Pascal Wintzer, archevêque de Poitiers, publie un livre de réflexions et de suggestions pour réformer l'institution de l'église. Profondément ébranlé par les nombreux scandales sexuels qui ont été révélés ces dernières années, il espère un véritable changement de logiciel.
Il garde un ton calme, sans un mot plus haut que l'autre. Mais les mots sont forts. Monseigneur Wintzer archevêque de Poitiers vient de publier un livre dans la collection Tracts de Gallimard : "Abus sexuels dans l'Église catholique. Des scandales aux réformes". Ébranlé, comme l'ont été les fidèles et le grand public par les révélations de la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l'Église catholique, de dizaines de milliers d'abus sexuels commis par des hommes d'Église, l'archevêque de Poitiers souhaite voir les choses changer. "Il existe une espèce d'entre-soi au sein de l'église qui fait que certains prêtres peuvent se sentir au-dessus des lois". Pour lui, les silences ne peuvent plus être tolérés et les actes doivent venir, "les silences sont une forme de déni et la procrastination n'est pas une attitude responsable".
Une autorité qui n'agit pas devient complice.
Monseigneur Pascal WintzerArchevêque de Poitiers
S'il fait un constat accablant de la situation de l'église, il ne manque pas de proposer des solutions. Et d'abord dans le fonctionnement même de l'église.
Changer le statut des prêtres
Les prêtres comme les archevêques perçoivent un salaire plutôt bas chaque mois pour exercer leurs missions, mais ils n'ont quasiment aucune dépense. Pas de loyer à payer, ni de facture de chauffage. Mgr Wintzer propose de salarier les hommes d'Église. Pour les "responsabiliser" et les confronter aux réalités quotidiennes de leurs ouailles.
Il est temps aussi selon Pascal Wintzer de les soulager de certaines des tâches qu'ils doivent effectuer. "Je suis archevêque, mais je passe beaucoup de temps à être directeur des ressources humaines, organisateur de manifestations ou gestionnaire de biens immobiliers" explique-t-il. Selon lui, d'autres personnes, des laïcs pourraient accomplir ces missions et laisser ainsi aux hommes d'Église le temps d'accomplir leur mission et d'annoncer l'évangile.
Et pourquoi pas des hommes mariés ?
"Et pourquoi pas procéder à l'ordination d'hommes mariés ?" s'interroge-t-il. Une pratique qui serait une forme d'ouverture bénéfique pour l'église. Les laïcs doivent aussi être plus nombreux au sein de l'église préconise-t-il.
Pour que l'évangile soit mieux annoncé, des pratiques de l'église, même séculaires, doivent changer ou être abandonnées. Ce n'est pas bien grave.
Monseigneur Pascal WintzerArchevêque de Poitiers
La place des femmes dans l'église doit également augmenter, selon Mgr Wintzer. Pas en tant que prêtres, mais il estime leur présence nécessaire dans l'organisation de la vie de l'église." L'ouverture de l'église à des personnes de la société avec des compétences est nécessaire".
Les travaux de la Conférence des évêques doivent changer les choses
Depuis la publication du rapport de la Commission Indépendante sur les abus sexuels dans l'Église catholique, des groupes de travail ont été mis en place. On devrait connaitre leurs conclusions et préconisations d'ici à la fin du mois de mars. Pour Monseigneur Wintzer, les propositions doivent être à la hauteur de la gravité des faits. "Le cléricalisme est la source des maux de l'église", affirme-t-il, mais il a l'espoir que les choses évoluent. C'est aussi pour cela qu'il a écrit ce livre, au-delà de la forte émotion que les faits d'abus sexuels en masse lui ont provoquée. Il ne prétend pas détenir la vérité, mais souhaite voir l'église réagir et espère que sa voix sera entendue.
Je suis évêque, c'est vrai que j'ai une certaine autorité, je peux me tromper, je ne prétends pas savoir que faire en toute chose.
Monseigneur WintzerArchevêque de Poitiers