Des associations toulousaines alertent sur la situation préoccupante des personnes les plus précaires, comme les sans domicile, en cette période de confinement lié à l'épidémie de coronavirus. Ils dénoncent notamment des contrôles des attestations dérogatoires "absurdes" pour cette population.
Dans un communiqué en date du 27 mars 2020, la Case de santé, une association toulousaine qui oeuvre depuis 2006 dans le quartier Arnaud-Bernard de Toulouse contre les inégalités sociales de santé, s'inquiète des conséquences des contrôles policiers effectués à proximité du lieu. Ces contrôles ont pour objet la vérification des autorisations dérogatoires de déplacement, liées au confinement et à l'épidémie de coronavirus mais pour la population précaire accueillie dans ce lieu de soins unique à Toulouse, ils sont pour le moins déplacés, estime l'équipe de la case.
Entrave à l'accueil
La semaine dernière, les personnels estiment même que les limites ont été très clairement franchies, des contrôles ayant empêché des personnes, souvent très malades, de rentrer dans le centre. "Des cris, des propos irrespectueux [ont été] adressés à nos personnels soignants…""On verbalise ces personnes parce qu'elles n'ont pas d'attestation sur elles, mais beaucoup d'entre elles ne parlent pas ou mal le français et viennent précisément ici dans le but de se faire aider dans ce sens", explique Henri Santiago, le président de l'association. "Les contrôles sont déjà fréquents en temps normal aux abords de la Case de santé car il y a beaucoup de personnes sans papier", poursuit-il, "c'est déjà insupportable mais là, dans ce contexte sanitaire très difficile, c'est inadmissible. Il y a clairement eu une entrave à l'accueil et les personnels ont été invectivés".Le personnel a autre chose à faire en ce moment : il faut sanctuariser les abords du centre de santé
"Etat d'urgence sanitaire ou sécuritaire ?"
La Case de santé en appelle aux pouvoirs publics : "L’urgence sanitaire doit faire passer la réponse aux besoins sanitaires au-dessus des obsessions sécuritaires de certaines autorités publiques et des politiques du chiffre honteuses", peut-on lire dans le communiqué. "Alors aujourd’hui, l’urgence sanitaire nous fait dire : laissez-nous bosser ! Et demain, nous ne manquerons pas de vous demander des comptes".Cette demande - pressante - est aujourd'hui relayée très fortement par la LDH (Ligue des droits de l'homme) de Toulouse. Après que les travailleurs sociaux et les associations toulousaines ont tiré la sonnette d'alarme à maintes reprises sur la situation extrêmement préoccupante des personnes vivant à la rue, la LDH a créé il y a dix jours une cellule de veille. Et les informations qui lui sont parvenues jusqu'à maintenant la poussent aujourd'hui à publier, elle aussi, un communiqué alarmant. "Des informations concordantes attestent de la multiplication des contrôles et des verbalisations pour violation des règles du confinement pratiquées à l'encontre de personnes sans domicile fixe et précaires", écrit la ligue.
Des pratiques "ubuesques"
"Quand vous n'avez pas de domicile, comment voulez-vous imprimer une attestation ? Pour dire quoi, d'ailleurs ? Que vous allez rentrer nulle part, après votre déplacement ? Il faut raison garder, là...", s'exclame Pascal Nakache, avocat au barreau de Toulouse et président de la LDH régionale. "Alors, nous ne savons pas si ces contrôles relèvent de la police municipale ou nationale mais nous en appelons aux pouvoirs publics, pour qu'ils prennent la mesure de ces aberrations."Jean-François Mignard, de la Ligue des droits de l'homme à Toulouse, appuie le propos : "C'est notre deuxième communiqué mais on en publiera régulièrement, on va interpeller la préfecture et la mairie pour qu'ils accélèrent la question des SDF à Toulouse, où il y a beaucoup de retard, par rapport à Bordeaux par exemple".