C'est une demande du gouvernement à l'échelle nationale. Zoom sur la préparation de cliniques privées de la région Occitanie. Si des dizaines de lits sont vidés, le travail des équipes est double : s'occuper des patients présents, et préparer l'établissement aux cas à venir, atteints de Coronavirus.
"Ne venez pas. Pour vous protéger, et protéger nos patients". C'est la réponse de Gérard Reysseguier, directeur de la clinique toulousaine Rive Gauche, quand on lui demande si l'on peut se rendre sur place pour raconter la préparation de son établissement à l'épidémie de Coronavirus. S'il refuse que nous prenions des risques, son équipe en prend tous les jours. Bien que Rive Gauche soit spécialisée en maternité (4 000 accouchements par an), la clinique, comme toutes les autres en France, doit être prête à faire face à des cas de Coronavirus.
Pour cela, l'établissement a commencé, lundi dernier, à libérer un étage entier. Le 5e. Ce qui correspond au service de chirurgie vasculaire et cardiologie : 26 lits sont actuellement vides, prêts à recevoir les patients atteints du Coronavirus. Parmi eux, 16 lits scopés (équipés d'instruments de monitoring) et 4 lits de soins intensifs. Pour ce faire, toutes les interventions ont été déprogrammées, les patients ont été prévenus dans le week-end.
On faisait environ 120 à 130 interventions par jour. Désormais, on en fait une dizaine, détaille Gérard Reysseguier.
[ COVID-19 ]
— Clinique Rive Gauche (@Clin_RiveGauche) March 20, 2020
Dernières informations liées aux mesures de précaution au sein de la clinique Rive Gauche.
Merci de respecter ces consignes. pic.twitter.com/DZd6dytp8h
Ces 26 lits serviront dans deux cas de figure : pour les mamans atteintes du Coronavirus qui auront accouché à Rive Gauche, et pour les patients envoyés par le CHU de Purpan qui n'aura pas la place de prendre en charge toutes les demandes. Ces patients ne seront, à priori, pas des cas de Coronavirus (traités en priorité à Purpan puisque les cliniques comme celle de Rive Gauche ne dispose pas de service de réanimation). "Mais si un enfant qui s'est fait mordre par son chien par exemple, se révèle positif au coronavirus, alors on doit pouvoir l'isoler". Un travail titanesque. "Les chambres doivent être à pression 0, il ne faut pas que l'air de la chambre passe à l'extérieur", précise Gérard Reysseguier. Et d'ajouter :
Il faut que le circuit de climatisation ne soit pas relié au circuit de climatisation de l'ensemble de l'établissement. Il faut presque que la chambre soit en dépression. Ca demande beaucoup, beaucoup de travail aux équipes. Beaucoup de travail, beaucoup de pression.
Le directeur de la clinique Rive Gauche nous montre en appel vidéo donc, la préparation de son établissement, un étage entier (vide pour l'instant) prêt à accueillir des malades :
Le directeur de la clinique Rive Gauche est préoccupé par une propagation rapide et forte de l'épidémie.
Au vue de l'expérience qui se passe dans le Grand Est notamment, on s'y prépare tous et on nous a demandé à tous de préparer un secteur pour recevoir et affecter les patients infectés, raconte-t-il.
A la clinique des Minimes, priorité à la protection des patients déjà sur place
Le directeur de la clinique des Minimes à Toulouse, Pierre-Yves De Kerimel, fait part d'un dispositif des plus minutieux. Dans cette clinique, les services assurent des soins à des patients hautement à risque : leur moyenne d'âge est de 84 ans. Les retours à domicile ont été accélérés depuis le week-end dernier pour permettre de libérer des lits du pôle gériatrie du CHU de Toulouse, spécialité de l'établissement. Concrètement, Purpan envoie à la clinique des Minimes ses patients en gériatrie pour pouvoir s'occuper des cas de Coronavirus.
En trois jours, on a signé 15 sorties et intégré 12 patients du CHU de Toulouse, ce qu'on fait normalement en au moins deux semaines puisque le temps de rotation est faible ici, une hospitalisation dure en moyenne 34 jours.
Depuis mercredi la clinique sectorise ses bâtiments en deux unités : 14 lits pour la médecine et 29 lits pour les unités de soin et de réadaptation. Autant de places disponibles pour accueillir les patients du CHU de Purpan. "Et le CHU va très vite être saturé. Entre le 5 et le 10 avril. Quand il sera plein, on devra récupérer les malades dans des unités dédiées" précise le directeur de la clinique des Minimes, qui a donc libéré un maximum de places. Il explique qu'il y a eu un gros travail pour rendre étanche ces chambres. "Les équipes travaillent deux fois plus, avec un soucis constant de protéger notre personnel et de pouvoir les équiper pour qu’ils se protègent. On leur demande un auto-contrôle, une prise de température systématique avant de venir par exemple", détaille-t-il.
Il ne faut surtout pas que le virus entre chez nous, s'inquiète Pierre-Yves De Kerimel, directeur de la clinique des Minimes, spécialisée en gériatrie.
Par exemple, les chariots qui distribuaient jusqu'à présent les repas dans tous les couloirs de l'hôpital seront désormais divisés en deux : ceux qui se rendent dans les chambres de patients atteints du Coronavirus et les autres. La vaisselle sera à usage unique. Le directeur de cette clinique suit à la lettre les instructions du guide du ministère de la Santé qui s'intitule : "préparation à la phase épidémique du Covid 19". Ce document de 47 pages explique aux établissements, en fonction de leurs spécificités, la marche à suivre.
Surtout, comme beaucoup de professionnels de santé, Pierre-Yves De Kerimel s'inquiète du manque de matériel, notamment des masques, déjà trop peu nombreux. En revanche, il salue la coordination de tous les établissements de Toulouse.
A Montpellier, 2 cliniques privées sont réquisitionnées
Il s'agit de la clinique du Millénaire et de la clinique de Parc à Castelnau-le-Lez.
18 lits en réanimation sont sanctuarisés dans le quartier du Millénaire à Montpellier, autant dans une autre clinique privée, située dans la métropole à Castelnau. Même si chaque lit de réanimation est lourdement équipé, cela semble peu pour une métropole de 460.000 habitants.
Tous les patients qui vont être hospitalisés ne vont pas relever de la réanimation. Ceux qui ont des symptômes bénins rentrent à la maison, parmi ceux qui ont besoin d'être hospitalisés, seuls 25% à 30% des patients ont besoin d'aller en réanimation" Yves Calvet, médecin réanimateur et coordonnateur cellule de crise Hérault.
En fait, en ce moment, dans le privé comme dans le public, c'est plutôt la pénurie de petit matériel qui angoisse le personnel soignant. Le manque de masques de protection reste très problématique. Les réserves sont maigres, à peine de quoi tenir 3 à 4 jours.
Si on reste sur les consommations actuelles, c'est à dire si on ne reçoit pas énormément de patients Covid-19 pendant le week-end, on peut tenir jusqu'à dimanche soir, lundi en se rationnant fortement" Pierre Dejeans, directeur de la clinique privée de Castelnau-le-Lez.
L'Hérault reste le département d'Occitanie le plus touché avec 74 personnes hospitalisées à la date du 22 mars
A Albi, la clinique accueillera des patients en soins de suite
La clinique d'Albi, qui appartient au même groupe que celle de Castelnau-le-Lez, va mettre ses infirmirères à disposition du CHU de Toulouse et acccueillera des patients atteints de coronavirus en soins de suite, une fois sortis de réanimation.