Paris et Londres sont tombés d'accord pour plafonner à 18% du capital la participation des Etats dans le groupe à naître dans la fusion entre EADS et BAE Systems. On ignore encore la position allemande.
EADS et l'indistriel britannique BAE Systems ont confirmé le 12 septembre qu'ils étaient en pourparlers pour se rapprocher et former ensemble le numéro un mondial de l'aéronautique et de la défense.La France possède 15% du capital d'EADS et entend les conserver, ce qui lui donnera une participation de 9% dans la nouvelle structure. L'Allemagne
a obtenu l'accord de ses partenaires pour monter elle aussi à 9% du capital. La Grande-Bretagne ne veut pas entrer au capital et cherche à limiter le poids des Etats dans la nouvelle structure pour ne pas compromettre son accès au marché américain de la défense, le plus important au monde.
La France n'a pas voulu renoncer au droit d'acquérir à l'avenir davantage de parts, même si l'état de ses finances ne lui en donne pas les moyens. Si l'Allemagne exerce son droit à monter à 9% du capital, le plafond sera atteint, empêchant ainsi la France d'accroître sa participation.
Les patrons des deux groupes, Tom Enders et Ian King doivent décider avec leurs conseils d'administration respectifs s'ils poursuivent leurs efforts en demandant un nouveau délai au régulateur britannique du marché ou s'ils les abandonnent. D'après des sources proches des négociations, les avancées seraient suffisantes pour demander une prolongation du délai.
Depuis que la nouvelle de leurs discussions a fuité dans la presse, les deux groupes ont fait face au scepticisme des marchés, à l'inquiétude de leurs actionnaires et aux réserves des gouvernements européens qui doivent approuver le rapprochement. D'après une source française proche du dossier, les trois capitales restent encore divisées: "il y a une ligne de partage assez nette entre une volonté britannique, partagée par Tom Enders, d'écarter les Etats, et une volonté allemande, partagée par les Français, de préserver le rôle des Etats".
La Grande-Bretagne dispose d'une action spécifique au capital de BAE Systems. La France et l'Allemagne exercent un contrôle sur EADS, grâce à un pacte d'actionnaires conclu à la création du groupe en 2000.
Ne pas effaroucher les Etats-Unis
Les trois gouvernements tentent depuis des semaines de trouver une formule qui préserve leurs intérêts sans effaroucher les Etats-Unis, marché clé pour le groupe combiné, qui devront approuver la fusion et se méfient de l'influence des Etats sur leurs fournisseurs. Londres se contente de l'action spécifique proposée aux trois capitales, qui leur permettra de s'assurer que l'entreprise reste européenne et d'empêcher toute prise de participation hostile. Elle cherche à contenir l'influence de Paris et Berlin.L'Allemagne souhaite également accueillir le siège du futur groupe, ce que refuse catégoriquement Tom Enders. Le patron d'EADS vient justement de délocaliser son quartier général à Toulouse, pour concentrer une direction jusque là éclatée entre Paris et Munich. Et il refuse tout ce qui pourrait ressembler de près ou de loin à une mainmise des Etats sur la gestion. Il pencherait visiblement pour que le siège de la nouvelle entité soit à Toulouse pour les activités civiles et à Londres pour le militaire.
"Les Britanniques ont fait un pas vers nous en proposant que la participation française soit maintenue et n'excède pas 10%, mais ça ne rendrait pas possible une acquisition de la participation de Lagardère", a expliqué la source française. "Ce qui pour nous n'est pas tout à fait convenable, puisqu'on ne peut pas se lier les mains. Ca interdirait à la France de récupérer la part de Lagardère", a-t-elle ajouté. Le groupe de media français Lagardère détient 7,5% du capital d'EADS et a fait savoir qu'il comptait les vendre. D'après des sources proches de la négociation, ce point ne constitue cependant pas un obstacle entre Français et les Britanniques à la réalisation de l'accord.