Les 230 salariés durement éprouvés de Spanghero attendaient inquiets, ce mercredi, un nouveau rendez-vous capital pour leur avenir et celui de l'entreprise. La réunion du CE a débuté en présence de l'administrateur judiciaire. Reprise ou liquidation, verdict dans quelques minutes.
Les représentants du personnel étaient convoqués à 15H pour un comité d'entreprise avec l'administrateur judiciaire.
A l'ordre du jour, deux questions brûlantes :
- L'administrateur a-t-il désormais entre les mains un dossier de reprise viable ?
- A quelles conditions ceux qui seront licenciés - peut-être tous - le seront-ils ?
La mairie a fermé ses grilles et les commerçants sont appelés à tirer leur rideau.
"C'est tendu", disait Jérôme Lagarde, secrétaire FO du CE quelques heures avant cette nouvelle échéance pénible, "il faut les comprendre: ça fait des mois qu'on nous balade".
La tension est telle que M. Lagarde disait n'être toujours pas sûr avant midi de la tenue du CE. L'administrateur, Christian Caviglioli, échaudé par la précédente rencontre du 28 mai à l'issue de laquelle lui et les représentants de Lur Berri ont été retenus par les salariés jusque tard dans la nuit, a réclamé des engagements écrits quant à sa sécurité.
L'espoir Laurent Spanghero
L'administrateur, tenu par les délais légaux, leur avait annoncé ce jour-là que, sans repreneur à la date du 19 juillet, ils seraient tous licenciés. Frappés par la foudre mi-février quand le gouvernement a désigné leur entreprise comme un acteur principal d'un scandale européen, certains d'avoir bien travaillé et d'être les victimes d'agissements qui leur étaient étrangers, les salariés avaient surtout très mal pris les mesures proposées par Lur Berri pour accompagner leur licenciement.
Elles étaient "méprisantes", selon eux.
Lur Berri, qui a racheté l'entreprise aux frères Spanghero en 2009 et revendique de l'avoir ramenée à l'équilibre avant le scandale, devrait en soumettre de nouvelles mercredi après-midi.
Les salariés attendent aussi d'entendre l'administrateur se prononcer sur les projets que d'éventuels repreneurs étaient censés lui transmettre avant midi.
Les salariés ont monté le leur tant bien que mal, mais sont sans illusion quant à ses chances. L'espoir d'un maintien partiel de l'activité repose donc grandement sur l'un des fondateurs de la société et membre de la grande famille rugbystique du même nom, Laurent Spanghero.
M. Spanghero, qui dit ne pouvoir se résoudre à laisser tomber ses anciens salariés, a indiqué mardi soir à l'AFP avoir réussi à boucler à temps un plan avec ses financements.
Son projet préserverait une centaine d'emplois. Il reprendrait toutes les activités de l'usine, mais dans des dimensions réduites, et y ajouterait une gamme végétale.
Le soutien d'un trois-étoiles audois et du conseil régional du Languedoc-Roussillon
Il bénéficie du soutien du chef audois Gilles Goujon, trois étoiles au Michelin.
Celui-ci lui a offert gratuitement son nom et son savoir-faire pour peser sur la décision et sauver le maximum d'emplois. Gilles Goujon lui apporterait des recettes de conserverie et prodiguerait les conseils du chef de cuisine à l'industriel.
De son côté, la Région Languedoc-Roussillon s'est engagée à aider à hauteur de 6.200 euros chaque emploi effectivement repris par un investisseur en 2013 et 2014.
"Par cet engagement, et consciente de la difficile situation vécue depuis plusieurs mois par les salariés, la Région entend préserver les emplois, les compétences reconnues du personnel et l'outil industriel de l’entreprise basée à Castelnaudary." affirme la Région.
Le scandale de la viande de cheval a "tué" Spanghero
Spanghero, qui revendiquait 360 salariés avant le scandale, n'en fait plus travailler qu'une cinquantaine, selon FO. L'entreprise ne s'est pas remise d'avoir été accusée mi-février d'avoir sciemment revendu du cheval à la place de boeuf à des entreprises produisant elles-mêmes des plats cuisinés comme des lasagnes pour de grandes marques ou de grands distributeurs.
Ses clients se sont massivement détournés. La société est en liquidation depuis avril avec maintien de l'activité pendant trois mois jusqu'au 19 juillet.
Un nouveau délai de grâce n'est pas à exclure mercredi, disent des proches du dossier. Mais "on ne pourra pas repousser (une décision) ad vitam aeternam", étant donné l'assèchement de la trésorerie et les délais légaux, dit l'une d'elles.