Depuis leur observatoire du Volvestre, dans le village de Latrape (Haute-Garonne), deux astronomes amateurs ont découvert une étoile double dont l’existence a été validée par une revue scientifique américaine.
Dans le Volvestre, on casse le prix des d'étoiles. Certains en proposent même deux pour le prix d'une. Comme ces deux passionnés d’astronomie du "Balcon des Etoiles", installé à 45 kilomètres au sud de Toulouse dans le petit village de Latrape.
Michel Boutet et Jacques Sanchez, vice-président et président de l’association « Les Pléiades » se souviendront longtemps de cette soirée d’observation du 9 novembre 2018. Les deux astronomes amateurs, spécialisés dans l’observation des astéroïdes, ces corps célestes en orbite autour du soleil, avait pointé leurs télescopes vers l’un d’entre eux, prénommé « Aspasia ». « Aspasia mesure 187 km de diamètre, explique Jacques Sanchez, mais cet astéroîde ne présente aucun danger pour la Terre puisqu’il orbite tranquillement à près de 375 millions de kilomètres du Soleil, la Terre orbitant elle-même à 150 millions de kilomètres du Soleil ».
Une étoile occultée à 20 heures, 38 mn et 10 secondes pétantes du Temps Universel
Ce soir d'automne, Michel Boutet avait affiné ses calculs et prévu que l’astéroïde passerait devant l’étoile de la constellation du Verseau répondant au petit nom de « UCAC 4-435-115475 » à 20 heures, 38 mn et 10 secondes pétantes du Temps Universel. Autrement dit, c’était l’heure précise de l’occultation de « UCAC 4-435-115475 ». « Quand un astéroïde passe devant une étoile, il la masque pendant un certain temps, et c’est ce temps, connaissant les paramètres de vitesse de l’astéroïde, qui va permettre de déterminer sa dimension. D’autant plus que nous sommes plusieurs à observer le phénomène un peu partout sur la Terre », précise Michel Boutet.
Deux étoiles pour le prix d’une
Quelques minutes avant l’heure prévue, les télescopes sont fixés sur l’étoile et les caméras prêtes à l’enregistrement du passage d’Aspasia. « A l’instant prévu, la disparition de l’étoile sur l’écran de contrôle dure 7,6 secondes », raconte Jacques Sanchez. ». Les deux passionnés rangent alors leur matériel pour procéder à l’analyse des données acquises. C’est à ce moment-là qu’ils remarquent, à leur grande surprise, une deuxième baisse d’intensité 28 secondes après la première sur la courbe de lumière enregistrée. Les deux amateurs viennent en fait de découvrir une étoile double. « Une étoile double, ce sont deux étoiles qui tournent l’une autour de l’autre et sont plus ou moins distantes. Lorsqu’elles sont très proches, on peut en voir certaines à l’œil nu, comme dans la Grande Ourse », détaille Michel Boutet. « Pour d’autres, il faut des jumelles ou des télescopes, mais celle-ci, même avec un télescope très perfectionné on ne peut pas la voir. C’est comme si on essayait d’apercevoir une pièce d’un euro à une distance de 13 kilomètres ».
Une découverte fortuite
Seule la technique de l’enregistrement vidéo de l’occulation de « UCAC 4-435-115475 » par Aspasia a donc permis de révéler fortuitement la présence d’une étoile double. « Je ne suis pas sûr que même le télescope Hubble (télescope spatial développé par la NASA et l’Agence spatiale européenne, NDLR) soit en mesure de séparer ces deux étoiles », affirme l’astronome amateur. « Ce qui me fait plaisir, c’est qu’on a découvert par des moyens détournés une étoile qui n’est pas visible y compris avec de très gros instruments », se réjouit-il.
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Les pieds dans le Volvestre, la tête dans les étoiles
Après leur découverte, les deux passionnés du Volvestre ont rédigé un compte-rendu qu’ils ont adressé à la revue scientifique américaine JDSO (« Journal of Double Stars Observations »). Il n'aura pas fallu moins de deux années pour que leur découverte soit analysée et validée par des astronomes professionnels. En novembre dernier JDSO a publié cette validation. C’était pendant le deuxième confinement. Jacques Sanchez et Michel Boutet n’ont pas alors cherché à médiatiser leur trouvaille. « Dans notre galaxie, il y a peut-être un milliard d’étoiles, dont la moitié au moins seraient des étoiles doubles », relativise modestement Michel Boutet, la tête dans les étoiles mais les pieds solidement ancrés sur la terre du Volvestre.