Dans la Vienne, des distributions de poules pondeuses réformées ont lieu régulièrement. Elles sont récupérées chez les éleveurs à la fin de leur carrière et vendues auprès de particuliers pour leur épargner de finir à l'abattoir.
Du camion s’échappe leur douce mélodie. Trois cents poules gloussent paisiblement, dans l’attente de leur nouvelle vie. Une par une, elles sont extirpées des boxes en plastique pour rejoindre des cartons ajourés, des cages grillagées avant de disparaître dans des coffres de voiture. Et s’en aller vers une retraite bien méritée après 18 mois passés dans des élevages à pondre des oeufs.
« Oh ! Mais, elles n’ont pas perdu leurs plumes », se réjouit l’un de leurs bienfaiteurs. « Pas du tout ! », confirme Doriane Lheudé, la salariée de « Poule pour tous » en charge de la distribution. « C’est le plus beau lot que nous ayons actuellement. »
En ce mardi froid de janvier, Doriane Lheudé a fait deux heures et demie de route depuis la Loire-Atlantique, siège de l’entreprise, pour arriver aux Roches-Prémarie-Andillé dans la Vienne. Elle a rendez-vous avec tous ceux qui ont réservé des poules.
« Un chien a mangé les poules de mes beaux-parents », raconte un autre bienfaiteur. « Je viens leur en racheter six. Elles coûtent 35 euros, c’est moins cher que sur les foires. »
Cela fait sept ans maintenant que « Poule pour tous », au départ association, maintenant entreprise, récupère des poules pondeuses bio ou de plein air chez les éleveurs du Grand Ouest pour les sauver de l’abattoir. Deux mille poules par semaine sont ainsi relogées chez des particuliers. Pour le plus grand plaisir de Doriane Lheudé, qui a le contact facile avec l’oiseau. « C’est plutôt plaisant de se lever le matin pour sauver des poules, plutôt que pour un travail ennuyant ! »
Daniel Mayllet a vu l’annonce dans la presse locale quelques jours plus tôt. « J’en prends trois pour commencer, car je n’y connais rien et j’ai un chien. Je ne sais pas s’ils vont bien s’entendre. »
Chez lui à Jaunay-Marigny, au nord de Poitiers, ce retraité a reconverti la cabane de ses filles, devenues grandes, en poulailler. « Quand nous avons vu l’article dans le journal qui annonçait qu’elles allaient être condamnées le 18 janvier, nous nous sommes dits : " pourquoi pas les sauver. " J’en avais envie depuis un petit moment et c’était le moment de franchir le pas. Le but, c'est qu’elle me fasse le ménage dans la pelouse. J’ai plein de mousse sur le terrain. »
Des nouveaux propriétaires aux petits soins
Daniel les sort une à une du carton. Les trois poulettes rousses prennent tranquillement possession de leur domaine. « Bah, elles n'ont pas l’air sauvages. » Le chien, un bon vieux Labrador récupéré à la SPA, apprend à faire connaissance. « Je vais chercher les graines ! Je ne sais même pas combien ça mange une poule ! » Daniel est déjà aux petits soins pour ses nouvelles protégées.
Elles vont s’appeler Charlotte, Caroline et Clémence, comme ses filles. Parce que les noms figurent toujours, 38 ans après la construction de la cabane, sur le fronton de ce qui est désormais un poulailler. Les poulettes vont pouvoir vivre trois ou quatre ans de plus et pondre un millier d’œufs chacune.
Chaque année en France, 50 millions de poules pondeuses finissent leur vie prématurément dans un abattoir. « Poule pour tous » organise une nouvelle distribution de poules pondeuses dans la Vienne le 6 février à Jardres et à Châtellerault. Les animaux seront à réserver une semaine avant sur le site internet de l’entreprise.