Une étude met en lumière une réalité inquiétante : selon la Drees, sur une période d'observation de 30 ans, près de la moitié des infirmières quittent le métier après 10 ans de carrière à l'hôpital. Une partie se tourne vers le libéral ou préfère tout simplement changer de métier. Rencontre avec deux infirmières : une en reconversion et une étudiante.
La carrière des infirmières hospitalières est de plus en plus courte. Selon une récente étude, une infirmière sur deux quitte l’hôpital ou change de métier. 11 % n’ont plus d’emploi 10 ans après leur premier poste.
Sandrine Bioret, infirmière en reconversion
C’est le cas de Sandrine Bioret. Après 5 années à travailler l’hôpital puis 5 années supplémentaires en libéral et un burn out, elle a décidé de jeter l’éponge. “D’abord j’ai remis en question mon métier, puis moi et j’ai fini par comprendre que ce n’était pas moi qu’il fallait remettre en question mais plus l’institution et la médecine conventionnelle de nos jours”, confie-t-elle. “Nous sommes en première ligne de la souffrance des gens. Et nous, ce que nous voulons c’est que les gens soient bien et nous faisons tout pour ça, mais à côté de ça, nous sommes tiraillés par une cadence, des attentes et des médecins très stressés.”
J’ai fini par comprendre que ce n’était pas moi qu’il fallait remettre en question mais plus l’institution
Sandrine Bioret, infirmière en reconversion
Face à ces mauvaises condition de travail, un salaire peu attractif et un manque de personnel constant, Sandrine Bioret décide de quitter le métier de ses rêves il y a 5 ans. Aujourd’hui, elle étudie la naturopathie pour garder un lien avec le patient. “Pour moi c’est dans la même lignée”, précise-t-elle. “La naturopathie c’est une façon de soigner naturellement les patients.”
Depuis des années, les syndicats alertent sur ces démissions en cascades. Face à la pénurie de personnel, ils réclament un plan Marshall. “Aujourd’hui, le personnel de santé travaille beaucoup plus qu’avant, dans des conditions déplorables, avec des rappels sans cesse parce qu’il manque du personnel”, alerte Pascal Mazet, le secrétaire départemental de la CGT Santé en Aveyron. “C’est le serpent qui se mord la queue. Aujourd’hui le personnel n’en peut plus et souvent, très souvent, il démissionne complètement.”
Zohra Guendouzi, étudiante infirmière
Bien consciente de la réalité du métier, Zohra Guendouzi ne regrette pas son choix. Elle est étudiante en première année d’école d’infirmière à Rodez. “Je me retrouve pas là par hasard, c’est quelque chose que j’ai choisi, que j’ai réfléchi”, argue l’étudiante. “Ce métier a des avantages que j’estime supérieurs aux inconvénients et qui me poussent à continuer ma formation et à aller jusqu’au bout. C'est un métier plein de sens, très riche humainement. On donne beaucoup mais on reçoit aussi beaucoup. C'est aussi très varié comme travail.” Après avoir tenté médecine à l’étranger et une autre carrière dans laquelle elle ne s’épanouit pas, elle décide de se lancer à 36 ans car la santé est pour elle une vocation. Zohra Guendouzi ne sait pas encore si elle fera toute sa carrière à l’hôpital.
En l’espace de 20 ans, les hôpitaux aveyronnais ont perdu 30 % de leurs lits.
Ecrit avec Lara Dolan.