Les maires et associations mobilisés contre l'épandage des pesticides près des habitations viennent de remporter une bataille. Mardi 12 mai, devant le Conseil d’État, le ministère de l’Agriculture s'engagé à retirer de son site internet les textes sur la réduction des distances d’épandage.
Dans le bras de fer autour de l'épandage des pesticides qui oppose certains maires -soutenus par des associations de consommateurs et de protection de l'environnement- à l' 'Etat, une nouvelle partie vient de se jouer.
Le ministère de l’Agriculture a décidé mardi 12 mai de retirer de son site internet les textes sur la réduction des distances d’épandage encore plus près des lieux habités. Cette décision a été annoncée devant le Conseil d’État, qui examinait le recours de neuf associations (dont Générations Futures, UFC-Que choisir, France Nature Environnement et la LPO) contre le ministère.
C'est une première victoire, le ministère de l'Agriculture s'est fait taper sur les doigts !
Olivier Gourbineau, coordinateur de France Nature Environnement LR, se réjouit de cette décision du Conseil d'Etat: "cela prouve que cette démarche était illégale".
Des distances de sécurité constestées
Au premier janvier 2020, après plusieurs mois de polémique, de nouvelles distances de sécurité avaient été instaurées entre les zones traitées avec des produits phytopharmaceutiques par les agriculteurs et les lieux d'habitation.Un arrêté avait instauré des limites de 20 mètres, 10 mètres ou 5 mètres, variant selon les cultures, les produits et le mode d'administration utilisés (5 mètres pour les cultures dites basses comme les légumes et céréales, 10 mètres pour les cultures hautes, fruitiers ou vignes, par exemple).
Dès son annonce, cet arrêté avait fait hurler les deux camps : les associations de protection de l'environnement le jugeant insuffisant; les agriculteurs, trop contraignant, car susceptible de leur faire perdre l'exploitation de vastes zones de culture.
Le coronavirus brouille les cartes
Le décret du 27 décembre prévoyait aussi des dérogations dans le cadre de "chartes d'engagement départementales", proposées par les utilisateurs de produits phytosanitaires et validées par les préfets après avoir été soumises à concertation publique.
Mais la crise du Coronavirus a fait changer la donne. Constatant que le Covid-19 empêcherait ces consultations du public, le ministère de l'agriculture avaient assoupli ces conditions en février et mars : il prévoyait la simple intention de présenter une telle charte ouvrait droit aux dérogations, en raison du confinement.
Comment l'Etat peut-il s'asseoir aussi facilement sur ses propres textes ?
s'est demandé François Lafforgue, avocat des 9 associations, lors de l'audience du 12 mai, à Paris.
Selon Maître Lafforgue, il y aurait "presque une volonté de ne pas prendre de mesures protectrices, car au printemps on est en pleine période d'épandage pour les semis."
Première charte dans l'Hérault
Ces chartes d'engagement dérogatoires ont déjà été validées dans 25 départements, l'Hérault en tête via la chambre d'agriculture.
"Nous constatons que les auteurs de la charte n’ont jamais considéré les associations de riverains comme de défense de l’environnement comme des partenaires qu’il fallait intégrer à leurs réflexions. La charte ne contient aucun engagement des utilisateurs de pesticides pour réduire les impacts sur la santé des riverains si ce n’est l’engagement à respecter la réglementation." déplorait Simon Popy, président de FNE LR.
En raison du déconfinement qui a commencé lundi 11 mai, le ministère de l'Agriculture estime que désormais toute cette procédure dérogatoire n'avait plus lieu d'être.
Le juge des référés, qui a estimé que cette dernière annonce devrait être formalisée par le ministère, devrait rendre sa décision d'ici la fin de la semaine.