Entre 18 et 24 mois de prison avec sursis, 15 000 euros d'amende, et une peine d'inéligibilité de cinq ans ont été requis ce jeudi contre Brigitte Barèges. La maire (LR) de Montauban était jugée pour détournement de fonds publics et emploi fictif par le tribunal correctionnel de Toulouse.
Une audience fleuve, très dense. Débutée à 8h30 ce jeudi matin devant le Tribunal correctionnel de Toulouse, les débats ne s’achèveront qu’à 23h30. A l’intérieur de la salle, la tension est palpable. Distanciation sociale, masques obligatoires, le protocolaire sanitaire s’impose aussi à la Justice. Les prévenus se connaissent bien, ont tous travaillé ensemble et désormais s’affrontent. Il y a Brigitte Barèges bien sûr. Tailleur marron, le regard décidé, prête à entrer dans l’arène. Aux journalistes venus suivre le procès, elle ne dira pas grand-chose. Le Maire de Montauban admet juste avant l’audience, qu’elle se sent “ un peu humiliée surtout en tant qu'ancienne avocate de passer de l'autre côté ".
Articles élogieux
Si Brigitte Barèges est devant les juges, c’est parce qu’elle est soupçonnée d'avoir utilisé l'argent de la mairie à des fins personnelles. Le tout, grâce à un système d'emploi fictif mis en place entre 2012 et 2013. Selon l’accusation, il consistait à rémunérer un agent municipal (Jean-Paul Fourment) pour qu'il écrive des articles élogieux pour l’édile, dans un journal départemental, le “Petit Journal ”. Le tout en pleine campagne électorale. En clair, d’avoir utilisé l’argent public pour faire la promotion d'un candidat, ce qui est interdit par la loi.
“Il n’y a pas d’emploi fictif”
Accusation qu’elle va rejeter tout au long de cette audience-marathon. Secouant à maintes reprises la tête pour bien signifier son désaccord, n’hésitant pas à interrompre les autres prévenus, à interpeller le président du tribunal correctionnel, Romain Bonhomme. “C’est faux ! “ répète-t-elle plusieurs fois à l’audience. “ C’est mon intégrité qui est en cause “, dénonçant une affaire “ politique “, instrumentalisée par l’opposition de gauche.
Son avocat Maître Laurent De Caunes, va dans le même sens. “ Il n’y a pas d’emploi fictif. Fourment a été manipulé par des opposants politiques. Cette affaire ne tient pas ” soutient le célèbre avocat toulousain. Rappelant qu’il y a une vraie “ difficulté entre communication politique et institutionnelle “.
Réquisitoire lourd
Une défense qui n’a pas convaincu le procureur qui prononce un réquisitoire particulièrement lourd à l’égard de Brigitte Barèges. Laurent Couderc réclame une peine de prison de 18 à 24 mois avec sursis, une amende de 15 000 € et surtout une inéligibilité de 5 ans avec exécution provisoire. Une véritable épée de Damoclès au-dessus de la tête de la Maire LR de Montauban. Car si le Tribunal suit les réquisitions du Procureur le 9 février prochain, la condamnation entrera immédiatement en vigueur. Brigitte Barèges pourrait alors perdre ses mandats. Moins d’un an après sa réélection aux municipales.
L’affaire éclate en 2014
Trois autres personnes sont poursuivies dans ce dossier : à commencer par Jean-Paul Fourment, l’ex-chargé de communication du Maire de Montauban et ancien directeur de campagne, poursuivi pour détournement et recel de fonds publics.
C’est lui qui a révélé l’affaire en 2014, soutenu par deux opposants socialistes. Juste avant les élections municipales. Selon ses dires, c’est bien Brigitte Barèges qui était son donneur d’ordres. A la barre, Jean-Paul Forment se défend. "Je travaillais jour et nuit. J’étais en burn-out ". Il insiste : “C’est Brigitte Barèges qui me passait commandes des articles, des thèmes à traiter”. Des articles qui étaient tous validés avant publication par l’élue. “ Pour moi il n’y avait rien d’illégal, ces articles s’inscrivaient dans le cadre de mon travail de communiquant. J’ai été négligeant” explique-t-il. “ Des articles pro-Barèges… j’ai été instrumentalisé pendant 15 mois” martèle-t-il.
Deux autres prévenus dans le box
Face à celui qu’elle décrit comme un "ancien ami", Brigitte Barèges se défend. Evoque des publi-reportages, un travail classique de communication institutionnelle où l’on relaye l’actualité d’une commune.
Aux yeux du Procureur pourtant, Jean-Paul Fourment porte une responsabilité dans cette affaire. A son encontre il réclamera de 10 à 12 mois de prison avec sursis et 30 000 euros d’amende.
Restaient deux autres prévenus dans le box des accusés. Alain Paga, le Directeur de la publication du “Petit journal”, poursuivi pour recel de détournements. A son encontre, le magistrat a requis 12 mois de prison avec sursis et 35 000 euros d’amende.
L’ancien directeur de cabinet, blanchi ?
Enfin, Stéphane Bensmaine, l’ancien directeur de cabinet de Brigitte Barèges. Pour l’instant le grand gagnant de cette audience. L’accusation lui reproche d'avoir été complice du détournement de fonds publics. Notamment par le biais du recrutement et l'organisation des missions de Jean-Paul Fourment. Le Procureur de la République n'a pas été convaincu de sa responsabilité dans ce dossier, faute d'éléments.
Le tribunal correctionnel de Toulouse rendra son jugement le 9 février 2021.