat. "Les soignants sont les moins enclins à se faire soigner. Ils ont le nez dans le guidon, ils prennent beaucoup sur eux. D'ici quelques semaines, cela risque d'être différent. Certains ne vont pas bien, mais ils n'osent pas parler."Certains ne vont pas bien, mais ils n'osent pas parler.
Celles et ceux qui appellent, travaillent souvent dans les Ehpad ou les centres médico-sociaux. Ils évoquent la même problématique, la peur de la contamination. Suis-je contaminé ? Vais-je contaminer ma famille ? Cette peur peut paralyser le soignant au point de ne plus pouvoir travailler. "Ils sont habitués à être confrontés à la maladie ou la mort. Mais là c'est une pandémie, un virus qui s'attrappe et qui peut toucher tout le monde."
"C'est normal d'être déstalibilisé"
Cette épidémie ravive aussi le problème de la confiance. La confiance envers les décideurs, les autres, et soi-même. Est-ce que je fais bien les gestes barrières ? Est-ce que mon patient les a bien faits ? Face à ce questionnement, les professionnels de la cellule sont là pour rassurer. "Nous nous appuyons sur les éléments de protection que chacun a en soi, sur les réussites et les qualités de chacun."Le responsable de la CUMP le martèle : "Il ne faut pas attendre d'aller trop mal pour appeler, c'est normal d'être déstabilisé".
Ligne téléphonique pour les personnels de santé de la Vienne : 05 49 44 58 94
Une ligne de soutien psychologique pour tout le monde
Le 30 mars, l'hôpital Henri-Laborit a mis en place une autre plateforme téléphonique appelée CovidPsy86, pour tous les habitants de la Vienne. Là aussi, trois personnes (psychiatre, psychologue et infirmier) répondent cinq jours sur sept aux angoisses des citoyens.La dizaine d'appels quotidiens provient à 40% des personnes âgées qui souffrent de ne plus voir personne, 40% des mères ou pères de famille dépassés par la gestion des enfants et l'accompagnement pour les devoirs. 20% sont des jeunes, étudiants ou travailleurs, seuls à Poitiers, loin de leur famille. "Pour tous ces profils, souvent un simple temps d'échange, d'écoute, et de réassurance suffit pour leur redonner du courage et les remotiver " explique le docteur Mélanie Voyer, psychiatre, responsable de la ligne CovidPsy86.
Cette ligne téléphonique est aussi dédiée aux familles endeuillées qui ont besoin d'être accompagnées.
► CovidPsy86 : 05 49 44 58 95
► Accompagnement psychologique Covid 19 pour les personnes sourdes : SMS et FaceTime : 07 85 01 96 89