Environ 3 000 manifestants se sont regroupés contre le projet des "mégabassines" selon la préfète des Deux-Sèvres, plus de 6 000 selon les organisateurs de cette mobilisation. Pourtant, la préfecture de la Vienne avait annoncé, ce mardi 16 juillet, l'interdiction de "toute manifestation". Suivez ici le récit de cette journée.
Les forces de l'ordre estiment l'arrivée de plus de 6 000 manifestants dans la forêt de Saint-Sauvant à la mi-journée, présents sur place pour contester et dénoncer un projet de réserve de substitution destinée au stockage agricole de l'eau. Un nouveau point de rendez-vous est donné à 12h : celui du lieu-dit Le Pré Sec à Migné-Auxances. À 15 h, le cortège des militants anti-bassines se dirige vers deux sites agro-industriels locaux. En fin d'après-midi, les manifestants se retrouvaient au lieu-dit Le Pré Sec avant de prendre le lendemain la direction de La Rochelle.
La plupart des militants se sont regroupés massivement durant toute la semaine au "Village de l'eau", situé à Melle dans les Deux-Sèvres.
Alors que certains redoutent un nouvel épisode de violences et d'affrontements entre forces de l'ordre et manifestants, après les évènements de Sainte-Soline en mars 2023, la rédaction de France 3 vous raconte en détail le récit de cette journée.
Ce que l'on sait
- La préfecture de la Vienne, des Deux-Sèvres et de la Charente-Maritime ont annoncé l'interdiction de "toute manifestation" pour cette semaine.
- Le "Village de l'eau", installé à Melle, est le fruit d'une mobilisation internationale menée, du 16 au 21 juillet, par les collectifs "Bassines Non Merci", "Les Soulèvements de la Terre" et "Stop Mégabassines".
- La manifestation prévue ce vendredi 19 juillet devrait avoir lieu dans la forêt de Saint-Sauvant dans le cadre d'un pique-nique et d'une marche familiale. Elle aura finalement lieu au lieu-dit Le Pré Sec de la commune de Migné-Auxances.
- 3 000 membres des forces de l'ordre sont mobilisés pour cette journée du vendredi 19 juillet, dont 2 500 gendarmes.
- Le syndicat agricole Coordination rurale a appelé à une contre-manifestation, ce matin dès 6 h à Chaunay dans les Deux-Sèvres.
Le fil de la journée
- 19 h :
"Pas de blessés du côté des manifestants", selon la préfète des Deux-Sèvres Emmanuelle Dubée lors d'une conférence de presse. "Aucun des sites visés potentiellement par les personnes regroupées n'a été atteint et n'a pas été dégradé ou a suscité un emploi de la force." "Le cortège a fait l'objet de nombreux contrôles dans les Deux-Sèvres : plus de 2 000 contrôles ont été effectué dans le département", indique Emmanuelle Dubée.
Concernant le département de la Vienne, le préfet Jean-Marie Girier précise que "les organisateurs, peu responsables, n'ont pas informé les autorités tout au long de la journée de leurs intentions et de leurs volontés. Le regroupement s'est opéré à 30 km de la forêt de Saint-Sauvant. En début d'après-midi, les manifestants se sont élancés à pied en direction d'un site Seveso, une coopérative de semenece agricole qui est un site sensible. Une partie des manifestants se sont masqués et cagoulés."
Le préfet explique que ces sont les forces de l'ordre qui ont lancé des grenades lacrymogènes après sommation : "afin d'éviter un affrontement direct, nous avons décidé de maintenir à distance en lançant trois grandes lacrymogènes. Un feu de chaume s'est déclenché et les sapeurs-pompiers se sont mobilisés pour maintenir cet incendie et faire en sorte qu'il soit immédiatement contenu."
- 18 h 15
Le procureur de la République de Niort Julien Wattebled annonce l'ouverture d'une enquête suite au regroupement d'environ 500 personnes autour de la commune de Pamproux (Deux-Sèvres) autour d'une usine puis d'une réserve de substitution.
🦠🦋 Désarmement expérimental de la méga bassine de Pampr'oeuf !
— BassinesNonMerci ⏚ (@BassinesNon) July 19, 2024
Des centaines de cyclistes ont... volé en cerf-volant au-dessus du cratère pour y larguer des lentilles d’eau. En se développant dans l'eau stagnante de la bassine, elles pourront boucher les pompes et tuyaux 🤩 pic.twitter.com/rMRXud5Qqt
L'enquête a été ouverte "pour organisation de manifestation interdite et participation à un attroupement sans arme après sommation de se disperser par personnes dissimulant volontairement leur visage afin de ne pas être identifiées." Les investigations sont confiées à la section de recherches de Poitiers. Le procureur de Niort rajoute qu'aucun blessé n'est à déplorer, et qu'aucun dégât n'a été constaté.
- 18 h
Les manifestants se sont retrouvés près du lieu-dit Le Pré Sec dans la commune de Migné-Auxances. Après une journée de marche sous le soleil, la plupart d'entre eux se baignent.
- 17 h
La marche du cortège antibassines, en direction des sites agro-industriels, a été stoppée après qu'un incendie se soit déclaré dans un champ agricole à la sortie de Migné-Auxances.
Une porte-parole de "Bassines Non Merci" annonce la fin de la manifestation : "On avait proposé de cibler Cérience, une filiale semence de Terrena, directement reliée aux projets de bassines dans la Vienne. L'idée était de poser un grand panneau comme un acte de condamnation des accapareurs d'eau. La police a balancé des grenades lacrymogènes dans le champ."
- 16 h 30
Selon nos journalistes présents sur place, les manifestants viennent d’annoncer qu’ils rebroussent chemin avec ce qu’il vient de se passer et retournent au lieu-dit Le Pré Sec "pour se préserver pour demain."
Les pompiers sont en train d'éteindre le feu qui embrase le champ agricole situé à la sortie de la commune de Migné-Auxances.
Manifestations | Intervention en cours des sapeurs-pompiers, appuyés par les gendarmes, sur l’incendie d’un champs à Migné-Auxances
— Préfet de la Vienne (@Prefet86) July 19, 2024
❌Évitez le secteur
🚨Laissez passer les secours pic.twitter.com/brknCh9P2H
- 16 h 15
Geoffroy Dudouit, maire de Saint-Sulpice-de-Ruffec (LFI) en Charente, était sur place au moment où l'incendie s'est déclaré : "On était parti pour faire une promenade de 5 km : à la sortie de Migné-Auxances, la route était bloquée par plusieurs véhicules de CRS. Le cortège est passé à travers un champ fraîchement coupé. Sans sommation, des gaz lacrymogènes ont été jeté à même la paille avec un vent violent : le brasier s'est répandu très rapidement. En termes de sécurité et de maintien de l'ordre, ça pêche un peu."
- 16 h
Un champ agricole, situé à la sortie de la commune de Migné-Auxances, prend feu : selon nos journalistes présents sur place, le départ du feu est dû au jet de grenades lacrymogènes, lancées par les forces de l'ordre sur le cortège des militants antibassines.
- 15 h 30
Le cortège est arrivé dans le centre du bourg de Migné-Auxances. Les routes sont bloquées aux alentours des sites : les accès routiers sont fermés, sur la D757 entre Avanton et Migné-Auxances, ainsi que la route de Saumur (D347).
- 15 h 15
Le cortège s'élance et part du lieu où s'est déroulé le pique-nique.
La préfecture de la Vienne annonce que les manifestants anti-bassines se dirigent vers plusieurs sites sensibles sur Migné-Auxances, dont :
- un site agricole, qui est une usine de méthanisation
- l’usine de conditionnement de semences Cérience, site classé Seveso, à Cissé, qui compte environ 150 salariés.
CARTE - Indication de l'usine Cérience :
- 15 h
Selon nos journalistes présents sur place au lieu-dit Le Pré Sec, les organisateurs annoncent que le cortège se rend sur "un site emblématique de l'agro-industrie" dans le secteur de Poitiers. Le cortège commence à quitter le lieu-dit Le Pré Sec de Migné-Auxances.
- 14 h 30
Andreas Malm, maître de conférences en géographie humaine et théoricien suédois, connu pour prôner le recours à un certain type de violence au nom de la cause climatique, fait partie du cortège de militants installés au lieu-dit Le Pré Sec : "Je suis venu pour participer au mouvement de contestation contre le projet de mégabassines : ce n'est pas une cause uniquement importante en France, mais dans toute l'Europe. L'utilisation de cette technique de retenue d'eau n'est pas la bonne direction à prendre. La police est extrêmement intrusive et veut se montrer agressive en faisant survoler des hélicoptères et en mettant en place des checkpoints à plusieurs endroits."
- 14 h 15
Les militants antibassines installés au rond-point de Poitiers-Biard sont autorisés à faire demi-tour et reprennent la route. Nous ne savons pas encore quelle est leur prochaine destination. Selon le collectif "Bassines Non Merci", la marche pour le moratoire sur les mégabassines s'élancera à 14 h 30.
Maintenant, la marche pour le moratoire sur les mégabassines s'élancera bel et bien à 14h30 ! Elle dénoncera le démarrage annoncé de chantiers de bassines dans la Vienne à l'automne. A très vite pour la suite, no bassaran ! pic.twitter.com/KLu7P7VbgF
— BassinesNonMerci ⏚ (@BassinesNon) July 19, 2024
La sécurisation du monde agricole est renforcée avec des escadrons de gendarmes mobiles et l’arrivée de blindés de la gendarmerie, selon la préfecture de la Vienne : deux véhicules blindés sont passés au rond-point de la loge à Migné-Auxances.
- 13 h 45
Julien Le Guet, porte-parole du mouvement "Bassines Non Merci", est arrivé au lieu du pique-nique à Migné-Auxances : "Ça a été un parcours difficile, semé d'embûches. On est parti vers 8 h du "Village de l'eau" pour rejoindre le parking principal, situé à 2 km du campement. On a reçu des tirs de lacrymo qui ont été lancés des champs moissonnés, et donc, propices à des départs de feu. Rien ne justifiait cela, puisque nous voulions simplement regagner nos véhicules."
Un an et demi après les évènements de Sainte-Soline, les militants ont toujours un "esprit combatif", selon lui : "On réclame un moratoire, et il semblerait que le Nouveau Front populaire soit prêt à nous donner cette victoire dans le cas où ils sont au gouvernement. On a tous en tête les camarades blessés de l'an dernier."
- 13 h 15
Les manifestants arrivent au compte-goutte au lieu-dit Le Pré Sec de la commune de Migné-Auxances : l'ambiance est à la fête.
- 12 h 45
De plus en plus de monde arrive au lieu-dit Le Pré Sec de la commune de Migné-Auxances. Les militants cherchent de l'ombre pour pique-niquer.
- 12 h 30
Certains manifestants sont bloqués sur la route D910 menant à Migné-Auxances : ils envisagent désormais de rester sur place et de pique-niquer sur le bord de la route.
CARTE - Lieu du barrage filtrant sur la D910 :
- 12 h 15
Les premiers manifestants arrivent sur les lieux en voiture, à vélo ou à pied : environ 100 personnes sont sur place, puis se mettent les pieds dans l'eau, au lieu-dit Le Pré Sec de Migné-Auxances. L'ambiance est plutôt calme, selon nos journalistes présents sur place.
- 12 h
Selon le procureur de la République de Niort Julien Wattebled, près de 1 100 objets dangereux ont été saisis à 6 h ce vendredi matin : cela comprend des objets coupants, des objets contondants, des boules de pétanque auxquels il faut ajouter plus de 300 artifices et produits inflammables.
- 11 h 30
Quelques gendarmes à moto et des voitures de la gendarmerie effectuent un barrage filtrant au rond-point de l'aéroport de Biard. La circulation est bloquée sur une seule voix. La police filtre les voitures et leur confisquent du matériel.
- 11 h 05
Selon nos informations, le point de rendez-vous pour le pique-nique n’est plus la forêt de Saint-Sauvant, mais Le Pré Sec à Migné-Auxances, dans la Vienne.
Du côté de la Coordination rurale, l'ambiance est plutôt calme.
- 11 h
Selon nos journalistes présents sur place aux abords du "Village de l'eau" à Melle, des anti-bassines, tous cagoulés, sont bloqués par la garde républicaine : ils les empêchent de rejoindre leurs voitures au parking pour ensuite se rendre à Saint-Sauvant. Les gendarmes ont utilisé des gaz lacrymogènes dans un champ où se trouvent plusieurs militants anti-bassines. De nombreux camions et quelques motos sont également présents.
- 10 h 45
Environ 50 personnes étaient rassemblées au rendez-vous donné sur la commune de Vivonne (Vienne). Un contrôle de la gendarmerie est effectué au rond-point du Super U, selon un de nos journalistes présents sur place.
Léa et Martine (les prénoms ont été modifiés) ont fait plusieurs heures de route pour participer à cette manifestation dans la forêt de Saint-Sauvant : "C'est très important de venir ici, dans la continuité des autres mobilisations. L'objectif est d'avoir un moratoire contre ce projet de mégabassines."
- 10 h 15
Selon des informations de nos journalistes présents sur place, une partie du cortège des anti-bassines est bloquée à la sortie du "Village de l’eau" par les gendarmes. Du gaz lacrymogène est utilisé par les forces de l'ordre.
Environ 150 personnes étaient présentes sur l'un des parkings de Poitiers-sud, un des points de rendez-vous, avant de se diriger vers la forêt de Saint-Sauvant. Des observateurs de la Ligue des Droits de l'Homme sont présents dans ce cortège.
- 10 h
Plusieurs militants sont présents aux différents points de rendez-vous : c'est le cas de Loïc Schneider, présent sur un des parkings de Poitiers-sud, qui avait été condamné à un an de prison de ferme pour avoir soulevé un gilet de gendarmerie trouvé au sol lors de la manifestation de Sainte-Soline. "Ce n'est pas la répression qui arrêtera la volonté de se mobiliser : ce n'est pas en tapant fort sur les personnes, en les blessant, en les envoyant en prison que l'on va régler le problème des mégabassines."
Valérie Soumaille, candidate LFI-NFP lors des élections législatives de la 2ᵉ circonscription de la Vienne, est également présente : "On se mobilise contre le projet des méga-bassines, qui sont pour nous une absurdité, sur le fait de l'accaparement de l'eau par seulement quelques agriculteurs alors que nous n'avons plus les moyens de capter cette eau qui se fait rare. On est là aussi pour des raisons pacifistes, pour obtenir un moratoire".
- 9 h 45
Les militants du "Village de l'eau" se dirigent vers les différents points de rendez-vous de 10 h, en marge de la "Manif'action" prévue ce midi, dans la forêt de Saint-Sauvant. Les forces de l'ordre ont utilisé des grenades lacrymogènes, selon la préfecture des Deux-Sèvres.
#Manifestations | Malgré de nombreux rappels et avertissements, plusieurs dizaines d’individus ont bravé l’interdiction de manifester autour de #Melle.
— Préfète des Deux-Sèvres (@Prefet79) July 19, 2024
Les forces de l’ordre, après sommations, ont donc été contraintes de faire usage de grenades lacrymogènes. pic.twitter.com/E7IlNhEJPE
- 9 h 30
Les discussions entre le maire de Melle, Sylvain Griffault, et les représentants de la Coordination rurale ont été laborieuses. Les personnes autour de la table de la mairie "s'écoutaient très peu", selon un de nos journalistes présents sur place.
- 9 h
À la mairie de Melle, dans les Deux-Sèvres, le maire Sylvain Griffault et deux adjointes, rencontrent dix représentants de la Coordination rurale. Il accueille une délégation de ce syndicat agricole "très remontée", selon un de nos journalistes présents sur place.
- 8 h 30
À l’entrée de Melle, la présidente nationale de la Coordination rurale, Véronique Le Floc'h, échange avec les forces de l’ordre en attendant la confirmation d’un rendez-vous avec le maire Sylvain Riffault.
🟡⚫️ La délégation de la Coordination Rurale part rejoindre le maire de #melle . Véronique Le Floc'h, présidente de la CR, les présidents CR de la Vienne, Dordogne, du Lot-et-Garonne partent en convoi #CoordinationRurale #deuxsevres #plusjamaissaintesoline #agriculteurs pic.twitter.com/AcVVaImnip
— Coordination Rurale (@coordinationrur) July 19, 2024
- 8 h
Les habitants de l'éphémère "Village de l'eau" quittent les lieux et se dirigent, à pied, à vélo ou en voiture, en direction de leurs points de rassemblement à 10 h à Vivonne (Vienne), à Poitiers-sud (Vienne) et à Saint-Maixent-l'École (Deux-Sèvres).
- 7 h 30
Départ de Chaunay, du convoi de la Coordination rurale en direction de Melle, sans tracteurs, car les convois sont interdits par la préfecture.
- 7 h
Les agriculteurs de la Coordination rurale se rassemblent pour un café, pour faire un point entre eux et décider des actions à mener aujourd’hui. Interrogé sur la possibilité de maintenir leur projet d’encerclement du "Village de l’eau", le président de la Coordination rurale de la Vienne François Turpeau, indique qu’il y a "trop de monde sur place", que "c’est trop dangereux pour nous d’encercler le village de l’eau".
- 6 h 30
La Coordination rurale tient un point presse dans une ferme de Chaunay dans la Vienne. La présidente nationale du syndicat, Véronique Le Floc’h est présente. Elle explique "être là, en soutien, pour sauver nos exploitations. On ne peut pas laisser ces black blocks, ces écoterroristes, s’attaquer à nos fermes." Le président de la Coordination Rurale de la Vienne, François Turpeau, explique être présent en soutien aux forces de l’ordre : "nous sommes là pour protéger nos fermes".
Il précise être prêt à agir pour protéger d’autres structures telles que des réserves de substitution en eau. Depuis tôt ce matin, la Coordination rurale indique que certains de leurs membres ont déjà été envoyés en reconnaissance près de la forêt de Saint Sauvant où se trouve le site d’un projet de bassines et autour du village de l’eau à Melle.