Inquiétudes et débats autour de l'avenir des hôpitaux de Saint-Affrique et Millau face à la construction du nouvel établissement de santé

Un hôpital commun devrait remplacer ceux de Saint-Affrique et de Millau dans l'Aveyron en 2028, mais les deux structures doivent rester opérationnelles pour des soins de proximité. Or un collectif dénonce une baisse des budgets de rénovation au profit du futur hôpital, ce que dément très fermement le directeur de l'Agence régionale de santé de l'Aveyron.

L'hôpital du sud Aveyron Millau-Saint Affrique devrait être livré en 2028 à Saint-Georges-de-Luzençon, mais d'ici là des travaux étaient prévus dans les hôpitaux de Saint-Affrique et de Millau. Des travaux d'entretien et de rénovation. Or, le collectif Le Manifeste s'inquiète d'un possible assèchement des budgets consacrés aux hôpitaux existants au profit du futur établissement.

Dans ce site nouveau, un certain nombre de services essentiels devraient être installés. Les deux hôpitaux existants devraient eux poursuivre leur activité afin de maintenir une offre de proximité. À Saint-Affrique par exemple, qui n'est pas situé à équidistance du nouvel hôpital, un SMUR devait être maintenu pour que les habitants puissent bénéficier d'urgences de proximité. À l'hôpital de Millau, une orientation gériatrie et réadaptation est programmée. 

Des budgets rénovation annulés ?

Les travaux de rénovation prévus dans les hôpitaux de Saint-Affrique et de Millau sont-ils aujourd'hui remis en question ? Henri Célié du collectif Le Manifeste en est sûr. Il affirme que les élus et les responsables de l'État n'ont pas anticipé certains coûts, notamment en termes d’équipement médical, ce qui les amène à renoncer à rénover les hôpitaux existants. 

"Le total de l'argent affecté sur l'immobilier, c'est-à-dire construction, rénovation, était de 80 millions d'euros répartis ainsi : 41,5 millions sur le bâtiment nouveau, 9,8 millions sur la rénovation de Millau et 4,5 sur celle de Saint-Affrique, dit-il. C'est une sorte de garantie qui était donnée, parce que ça prend un certain temps de construire un nouveau bâtiment, ils n'arrêtent pas de repousser les délais (...). 
Or, ils n'avaient absolument pas prévu, ce qu'on avait dénoncé dès 2019, tous les équipements de dernière génération".

Défaut d'entretien au bloc

La décision aurait été prise d'après lui de sacrifier la rénovation des hôpitaux de Millau et Saint-Affrique au profit de la construction et de l'équipement du nouvel hôpital. Décision qui daterait du dernier comité de pilotage début avril. Henri Célié déplore qu'aucune concertation n'ait eu lieu. À ses yeux, les deux hôpitaux existants sont menacés. 

"Ils remettent totalement en cause ce qui pourrait subsister, ce qui devait subsister au moment des décisions qui ont été prises dans les deux établissements anciens, argumente-t-il. On voit une menace très claire. Par exemple, à Saint-Affrique aujourd'hui, il y a trois salles de blocs. La première est réservée aux d'urgence, césariennes, etc. La deuxième servait beaucoup aux médecins pour l'ambulatoire, c'est-à-dire quand il n'y a pas d'anesthésie importante à faire. Mais comme elle n'est plus entretenue... il faudrait remettre la ventilation parce qu'elle n'est plus aux normes, la ventilation existante a été démontée. Donc les médecins sont coincés".

"Il y a 10 jours, 4 personnes devaient être opérées de la cataracte. L'ophtalmo avait demandé d'avoir plus de disponibilité de la salle parce qu'il peut doubler facilement ses capacités de travail. Du coup, réduire par deux les délais d'attente. C'est un des enjeux importants. Et bien, il avait 4 patients qui devaient passer. On lui a dit "il faut sortir de la salle numéro 1 parce qu'il y a une césarienne qu'il faut faire en urgence". Donc, ses 4 patients sont retournés à la maison".

Des millions investis

L'ARS conteste absolument cet état de fait. Qu'il puisse y avoir des problèmes, Benjamin Arnal, directeur de l'ARS Aveyron, ne le nie pas, car il connaît la vétusté des établissements et leur besoin de rénovation. Mais justement, dit-il, les hôpitaux de Millau et Saint-Affrique investissent. "Ils ont une enveloppe pour investir. Ils peuvent faire des arbitrages et on leur donne énormément d'aides. Mais, avec des problèmes de trésorerie, ils ne peuvent pas toujours investir autant qu'ils le voudraient. Néanmoins, ils ont quand même des enveloppes d'investissement. Et ils font de l'entreprise. Ils font de l'entretien, ils font de la réparation, etc". 

"Il y a des centaines de milliers, et puis maintenant sur les années cumulées, des millions qui ont été donnés par l'État sur l'investissement du quotidien, poursuit-il, des enveloppes d'investissement pour le matériel qui ont permis de renouveler des choses qui ont pu être très utiles... Sur l'imagerie, il y a eu du renouvellement à Millau, à Saint-Affrique récemment, sur des échographes, des mammographes. Et puis, le projet de radiologie privée à Saint-Affrique avec l'autorisation d'un scanner et demain, le privé qui portera une IRM... C'est quand même des choses extraordinaires pour un bassin de population comme on a là-bas. Donc, il y a de l'investissement qui continue à se faire et de l'entretien".

"Il y a aussi des choix qui peuvent être faits au niveau de l'établissement. Il y a des soutiens, mais le but, ce n'est pas de faire un bloc neuf non plus, alors que dans les prochaines années, il y a un hôpital commun qui sort de terre. Dans ce cas, qu'est-ce qu'on va nous dire ? Vous ne pouvez pas faire l'hôpital commun parce que vous mettez tout pour construire une nouvelle maternité, un nouveau bloc".

Pour autant, Le Manifeste estime que l'état des deux hôpitaux est en train de se détériorer grandement. Le collectif demande par exemple comment les urgences vont pouvoir être maintenues à Saint-Affrique qui dessert une zone dans laquelle les habitants sont parfois à plus d'une heure du nouvel hôpital.

"La promesse qui a été faite aux habitants par les maires, c'était le maintien d'un système à trois pôles. Le pôle commun, plus les deux pôles existants qui étaient rénovés, explique Henri Célié. La disparition des deux pôles locaux de proximité, c'est un gros enjeu. Pour les usagers, la proximité est quelque chose d'important. Pour les Saint-Affricains, il y a des habitants qui étaient déjà à 45 minutes, qui passent à plus d'une heure de l'hôpital. Donc, les 30 minutes d'accès, qui sont une des conditions d'avoir des chances au niveau de la santé, sont loin d'être réalisées". 

Il n'y aura pas trois hôpitaux neufs mais les autorités ont la volonté de maintenir et même de renouveler complètement, afin d'avoir à terme un hôpital partout.

Benjamin Arnal, directeur de l'ARS de l'Aveyron

Pour la question de la distance, le directeur de l'ARS mentionne qu'il y aura entre 10 minutes, voire un quart d'heure de plus entre l'hôpital de Saint-Affrique et Saint-Georges-du-Jeanson.

"On peut dire que tout ça compte, mais il vaut mieux une santé de qualité et rapidement, plutôt que de se retrouver dans une situation difficile aussi sur le point de vue des ressources humaines", explique-t-il.

"Et ça, ce n'est pas le sud Aveyron uniquement. Que ce soit sur les spécialités de gynécologie, d'urgence, d'anesthésie, où là, on a deux hôpitaux en miroir, il faut pouvoir aussi avoir une vraie équipe consolidée qui fonctionne. Il n'y aurait rien de pire que d'avoir deux services, finalement, je ne sais pas, d'urgence vitale, deux SMUR de services d'urgence, derrière lesquels il n'y a pas d'urgentistes disponibles".

Benjamin Arnal affirme que le comité de pilotage cité par Henri Célié n'a en aucun cas entériné un arrêt des investissements en direction des hôpitaux existants. Dans ce comité siègent notamment l'État, l'ARS, la Région, le Conseil départemental, les maires de Saint-Affrique et Millau.

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