Alimenter une gazinière ou un chauffage à gaz à partir des excréments rejetés par les habitants de bateaux, c'est l'objectif l'association Picojoule à Ramonville (Haute-Garonne).
Avec sa péniche, d'une centaine de mètres, Jérome Pasquer savoure le fait d'habiter, à Toulouse (Haute-Garonne) sur le Canal du midi depuis près de 20 ans. Un petit coin de paradis aux portes de la ville. "C'est bucolique, c'est calme. On est à cinq minutes du métro, mais on se croirait en pleine campagne", aime-t-il souligner.
Un bateau tout confort, avec deux chambres, une baignoire, et même un poêle à bois. Seul hic : les toilettes. Comme l'ensemble des bateliers de Ramonville (Haute-Garonne), il rejette tous ses déchets organiques dans l'eau. "On n'a pas de solution, on est pris au piège du manque d'infrastructure", confie-t-il.
Quels risques pour la biodiversité ?
Face à ce constat, l'association locale "Picojoule", s'est emparée de ce problème écologique et sanitaire. "Dans les urines ou les selles, il peut y avoir des traces de médicaments ou de pilules contraceptives, ça bouleverse l'environnement", explique Félix Dupuy, un des salariés de l'association. Parmi les effets connus : la féminisation des poissons ou encore la modification de l’ADN des moules. La plupart des bateaux sont équipés de semi-broyeurs, Picojoule souhaite les remplacer par un système de "toilettes sèches à séparation."
Les selles et les urines sont récoltées dans des récipients distincts et hermétiques. "Et une fois par semaine, une embarcation sur flotteurs viendra récolter les déchets organiques des habitants directement chez eux", ajoute-t-il. Mais l'idée n'est pas seulement de débarrasser les bateliers de ces déchets, c'est également d'arriver à les transformer, à les rentabiliser, en biogaz.
La méthanisation au cœur du processus
Le prototype se présente sous la forme d’un container. Contrairement au compostage, celui-ci est entièrement fermé. Cela évite les problèmes d'odeur, de nuisibles, mais également l’évaporation de l’azote ammoniacal et de protoxyde d’azote qui sont des gaz à effet de serre. L’azote reste sous forme de nitrate, donnant un engrais 40 % plus riche que son équivalent issu du compostage.
"Concrètement, on verse les déchets dans notre méthaniseur, on ajoute de l'eau, et avec le temps, l'oxygène s'évapore, et on récupère d'un côté le gaz, de l'autre un fertilisant", ajoute Félix Dupuy.
L'association a déjà reçu près de 30 000 euros des collectivités territoriales pour ce projet. Elle espère recevoir d'autres financements afin de mener à terme cette aventure.
D'ici juin 2023, la plateforme devrait effectuer ses premiers ramassages sur le Canal du midi.