Une réunion entre des scientifiques de l'Atelier d'écologie politique (Atécopol) et Carole Delga, présidente de la Région Occitanie, n'a fait que confirmer les désaccords sur la construction de l'autoroute A69, destinée à relier Toulouse au bassin Castres-Mazamet.
Plus les jours avancent et plus le dialogue entre pro et anti-autoroute A69 semble de plus en plus difficile. Voire impossible. La rencontre, mercredi 11 octobre, entre sept membres du collectif Atécopol, composé de 200 scientifiques toulousains, et Carole Delga pour discuter de l'autoroute A69 n'a pas abouti à un consensus. Les chercheurs ont exprimé leur inquiétude quant à la non-prise en compte des résultats scientifiques dans la prise de décision politique dans ce projet. Leurs préoccupations sont basées sur des arguments publiés précédemment dans une tribune signée par près de 2000 scientifiques. Finalement, cet entretien n'aura été qu'un "échec".
"Nous regrettons que les risques sociaux et environnementaux du projet, qu’il s’agisse de lutte contre le réchauffement climatique, d’atteintes irréversibles à la biodiversité ou d’augmentation des coûts de la mobilité, soient minorés ou non pris en compte. Si la science ne peut en aucune façon dicter la décision publique, décider, en ignorant sciemment des connaissances scientifiques clairement établies, est problématique dans une démocratie" estime le collectif dans un communiqué.
Un texte auquel Carole Delga a répondu par communiqué interposé. La présidente de la région assure partager "pleinement les alertes du monde de la recherche sur le dérèglement climatique et la nécessité d’une bifurcation écologique de nos activités." L'élue socialiste évoque la mise en place des trains à 1 euros, le développement des éoliennes marines et son soutien à l'hydrogène vert. Mais "pour autant", Carole Delga estime être de sa "responsabilité de présidente de la Région de concilier les enjeux écologiques avec les réalités démographiques, sociales et économiques et d’organiser un développement juste et équilibré entre les territoires. Notre pays souffre de l’hyper-métropolisation. Avec près de 20 000 nouveaux habitants chaque année, un record dans notre pays, l’aire urbaine toulousaine est complétement saturée. Il faut cesser la concentration des richesses, des services, des emplois au détriment des espaces périurbains et ruraux."
Des propos qui désespèrent le climatologue et anti A69, Christophe Cassou. "Il y a un climat qui est en train de s'imposer et qui nous inquiète beaucoup, nous scientifiques. Les politiques ont une sorte de déni de la gravité de la situation. Comme si on pouvait s'accommoder des lois naturelles de la physique. Comme si on pouvait négocier avec les tonnes de CO2 qui s'accumulent dans l'atmosphère. La manière dont on réduit nos émissions de gaz à effet de serre, ce sont en effet des enjeux démocratiques et de société, de choix politiques et de vivre ensemble. Mais découpler l'économie et le social d'un côté et le climat et la biodiversité de l'autre, nous mène à un mur."
Certains élus n'hésitent pas à pratiquer le "en même temps" : planter des arbres et développer l'utilisation du vélo, tout en augmentant la vitesse sur les routes départementales et en soutenant un projet autoroutier sources d'émissions de CO2. Dans un texte publié dans le JDD, le maire de Toulouse est même allé plus loin. Pour Jean-Luc Moudenc, les autorités environnementales deviennent trop contraignantes et ne doivent pas passer avant l'avis des élus locaux. Sinon, selon lui, c'est mettre en danger la démocratie : "notre démocratie naît de la délibération libre de l'intérêt commun par le peuple, et pas des "vérités" scientifiques d'un jour". Face à ces postures, le débat de ne peut virer qu'au dialogue de sourds avec des aveugles.