Pourquoi les températures varient de plusieurs degrés d'un endroit à l'autre de la ville ? Comment lutter contre ces fours en ville ? On vous dit tout sur les îlots de chaleur urbains à Toulouse.

Il fait chaud. Ce n'est pas cet article qui vous l'apprendra, on en parle partout, depuis plusieurs jours et surtout on le vit, tous… mais pas de la même manière. La chaleur aussi est inégalitaire. On la ressent moins dans un jardin que dans un bâtiment bétonné. C'est prouvé scientifiquement, ça s'appelle des îlots de chaleur urbains (ICU).

Dans l'agglomération toulousaine, en juillet 2017, la Métropole a installé dix-huit capteurs pour mesurer les variations de température. Il en existe soixante désormais, qui relèvent des écarts de température allant jusqu'à plus de cinq degrés entre les bords de Garonne et le Capitole par exemple. Depuis, des études sont lancées pour améliorer l'urbanisme en fonction de ces îlots de chaleur et rendre la ville plus respirable.

Voici la carte des stations météo de l'agglomération toulousaine :

C'est quoi un îlot de chaleur urbain ?

Il s'agit d'endroits, en ville, où les températures sont particulièrement élevées de jour comme de nuit, par rapport aux zones rurales voisines. Valéry Mourot, prévisionniste chez Météo France à Toulouse, explique que ces différences de température sont tout à fait normales. 

C'est l'effet de l'urbain. Les températures sont mesurées dans des conditions bien spécifiques, sans obstacle, sur un couvert végétal, dans notre station à Blagnac. Donc, quand on prévoit 39°C, il faut relativiser. C'est logique que rue Alsace Lorraine (centre ville de Toulouse, ndlr), le thermomètre affiche une température encore plus élevée.

Valéry Mourot, prévisionniste Météo France, Toulouse

L'explication scientifique à ce phénomène est simple : "le béton emmagasine l'énergie solaire qui devrait se refroidir ensuite la nuit, c'est donc une inertie thermique", développe le prévisionniste. Concrètement, les bâtiments stockent la chaleur et les surfaces en béton limitent le refroidissement nocturne de l'air, plus rapide à la campagne grâce aux arbres. On parle donc souvent d'îlot de chaleur urbain nocturne.

4°C de différence en moyenne

Valéry Mourot souligne une différence de température de quatre degrés en moyenne. "Ça dépend du béton mais aussi de l'environnement, si le vent est brisé par exemple" rapporte-t-il.

Si on annonce 23° en température minimale, on ne prend pas en compte l’effet urbain. Il fera donc probablement 26° au centre-ville.

Valéry Mourot, prévisionniste Météo France, Toulouse

Carte des îlots de chaleur urbains à Toulouse

Sur ce site internet, la Métropole de Toulouse, en collaboration avec Météo France, propose une carte des îlots de chaleur urbains à Toulouse. Les températures dans les différents quartiers de la ville sont observées et actualisées toutes les quinze minutes. 

Par exemple, ces dernières 24 heures, les minimales varient entre 19,6°C à "Toulouse météopole" et 23,8°C à "Toulouse Marengo".

Concernant les maximales de ces dernières 24 heures, elles vont de 34,7°C à "Mondonville école" à 36,6°C à "Toulouse Marengo".

François Chollet, conseiller municipal en charge notamment de la qualité de l'air, indique que cette carte met en évidence des "niveaux très différents d'îlots de chaleur. En périphérie de Métropole, ils sont rares par exemple. C'est concentré dans le centre ville."

Plus de chaleur, de consommation d'énergie et de risques en ville

L'Agence d'Urbanisme et d'Aménagement de Toulouse aire métropolitaine travaille aussi en collaboration avec la mairie et Météo France. C'est une association qui regroupe différentes collectivités locales qui "éclaire les acteurs de la ville dans la connaissance des évolutions urbaines, sociales, économiques et environnementales".

Dans ce glossaire, elle explique que les îlots thermiques résultent de cinq facteurs : 

  • La circulation automobile intense
  • Le chauffage et la climatisation
  • Les activités
  • La minéralisation excessive
  • Le déficit de végétal et d’eau dans les espaces publics

Surtout, ces îlots engendrent une augmentation de la consommation en énergie et en eau pour le rafraîchissement puisqu'il fait plus chaud dans les bâtiments, en ville, qu'à la campagne. C'est un cercle vicieux. 

Pour l'AUAT, les risques pour la santé publique sont plus élevés dans ces îlots de chaleur lors des épisodes caniculaires comme celui que nous traversons. 

Problématique nocturne des faubourgs

Plusieurs études permettent à l'AUAT de constater que l'îlot de chaleur urbain se développe surtout sur les faubourgs, la nuit. Les températures sont "plus homogènes le jour que la nuit" explique l'AUAT. 

On observe entre 4 et 6°C de différence de température la nuit, au moment où les gens sont chez eux ! S’il y a une chaleur élevée qui ne baisse pas la nuit, vous dormez mal. Et si en plus vous avez une pathologie quelconque ou que vous êtes âgé ou très jeune, l'enjeu devient un enjeu de santé publique.

Geneviève Bretagne, responsable du pôle transition écologique à l’AUAT

Plus surprenant : "en journée d’été, la partie la plus chaude de la ville n’est pas le cœur historique dense mais les faubourgs immédiats : les rues y sont plus larges et les bâtiments plus petits, induisant un ensoleillement plus important de la rue". Cela est lié à "l'organisation de l’espace public" rapporte Geneviève Bretagne.

La configuration de l'hypercentre, liée au passé moyenâgeux de la ville, permet à la chaleur de garder un minimum de frais alors que dans les rues des faubourgs, plus larges, l'accumulation de chaleur est plus importante le jour et les matériaux utilisés comme le bitume, la brique et le béton font que cette chaleur emmagasinée le jour est restituée très lentement la nuit. Et comme il n’y a pas beaucoup de végétation, on n’a pas du tout d’effet de rafraichissement.

Geneviève Bretagne, responsable du pôle transition écologique à l’AUAT

"Il faudrait revoir l’organisation de l’espace et pas seulement planter des arbres, mais être sûr qu'ils puissent pousser parce que le système racinaire des arbres n'est pas toujours compatible avec les tuyaux qu'on trouve en ville par exemple", conclut Geneviève Bretagne. 

Comment lutter contre ces disparités ?

Ces disparités, révélatrices du réchauffement de la planète et de l'urbanisation massive sont dangereuses, notamment pour les personnes qui vivent dans ces îlots de chaleur. Soucieuse de l'environnement et des habitants, la mairie de Toulouse affirme étudier et développer des projets de végétalisation. "Ça fait partie de l’adaptation au changement climatique" précise François Chollet, élu à la mairie de Toulouse. Et de reprendre : "le meilleur climatiseur, c’est la végétation !"

L'étude des îlots de chaleur nous permet d’introduire dans les documents d’urbanisme un aspect végétalisation. 

François Chollet, élu à la mairie de Toulouse

François Chollet rapporte qu'il est difficile d'agir sur les bâtiments existants, "on ne peut pas les détruire". Il précise que la municipalité est à l'initiative de deux grands projets de végétalisation : 

  • Le développement de cinq grands parcs existants (Le Touch, l'Hers, la Garonne, le Canal, la Margelle) 
  • Le plan arbres : 100 000 arbres seront plantés en 10 ans à Toulouse

-10°C grâce à la végétalisation

"Par exemple, 10 hectares de bitume ont déjà été enlevés sur l'île du Ramier" rapporte François Chollet. Il indique que le PCAET (Plan climat-air-énergie territorial) oriente "nos politiques publiques dans un souci écologique et d'adaptation au changement climatique." La Métropole de Toulouse affirme faire attention à ce qu'il y ait du végétal dans les constructions futures.

L'idée du plan arbres (100 000 arbres plantés en 10 ans, ndlr), est de créer des îlots de fraicheur. Nous souhaitons ouvrir des espaces verts de proximité dans tous les quartiers. 

Clément Riquet, élu en charge des espaces verts, de la biodiversité et des jardins partagés à Toulouse

La ville est aidée notamment par le gouvernement, qui a annoncé un plan d'aide de 500 millions d'euros "pour renaturer les villes". 

D'après cette étude scientifique publiée dans la revue Nature Communications, les arbres pourraient réduire de 10°C la température en ville en été. 

Ce vendredi 17 juin 2022, quatorze départements sont placés en vigilance rouge canicule en France et des records de chaleur ont été battus d'après Météo France. Il est donc grand temps d'agir.

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