Les spécialistes des maladies infectieuses et tropicales constatent chaque année plus de cas de dengue en France hexagonale, notamment dans les départements du littoral de la Méditerranée. Les cas autochtones sont surveillés de près afin d'éviter la circulation épidémique du virus puis à terme son installation endémique.
Habituellement absente de France métropolitaine, la dengue est une maladie infectieuse à déclaration obligatoire depuis 2006. Chaque cas signalé, qu’il soit importé ou autochtone, entraîne une investigation sanitaire.
Toujours plus de cas chaque année
Rien qu'en 2022, 66 cas de transmission autochtone de dengue ont été identifiés en France continentale, dont 52 en PACA et 12 en Occitanie, dans le Gard et les Pyrénées-Orientales alors que seulement 48 cas au total avaient été rapportés entre 2010 et 2021.
Les cas importés en France métropolitaine varient selon les années et les déplacements vers les zones infestées. 378 en 2022 et déjà 1.099 en 2023, majoritairement en lien avec les épidémies en cours dans les territoires ultramarins, notamment en Martinique et en Guadeloupe.
Pour 2023, 18 cas autochtones sont enregistrés en Occitanie pour la période de mai à mi-septembre. Chaque année, il y a de plus en plus de cas, notamment autochtone. Le dérèglement climatique et la hausse des températures autour de la Méditerranée y sont pour beaucoup. Et les spécialistes prévoient une progression quasi inéluctable des cas de dengue, de chikungunya et de Zika dans les années à venir.
L'augmentation des cas et particulièrement des cas autochtones est due à la progression de la population des moustiques qui sont les vecteurs de l'infection. La recherche et la déclaration systématique des cas jouent aussi.
Charlotte Boullé, infectiologue au service maladies infectieuses et tropicales du CHU de Montpellier
Vers une maladie "épidémique" en métropole ?
Pour l'infectiologue, les cas locaux sont liés aux cas importés. "Pour qu'une personne n'ayant pas séjourné dans une zone à risque soit infectée, il faut qu'elle ait été piquée par un moustique contaminé, donc qu'il ait au préalable piqué une personne porteuse du virus, autochtone ou importé, à proximité, car le moustique n'évolue pas dans un rayon de plus de 100 à 300 mètres."
D'où l'importance pour les voyageurs revenant des Caraïbes, de la Guyane et de La Réunion, symptomatiques ou non de la maladie, de se prémunir des piqûres de moustique durant 15 jours après leur retour, pour éviter la transmission du virus.
Notre crainte, c'est qu'avec la progression de l'installation du moustique tigre en France métropolitaine, la dengue ne circule de façon épidémique chaque année et au final devienne une maladie endémique.
Charlotte Boullé
En France, un vaccin contre la dengue est autorisé mais son utilisation est rare.
Il existe en fait quatre sérotypes ou genre de dengue. Les études montrent que les cas de dengue secondaire, c’est-à-dire d’infection par un autre sérotype après un premier épisode d'infection, sont plus sévères. Cette particularité, fait que bien qu’il existe un vaccin, son utilisation est difficile et il n’est actuellement autorisé que chez des patients ayant un antécédent documenté d’infection par le virus de la dengue.
Cinq nouveaux cas de dengue autochtone
Après le signalement de deux cas autochtones de dengue dans le Gard, à Rochefort-du-Gard et Gagnières, le 19 septembre dernier, une enquête a été menée en porte à porte. Les équipes de l’ARS Occitanie et de Santé publique France ont interrogé des résidents concernés ce qui a permis d’identifier cinq nouveaux cas de dengue, le 22 septembre. Leur état de santé n’inspire pas d’inquiétude.
D’autres cas suspects, relevés au cours de ces enquêtes, sont toujours en cours d’investigation.
Trois opérations de démoustication
Une première opération de démoustication a donc été effectuée dans la nuit du 22 septembre, par la société Altopictus, à la demande de l’ARS Occitanie. Face à ces cas groupés sur une zone géographique réduite, l’opération de démoustication ciblée a été renouvelée deux fois (les 25 et 28 septembre).
Ces opérations visent à détruire tous les moustiques implantés à proximité des lieux de vie des personnes infectées, pour éliminer des moustiques tigres éventuellement contaminés, après avoir piqué l’une des personnes malades.
Les symptômes de la dengue
Tous les habitants de secteurs concernés qui présenteraient des signes cliniques évocateurs d’une infection de dengue, sont appelés à consulter rapidement leur médecin traitant.
Les symptômes évocateurs sont, en l’absence d’autre diagnostic établi :
- une fièvre élevée (>38,5°C) d’apparition brutale
- associée à au moins un autre signe clinique tel que des maux de tête, des douleurs musculaires ou articulaires ou lombaires
- en l’absence de toux, écoulement nasal, maux de gorge, difficultés respiratoires ou plaies infectées.