À l’institut universitaire du cancer de Toulouse Oncopole, un nouveau cap dans la recherche vient d’être franchi. Un patient atteint d’un cancer ORL a reçu une dose d'un vaccin personnalisé. Cette immunothérapie individualisée est une première en France et en Europe.
Le 15 janvier dernier, un patient souffrant d’un cancer ORL a pu bénéficier du tout premier vaccin individualisé TG4050, conçu par la biotech française Transgene.
En cancérologie, les immunothérapies consistent à modifier le fonctionnement du système immunitaire pour lui permettre de reconnaître et de détruire les cellules tumorales. Or, chaque tumeur a son propre profil biologique, l’équivalent d’une carte d’identité moléculaire.
L’immunothérapie « sur mesure »
Le principe de l’immunothérapie individualisée TG4050 fonctionne un peu à la manière de la « reconnaissance faciale » d’un smartphone, en permettant d’identifier les cellules cancéreuses pour les détruire. Il s’agit de permettre au système immunitaire de déclencher une réaction de défense comme avec tout vaccin classique. Sauf que dans ce cas précis, le vaccin est adapté au patient et donc unique. Le système immunitaire du patient est renseigné très précisément sur l'identité moléculaire de la tumeur puisqu'on lui indique une trentaine de néo-antigènes à repérer. Ces derniers sont disposés à la surface des cellules cancéreuses.
Une prouesse scientifique
Trois milliards de données ont été analysées pour concevoir ce vaccin personnalisé en seulement trois mois, le temps pour le patient de subir une opération et des séances de radiothérapie. La conception d'un traitement personnalisé dans un délai aussi court est possible grâce à l’utilisation de modèles mathématiques.
Le programme mis au point à Toulouse avec Transgene permet de séquencer le génome de la tumeur et les cellules normales, soit 3 milliards de données au total, puis il s'agit de sélectionner 30 néo-antigènes grâce à l'intelligence artificielle.
Toulouse à la pointe dans le domaine de la recherche en oncologie
Ce premier essai clinique de phase 1 a été conduit sur un premier patient à l’IUCT-Oncopole par le Pr Jean-Pierre Delord, directeur général de l'Institut universitaire du cancer de Toulouse Oncopole, en collaboration avec le Pr Christophe Le Tourneau de l’Institut Curie à Paris. Il est lancé auprès de patients nouvellement diagnostiqués pour un cancer ORL HPV négatif (c’est à dire négatif au papillomavirus), localement avancé et ayant été traité par chirurgie.
Plusieurs stratégies font encore l’objet d’investigations cliniques pour prévenir les récidives de cancers ORL non viro-induits, explique le Pr Jean-Pierre Delord. L’approche du TG4050 est originale et s’appuie sur un processus de conception-fabrication très innovant. Il vient d’être démontré qu’il est possible de mettre à disposition une immunothérapie individualisée en 3 mois. Avec le Pr Maha Ayyoub, immunologiste, et l’unité de recherche clinique, nous observons avec attention le déroulement de l’essai et espérons prouver le déclenchement d’une réponse immunitaire. »
Dans le monde il y peu de centres de pointe dans ce domaine. Il y a l’Institut Curie à Paris, le MD Anderson Cancer Center, qui se trouve dans l’état du Texas aux Etats-Unis, et L’institut Universitaire du Cancer de Toulouse Oncopole.
Aujourd’hui, le premier patient traité à Toulouse se porte bien, il reste sous surveillance mais les résultats sont encourageants.
L'objectif est maintenant de montrer l'innocuité de ce traitement et prouver que le corps du patient a développé une réponse immunitaire.
Deux autres patients, traités à l’Oncopole de Toulouse pour des cancers ORL de la tête et du cou, recevront le vaccin thérapeutique individualisé TG4050 d’ici la fin de l’hiver.
Jusqu’à 30 patients recevront TG4050 en France, au Royaume-Uni et aux États-Unis dans le cadre de cette recherche qui doit évaluer les bénéfices du traitement avec TG4050 chez des patients présentant un risque élevé de récidive de leur cancer.