Des congés payés illimités. C'est ce que proposent plusieurs entreprises françaises à leurs salariés. Exemple, à Toulouse (Haute-Garonne), dans un cabinet de conseil. La formule fait recette et il n'y a pas d'abus. Explications.
Fixer votre propre salaire. Pendre autant de congés payés que vous le souhaitez. Dire que vous n'êtes pas d'accord avec la dernière décision de votre patron. Impossible ? Et bien, détrompez-vous. C'est ce que vivent les salariés d'un cabinet de conseil, basé près de Toulouse (Haute-Garonne). Comment cela marche ? On vous explique.
Salariés responsables
Dans cette PME, chacun gère son emploi du temps ou son niveau de rémunération en fonction des missions qui lui sont confiées. Et cela se fait dans la plus grande transparence avec toute l'équipe. "Un salarié qui veut poser un congé, c'est assez simple, explique Romain Olives, le fondateur d'Ihmisen. Si c'est OK pour son client, il le pose et c'est accepté de facto. Il n'y a pas de règles de contrôle en interne par rapport à ça."
"Il n'y a pas de limite particulière. Si on considère que c'est positif pour nous et pas négatif pour notre mission et notre client, il n'y a aucun problème pour poser des congés", nous explique l'un des salariés d'Ihmisen.
On n'a pas envie de faire n'importe quoi, on a envie que le modèle fonctionne.
Gwladys Hilarion, salariée d'Ihmisen
Le patron, lui, s'inspire de modes de gouvernance alternatifs : sociocratie, holacratie, SCOP. Ici pas de hiérarchie, mais une forme de gestion commune qui attire les candidats à l'embauche.
Anne-Sophie Guérif a longtemps travaillé dans des entreprises plus "traditionnelles" dans lesquelles le salarié est souvent un exécutant. "Ce n'est pas, parce qu'on est un collaborateur, que l'on n'a pas de bonnes idées. Au contraire, estime celle qui fait partie des dernières recrues du cabinet de conseil. Dans cette entreprise, on peut donner son point de vue. On peut participer pour faire grandir l'entreprise." Résultat :
Ça donne du sens à son travail. On s'investit davantage.
Anne-Sophie Guérif, salariée
La responsabilisation est au cœur du fonctionnement de l'entreprise où l'autre mot-clé est la co-construction et la reconnaissance du savoir-faire de chacun.
Décisions collégiales
Comment cela fonctionne concrètement ? Voici quelques exemples livrés par le patron. Pour une décision qui relève d'une certaine expertise, il s'agit alors de s'appuyer sur le "sachant" de l'équipe. "C'est lui qui va prendre la décision parce que l'on estime que c'est lui le mieux placé pour le faire", explique Romain Olives.
Autre exemple, concernant les recrutements. Là, il s'agit d'une décision qui réclame le consensus de toute l'équipe. "Il faut que toute l'équipe soit d'accord sur la personne qu'on recrute."
Dans l'organigramme de cette société, pas de pyramide. "C'est clair et net", dit Romain Olives qui défend une organisation et un travail en réseau. "Un jour vous êtes connectés avec quelqu'un. Le lendemain, ça peut être une autre personne. Et on bouge avec ce qui nous entoure."
La mode des congés illimités décolle en Francehttps://t.co/0z71IQSTtD pic.twitter.com/f5yGuKM9Gm
— franceinfo (@franceinfo) May 24, 2018
Et cela marche. Dans ce petit cabinet de conseil n'y a pas d'abus sur les demandes de congés par exemple. Et le chiffre d'affaires continue de progresser. La formule a également fait ses preuves dans de plus grosses entreprises. Selon Clément Ruffier, sociologue et chercheur à l'Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail, plusieurs grandes enquêtes, au niveau européen et au niveau français, montrent que "plus les entreprises sont participatives, plus elles sont performantes. Et mieux les conditions de travail sont notées par les salariés."
Propos recueillis par Christophe Romain et Eric Foissac.