Trois ventes aux enchères prévues à Albi, Foix et Rodez qui comprenaient des objets nazis ont provoqué une polémique. Certains de ces objets ont été retirés des catalogues, d'autres ont été partiellement masqués sur internet. La loi n'interdit pas la vente de tels objets mais en punit l'exposition.
C'est un internaute parisien qui a donné l'alerte, notamment auprès de certains médias. Révolté, semble-t-il, de découvrir des objets nazis proposés à la vente.
Drapeaux, éléments d'uniformes, insignes et emblèmes nazis : voilà ce que trois commissaires-priseurs d'Albi, Foix et Rodez, proposent - ou proposaient - à la vente. Certains les ont d'ores et déjà retirés des catalogues. Maître Hervé Legroux, de l'hôtel des ventes de Rodez, lui, se dit dans son bon droit et maintient son catalogue en l'état : "Je suis conforme à la loi. Si je le fais, c'est que j'ai le droit de le faire. Je ne comprends pas que l'on puisse provoquer la polémique à ce sujet. Cela appartient à l'Histoire. On en trouve partout, notamment dans les musées".
Vente autorisée mais...
Et c'est vrai. La loi française n'interdit pas la vente d'objets nazis et pas davantage de les détenir, voire de les collectionner (article R645-1 du code pénal). Ce qui est proscrit en revanche, c'est leur exposition, leur exhibition. Le port de l'uniforme SS, par exemple, n'est possible que pour les besoins d'une exposition à caractère historique, ou d'une oeuvre artistique, comme un film ou une pièce de théâtre.
S'agissant des ventes, l'exposition étant interdite, c'est donc par description seulement que ces objets peuvent être proposés.
"Malsain et scandaleux"
Mais pour Franck Touboul, président du CRIF (conseil représentatif des institutions juives de France) Midi-Pyrénées, cela relève de l'hypocrisie. "La réalité est que ceux qui achètent ces objets ont une certaine forme de nostalgie et une fascination pour cette époque. Oui, ces commissaires priseurs ont le droit de les vendre mais il y a une véritable hypocrisie. Il suffit de mettre une simple pastille au centre d'une croix gammée pour pouvoir les mettre en vente. En quoi est-ce important pour l'histoire de mettre en vente une boîte de Zyklon B [selon la personne qui a alerté sur ces ventes, une boîte de Zyklon B était à vendre mais a été retirée du catalogue, NDLR] ?"
Il y a ce qui relève du droit et ce qui relève de l'éthique et de la morale aussi bien pour les Juifs que pour notre pays. Souvent, à côté de la vente de ces objets nazis, on trouve des images du Maréchal et du régime vichyste. Ces ventes participent à ce que l'on nomme l'"Anti-France". Tout cela est malsain et scandaleux.
Des précédents
Le président du CRIF Midi-Pyrénées demande à ce que ces ventes soient mieux encadrées, que ces objets ne servent que pour des fins cinématographiques ou à portée pédagogique. "C'est pour cela que j'en appelle aux forces progressistes de gauche comme de droite afin de se saisir de ces pratiques inacceptables".
En avril 2020, une polémique similaire avait vu le jour, après qu'un célèbre site de vente en ligne ait proposé des objets nazis. Des historiens s'étaient émus de cette vente, qu'ils percevaient comme une "injure faite à toutes les victimes de la barbarie nazie". Quelques années plus tôt, en 2014, le CRIF et le bureau national de vigilance contre l'antisémitisme avaient demandé l'annulation d'une vente aux enchères d'objets ayant appartenu à Adolf Hitler et Hermann Goering, à Paris.