Et si la vague de l’épidémie ne s’abattait pas sur Toulouse et si notre région était relativement épargnée par le coronavirus ? Les médecins de l’hôpital restent prudents mais il y a des signes encourageants. Le CHU a fait le point ce vendredi 3 avril.
Depuis plusieurs semaines les médecins redoutaient la vague de l’épidémie de coronavirus. Elle ne viendra peut-être pas. Depuis quelques jours la situation au CHU de Toulouse semble stable.
"Il n’y a pas de vague ni de submersion, explique le professeur Pierre Delobel. Nous ne sommes pas sur une courbe exponentielle et nous avons l’impression d’une stabilisation depuis les trois, quatre derniers jours", précise le chef de service des maladies infectieuses.
Cela continue à augmenter mais de façon beaucoup moins importante. C’est une dynamique plutôt rassurante si elle se confirme. On va rester prudents car trois jours de plateau cela peut être un faux plat mais on a des signes encourageants sur la dynamique locale.
La situation est peu différente pour les patients en réanimation qui eux se retrouvent hospitalisés pour deux à trois semaines.
Le nombre de patients qui ont besoin de réanimation continue d’augmenter de 5 à 10 % par jour.
"Au départ, on avait des patients hospitalisés avec un début de signes cliniques et qui ensuite s’aggravaient", indique Béatrice Riu, responsable de l’unité de réanimation à l’hôpital Purpan. "Depuis 24 à 48 heures, le Samu intervient plus souvent à domicile sur des formes plus graves où d’emblée il faut intuber. Il s’agit de patients qui présentent des fragilités et qui probablement décompensent plus vite".
Les femmes mieux protégées face au coronavirus
Le profil des cas les plus graves hospitalisés en réanimation est toujours le même : ce sont des personnes âgées de 55 à 65 ans en moyenne et en majorité des hommes (72%).Pierre Delobel souligne : "C’est la même tendance au niveau national et international".
Le chef de service des maladies infectieuses de l'hôpital de Toulouse explique :
On le sait, il y a une différence de la réponse immunitaire entre les hommes et les femmes. Ce qu’on appelle l’immunité innée chez les femmes est meilleure notamment chez les femmes en âge de procréer. On connait ces mécanismes et c’est très frappant dans l’épidémie actuelle.
Toulouse bénéficie de l’effet confinement
L’épidémie de coronavirus est arrivée plus tard dans la région toulousaine, l’hôpital a eu le temps de se préparer et les effets du confinement commencent à se faire sentir."L’hypothèse selon laquelle le confinement porte des effets est plausible", affirme le directeur général du CHU de Toulouse.
Marc Penaud précise : "nous on a bénéficié du confinement alors que l’Est, la région parisienne et l’Oise n’en ont pas bénéficié. On reste très prudents mais à la date d'aujourd'hui (vendredi 3 avril, ndlr) voilà notre évaluation."
"On a travaillé et on a eu de la chance parce que l’épidémie arrive un peu plus tard chez nous qu’ailleurs et on a pu éviter de faire les mêmes erreurs que les autres," confirme Vincent Bounes.
"Toulouse a été meurtrie plusieurs fois, rappelle le directeur du Samu 31, et la médecine de catastrophe c’est dans les gênes du CHU. On était probablement plus prêts en amont que les autres."
Pas de rupture de stock au CHU de Toulouse
"En ce qui concerne les antibiotiques, il n’y a pas de grosses tensions", indique Pierre Delobel.Pour les antiviraux, on utilise des traitements expérimentaux essentiellement dans le cadre de la recherche clinique. Avec l’étude Discovery il y a eu un peu de retard à la délivrance des médicaments fournis par le promoteur qui est l’Inserm. Mais ça y est les choses vont démarrer, les premiers patients ont pu être inclus hier (jeudi 2 avril, ndlr).
Et pour les patients hors protocole nous avons, avec l’hydroxychloroquine, de quoi traiter un nombre de patients relativement important mais encore une fois ce traitement n’est pas systématique. Il y a une vérification des contre-indications cardiaques. Il y a un comité thérapeutique qui analyse au cas par cas le bénéfice risque pour le patient et valide la mise sous traitement. On utilise aussi le Lopinavir.
Une liste de 150 médicaments est surveillée en permanence. "On connait les tensions dans les autres départements", reconnait Béatrice Riu. "Il n’y a aucune molécule en rupture de stock au CHU de Toulouse. Et on a la chance d’avoir, pour les médicaments anesthésiques, une déprogrammation totale de la chirurgie ce qui nous a permis de récupérer des stocks. Donc pour l’instant il n’y a pas de difficulté mais nous restons vigilants".