Le Conseil d'État a confirmé l'annulation du plan social de l'ex-transporteur Mory Ducros, ce qui ouvre la voie à des dommages et intérêts
pour les 2.800 anciens salariés licenciés en 2014 pour motif économique.
La plus haute juridiction administrative rejette l'homologation, par l'administration du Travail, du plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) de Mory Ducros, comme le tribunal administratif de Cergy-Pontoise et la cour d'appel de Versailles l'avaient fait, en juillet et octobre 2014.
Le site de Bruguières, près de Toulouse avait été touché par ce PSE. Le site avait été maintenu mais 72 emplois avaient disparu. Un an plus tard, les 67 derniers salariés avaient eux-aussi été licenciés après la faillite de Mory Global, l'entreprise qui avait repris Mory Ducros
Placé en redressement judiciaire en novembre 2013, Mory Ducros avait été en partie repris début 2014 par son actionnaire, Arcole Industries, au prix de 2.800 licenciements, soit un des plus lourds plans sociaux depuis celui de Moulinex en 2001. L'entreprise avait licencié en priorité le personnel travaillant dans les agences qu'elle avait choisi de fermer. La justice a estimé que cela contrevenait aux "critères d'ordre" (situations familiale et personnelle, ancienneté, qualités professionnelles, etc.) à respecter dans pareille situation.
"Sauf accord collectif conclu au niveau de l'entreprise ou à un niveau plus élevé, les critères déterminant l'ordre des licenciements doivent être mis en oeuvre à l'égard de l'ensemble du personnel de l'entreprise", et non au niveau d'une partie seulement de l'entreprise, selon la décision du Conseil d'État. En faisant valoir ce point, "la cour administrative d'appel de Versailles (...) n'a pas commis d'erreur de droit", écrit l'instance suprême en rejetant les pourvois de la société Mory Ducros et du ministre du Travail, représentant l'administration.
L'entreprise et celle qui lui a succédé (MoryGlobal) ayant disparu, les licenciés ne peuvent prétendre à une réintégration. Mais ils pourront toucher de l'argent en compensation. "Les prud'hommes peuvent accorder entre 6 mois et un an de salaire à titre d'indemnités" pour chaque licencié, a assuré Jean-Claude Hacquard, ancien numéro un de la CGT Mory. Selon lui, des centaines de dossiers ont déjà été déposés aux prud'hommes, notamment 260 par son syndicat en région parisienne. "C'est formidable, je suis content pour tous mes collègues qui vont pouvoir faire reconnaître leur préjudice", a-t-il commenté.
La décision du Conseil d'État a été prise au regard des dispositions du Code du Travail en vigueur à l'époque du PSE. Depuis la loi Macron d'août 2015, elles ont été modifiées concernant les critères d'ordre relatifs aux licenciements économiques.