Grippe aviaire : réactions de la filière avicole après l'annonce d'un plan d'aide de 90 millions d'euros

Le ministre de l'Agriculture l'a annoncé mardi soir : le gouvernement prévoit de mobiliser 90 millions d'euros pour indemniser les professionnels qui ont subi des pertes d'exploitation en raison de la grippe aviaire, notamment les éleveurs du canards du Sud-Ouest. Réactions.

"C'est une première étape" pour le ministre de l'Agriculture, Julien Denormandie. Il a acté mardi, à l'issue d'une réunion avec les acteurs de la filière, un plan d'indemnisation de 90 millions d'euros pour les professionnels du monde avicole ayant subi cette année des pertes d'exploitation en raison de la grippe aviaire. "Le montant final" de ce plan "sera probablement plus élevé", d'après le cabinet du ministre.

Une partie des fonds débloqués rapidement        

Une partie des fonds doit être débloquée rapidement pour soutenir tous les maillons de la chaîne de production (accouveurs, éleveurs, industriels) dont l'activité a été perturbée par l'influenza aviaire (communément appelée grippe aviaire) qui a sévi cet hiver, entraînant l'abattage de plus de 3,5 millions de volailles (essentiellement des canards) et des arrêts prolongés de production.

Cette indemnisation des pertes économiques est complémentaire des indemnisations sanitaires versées aux éleveurs dont les cheptels ont été éliminés.

Dans le détail, elle sera répartie :

  • 40 millions d'euros sont fléchés vers les éleveurs.
  • 30 millions d'euros vers l'amont (élevage d'animaux reproducteurs, accouvage).
  • 500 000 euros spécifiquement vers les élevages de poules pondeuses empêchés de fonctionner normalement.
  • 9 millions d'euros vers les éleveurs de gibier dans l'impossibilité de vendre leur production (la lutte contre la grippe aviaire interdit les lâchers de gibier à plumes).
  • Les entreprises de l'aval (notamment les transformateurs privés de matière première) pourront recevoir 10 millions d'euros sous forme d'avances de trésorerie remboursables.

Les dispositifs prévus pour l'accouvage et l'aval doivent être soumis aux autorités européennes avant d'être pleinement entérinés, a précisé le ministère.

"Le bénéfice de la concertation" pour le comité interprofessionnel

Marie-Pierre Pé, directrice du CIFOG, le Comité interprofessionnel des palmipèdes à foie gras, participe depuis plusieurs mois aux groupes de travail mis en place pour décider des mesures à prendre pour faire face à ces épisodes de grippe aviaire et déterminer les indemnisations des professionnels en cas de crise. Elle a participé à la réunion avec le ministre mardi et veut souligner ce mercredi "la concertation réelle" qui s'est enclenchée.

"C'était important de faire ce point avec le ministre" dit-elle, "on avait besoin de cette confirmation des indemnisations."

Pour Marie-Pierre Pé, la vraie avancée réside dans le temps gagné sur les indemnisations, plusieurs mois, par rapport à 2017. 

"Nous avons aussi obtenu que les gaveurs, qui vont forcément devoir attendre un délai de 90 jours avant de retrouver des canards soient indemnisés à 100% pendant ces 90 jours et ça, c'est une vraie avancée car ce n'était pas le cas en 2017."

Des discussions sont toujours en cours explique-t-elle, notamment pour indemniser les producteurs en GAEC qui ont créé des SARL pour vendre leurs produits en direct et pour les entreprises de transformation. 

"C'est mieux que zéro" pour cet éleveur

Daniel Gesta travaille avec son fils à Castelnau-Barbarens, dans le Gers. Le 22 mars 2021, ils ont dû abattre 3 000 canards et 1 000 poulets, après la découverte de cas d'influenza aviaire dans leur poussinière. Depuis, l'exploitation est à l'arrêt et vit au rythme des désinfections et des contrôles, en attendant le feu vert des autorités sanitaires pour relancer la production. Il accueille le plan annoncé de façon plutôt positive. "On considère que dans la mesure où nos animaux ont été abattus sur décision préfectorale, c'est légitime de recevoir cette aide de l'Etat. Le risque maintenant, c'est de ne pas l'avoir à hauteur de ce qu'on a perdu.

Il ne faut pas oublier qu'entre le moment où on abat nos animaux et celui où on peut produire à nouveau du canard gras, il se passe 6 mois, ça fait quand même des sommes très importantes pour la filière. Mais ce plan, malgré tout, c'est mieux que zéro.

Daniel Gesta

"C'est rien" pour les Canards en colère

Lionel Candelon est beaucoup moins positif. Cet éleveur a perdu son cheptel, abattu début février après la découverte d'un cas de grippe aviaire sur une exploitation voisine de la sienne. Il est aussi le président et le porte-parole de l'association les Canards en colère, qui regroupe 113 professionnels du Sud-Ouest. Pour lui, dans les annonces du ministre, "il n'y a rien".

Ce qu'il a annoncé hier soir, on le sait déjà depuis un mois et demi mais concrètement, il n'y a rien. Avant août, on n'aura rien. Pour les éleveurs, les gaveurs qui ont la chance d'avoir une banque conciliante ou des prêts garantis, ça peut aller mais nous, tous les autres, on est au fond du seau. 

Lionel Candelon, président et porte-parole des Canards en colère

Il détaille les pertes d'exploitation subies depuis l'abattage de ses 2 800 canards. "On arrive à 33 000 euros de pertes. Sauf qu'avec les agios, les pénalités pour reporter les factures, les frais s'accumulent. On va accuser un an de retard pour toucher les aides et cette année de retard va peut-être me coûter le dépôt de bilan de ma société."

"Certes, c'est long" répond Marie-Pierre Pé, "mais on reste dans les délais qui avaient été annoncés" et pour les producteurs souligne-t-elle, "on gagne beaucoup de temps. Les soldes des indemnisations attendues arriveront dans le courant de l'automne, quand en 2017 ils avaient dû attendre mars de l'année d'après". 

Ce plan acté, il faut maintenant attendre "sa feuille de route". Elle devrait être connue fin juin, début juillet.

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