Témoignages. "Je n'ai plus mal", quel est ce traitement méconnu qui supprime les douleurs chroniques et qui est pourtant très efficace

Publié le Écrit par Colette Aubert

Deux médecins spécialistes ont établi un partenariat avec l'hôpital d'Auch et proposent de soigner les douleurs chroniques grâce à une technique peu connue : la neurostimulation médullaire implantable. Un dispositif qui vient soulager les souffrances grâce à une sonde implantée dans le corps.

Des douleurs qui s'apparentent à des "coups de couteau". Thomas Gine, 39 ans, souffre depuis un accident de voiture en 2014 de cruralgie et de lombalgie chronique. Infiltrations de lidocaïne, de botox, opérations des lombaires, ces dernières années, les traitements pour tenter de soulager ses symptômes se sont succédé, mais aucun d'entre eux n'a réellement fonctionné. "Il n'y a que le TENS (neurostimulation électrique transcutanée, un courant électrique transmis par des électrodes nldr) qui faisait du bien, mais c'était contraignant, il fallait se brancher, on a des fils un peu partout'", témoigne-t-il.

Alors le 29 février, après une première tentative infructueuse à Montpellier, il se rend à l'hôpital d'Auch pour une nouvelle intervention chirurgicale encore peu pratiquée : la neurostimulation médullaire implantable. Une opération d'une à deux heures qui lui a changé la vie. "J'ai repris la marche. Ça va mieux dans la vie quotidienne, pour cuisiner, pour habiller les enfants, toutes les activités. Ça calme beaucoup les douleurs de cruralgie, et les douleurs lombaires ont bien diminué."

Un soulagement physique et moral que ressent aussi Nathalie Dubarry, opérée le 6 mars dernier pour une lombosciatique gauche. Après des années de parcours du combattant pour tenter d'atténuer ses souffrances, elle franchit le cap à contrecœur. "J'étais sceptique, je me disais : si jamais ça ne marche pas. Mais je l'ai fait. Je crois que j'ai eu raison. Je n'ai plus mal, je fais de la marche, j'ai des projets plein la tête."

Un courant électrique qui bloque le message de la douleur

En quoi consiste ce système, peu connu des médecins et des patients ? "C'est une sonde de la taille d'un spaghetti qu'on met dans l'espace péridural via une piqûre, on fait monter la sonde sous la neuvième ou dixième vertèbre thoracique, explique le Dr Jean-Mathieu Mastantuono, anesthésiste et médecin spécialiste de la douleur. C'est une sorte de courant électrique qui bloque le message de la douleur à la moelle épinière."

Cette technique n'est pas nouvelle, d'après le médecin, elle a été découverte dans les années 80. Mais reste peu pratiquée. "Elle est réservée aux neurochirurgiens ou aux anesthésistes, explique-t-il, et peu rémunératrice. Pour une chirurgie d'une à deux heures, le médecin touche 180 euros brut."

Autre complexité : la prise en charge des patients. "Il faut que le patient ait une douleur neuropathique, et qu'il n'ait pas de souci psychologique avec le fait d'avoir un corps étranger implanté. Et puis, il peut y avoir des complications". À ce sujet, la Haute Autorité de Santé décrit "une probabilité importante de réintervention compte tenu du risque de déplacement, fracture ou infection d'électrode" notamment. Un encadrement strict du patient avant et après l'opération est nécessaire.

Des douleurs "réduites de 50%"

Pour pouvoir y prétendre, pas d'autre choix pour les patients que d'expérimenter d'abord les traitements traditionnels, comme les antidépresseurs, les antiépileptiques, le Tramadol ou les infiltrations. La neurostimulation médullaire implantable ne se pratique que si ces médicaments ont échoué et apparaît donc comme un dispositif de dernier recours.

Pourtant, les résultats sont inespérés. D'après le Dr Mastantuono, "cela ne soigne pas la maladie, mais c'est ce qu'il y a de plus efficace" ; il décrit un taux de réussite élevé, et des douleurs diminuées de 50%. "Les patients sont ravis. Avec les antidépresseurs ou les antiépileptiques, il y a beaucoup d'effets secondaires, comme la somnolence ou la prise de poids."

Cette technique, elle, en plus d'être totalement prise en charge, est "moins invasive". La première semaine après l'opération, la sonde est connectée à un générateur externe lors d'une phase de test. L'implantation définitive est conditionnée à une réduction drastique de la douleur (au moins 50%).

Un partenariat avec l'hôpital d'Auch

Dans la région, la neurostimulation médullaire implantable se réalise "à Toulouse, à Montpellier et dans quelques centres hospitaliers", indique le professionnel de santé, et ce n'est que depuis janvier qu'elle est possible à Auch. Le fruit d'une association entre deux professionnels, le Dr Mastantuono, Gersois d'origine, et le Dr Mathieu Bobet, anesthésiste toulousain, et d'un partenariat public privé avec le CH d'Auch. "On a des cabinets, on essaie de faire un maillage du territoire. La consultation est à l'Isle-Jourdain (Gers), les opérations sont à l'hôpital d'Auch." 

Une structure spécialisée dans la prise en charge de la douleur à venir

Les médecins, conventionnés secteur 1, proposent aussi au sein de leur cabinet le traitement par stimulation magnétique transcrânienne répétitive, un soin des douleurs grâce à un champ magnétique. Ils sont les seuls dans le Gers à détenir la machine nécessaire à ce système.

Ils prévoient d'ailleurs de faire construire une structure à l'Isle-Jourdain spécialisée dans la prise en charge de la douleur, regroupant un ostéopathe, un kinésithérapeute, un psychiatre, un rhumatologue et un neurologue. "Pour prendre en charge la douleur, il faut tout un arsenal de médecins, insiste le Dr Mastantuono. C'est multidisciplinaire." Le bâtiment devrait voir le jour en 2026.

Aujourd'hui, alors que selon le spécialiste, "20% de la population est touchée par des douleurs chroniques", l'objectif est d'exporter le modèle d'Auch ailleurs sur le territoire. "Il y a une demande énorme, décrit-il. Les gens sont mal entourés, les médecins traitants démunis, les centres ont des délais d'attente très importants. Sur les 20%, moins d'1% atterrit dans un centre antidouleurs agréé." À Auch, depuis la mise en place du partenariat, trois patients ont déjà été opérés.

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